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La coutume internationale

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Résumé du document

Avant d'être codifié par la convention de Vienne du 23 mai 1969, le droit des traités était lui-même un droit coutumier, un droit dont les règles étaient d'origine et de nature coutumières. C'est dire l'importance de la coutume internationale comme source du droit international en général et comme source du droit des traités en particulier. On peut affirmer sans à se tromper que la coutume internationale est la « reine » des sources du droit international. La coutume porte en effet le droit international général car d'une certaine façon, elle est le droit international. En leurs qualités de sources, coutumes et traités sont contemporains de la naissance du droit international. Mais alors que le droit des traités a longtemps été, et demeure encore en partie aujourd'hui, un droit spécial, la coutume internationale a d'abord visé la construction d'un droit général. L'effet obligatoire du traité est relatif : il n'atteint que les Etats parties. La coutume se veut générale : elle a vocation à obliger tous les Etats. Les règles les plus fondamentales du droit international ont été (et demeurent) des règles coutumières. Pourtant, et aussi surprenant que cela puisse paraître s'agissant de la source privilégiée par laquelle les Etats ont construit le droit international, la coutume est aujourd'hui questionnée à la fois dans son statut même de source du droit ; dans le rôle que joue, dans sa formalisation, la volonté des Etats et dans la valeur des normes juridiques qu'elle crée. Sans exagérer les divergences qui divisent parfois les internationalistes, il n'est guère contestable qu'une partie de la doctrine objectiviste n'est enclin à voir dans la coutume une source formelle du droit. Plus qu'un procédé juridique formalisé, la formation de la norme coutumière relève, à ses yeux, d'un processus plus ou moins aléatoire, dans lequel la volonté des Etats ne joueraient qu'un rôle souvent secondaire. Il y a sans doute, dans cette argumentation, une part de vérité car la coutume n'est pas un traité, elle ne naît pas d'un simple accord de volonté. La coutume en tant que mode d'élaboration du droit est-elle une source de droit international ? La réponse à cette question suppose l'examen de la formation (I) et de la mise en œuvre de la coutume (II) .

  • L'élément matériel de la coutume
  • L'élément psychologique
  • L'application des normes coutumières dans l'ordre juridique international
  • L'application des normes coutumières dans l'ordre juridique

[...] La coutume se veut générale : elle a vocation à obliger tous les Etats. Les règles les plus fondamentales du droit international ont été (et demeurent) des règles coutumières. Pourtant, et aussi surprenant que cela puisse paraître s'agissant de la source privilégiée par laquelle les Etats ont construit le droit international, la coutume est aujourd'hui questionnée à la fois dans son statut même de source du droit ; dans le rôle que joue, dans sa formalisation, la volonté des Etats et dans la valeur des normes juridiques qu'elle crée. [...]

[...] A fortiori, les actes inter étatiques pourront-ils constituer des précédents. Les règles d'une convention qui, à l'origine, n'obligent que les Etats parties, peuvent servir de point départ à un processus coutumier et ce d'autant plus que cette convention a vocation à l'universalité. La CIJ en a admis le principe dans l'arrêt de 1969 sur le Plateau continental de la mer du Nord. Les institutions internationales (actes juridictionnels et arbitraux internationaux) et les organisations internationales participent également à la formation du droit international. [...]

[...] La réponse à cette question suppose l'examen de la formation et de la mise en œuvre de la coutume (II). La formation de la coutume internationale La coutume est une source du droit international. Et c'est une source formelle, car sa formation ne relève pas d'un processus indéterminé, auquel le droit serait imperméable et qui lui demeurerait insaisissable. La formation de la coutume suppose la réunion de deux éléments primordiaux : un élément matériel et un élément psychologique L'élément matériel de la coutume La formation de la coutume s'appuie sur l'ensemble des comportements des sujets du droit international. [...]

[...] Une règle coutumière peut entrer en conflit avec un acte juridique unilatéral étatique, une recommandation d'une organisation internationale, un acte inter étatique concerté, une décision d'organisation internationale, une norme conventionnelle. Les solutions à envisager diffèrent selon que la norme coutumière est antérieure ou postérieure à l'autre norme. Si la règle coutumière est opposable à l'Etat en cause, l'acte unilatéral est inopposable aux autres sujets de droit et il est même illicite ; la règle coutumière, antérieure ou postérieure l'emporte. Une norme coutumière postérieure, contraire à la recommandation, entraîne désuétude de celle-ci et donc prévaut sur elle. [...]

[...] On peut affirmer sans à se tromper que la coutume internationale est la reine des sources du droit international. La coutume porte en effet le droit international général car d'une certaine façon, elle est le droit international. En leurs qualités de sources, coutumes et traités sont contemporains de la naissance du droit international. Mais alors que le droit des traités a longtemps été, et demeure encore en partie aujourd'hui, un droit spécial, la coutume internationale a d'abord visé la construction d'un droit général. [...]

  • Nombre de pages 3 pages
  • Langue français
  • Format .doc
  • Date de publication 21/02/2007
  • Consulté 152 fois
  • Date de mise à jour 21/02/2007

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  • La coutume internationale - publié le 01/12/2016 Cours de 5 pages - Droit international La coutume internationale est une source du droit ; il s'agit aussi d'un processus d'élaboration du droit, et donc pour la Cour internationale de justice (CIJ), la coutume est une source du droit énoncé dans son statut à l'article 38. Il s'agit également d'un procédé régi par le droit international public. Elle pose problème dans son...
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La place de la coutume internationale en droit public français

Intervention de Bernard Stirn, président de la section du contentieux, lors du colloque organisé au Ministère des affaires étrangères par le Comité pour le droit international du Conseil de l’Europe sur le thème : « le juge et la coutume internationale ».

< ID du contenu 3016 > Lien à reprendre : Téléchargez l'intervention au format pdf</a>

Comité pour le droit international du Conseil de l’Europe

Colloque organisé le 21 septembre 2012 au Ministère des affaires étrangères sur « le juge et la coutume internationale »

Intervention de Bernard Stirn, président de section au Conseil d’État : la place de la coutume internationale en droit public français

La définition de la coutume internationale en droit public français correspond à la définition généralement admise, à partir des deux éléments : d’une part, la pratique générale et cohérente des Etats, d’autre part, l ’opinio juris qui reconnaît cette pratique comme résultant d’une obligation juridique.

Du fait tant de la codification entreprise sous l’égide de la Cour internationale de justice que du développement des conventions internationales, la coutume occupe en droit international une place qui se réduit. Les deux domaines où elle demeure significative sont le droit de la mer et celui des immunités de juridiction et d’exécution des Etats. Aussi son invocation en droit français est-elle peu fréquente. La jurisprudence n’est constituée que de quelques décisions, souvent espacées de plusieurs années.

Dans le contexte général de liens plus étroits entre droit international et droit interne et d’autorité accrue des normes internationales, le statut de la coutume internationale en droit public français s’est toutefois précisé et renforcé. Trois constats peuvent être faits à cet égard :

1/ Le cadre constitutionnel demeure discret en ce qui concerne la coutume internationale.

2/ La coutume internationale produit néanmoins des effets dans l’ordre juridique interne.

3/ Mais sa place dans la hiérarchie des normes n’est pas aussi assurée que celle des traités.

1/ Le cadre constitutionnel

Norme suprême dans l’ordre juridique interne,  la constitution détermine la place du droit international dans le droit interne.   A la différence de celles de certains Etats, notamment l’Allemagne, la constitution française ne mentionne pas expressément la coutume internationale. Deux dispositions seulement donnent le cadre général :

-le quatorzième alinéa du Préambule de la constitution du 27 octobre 1946 aux termes duquel «  la République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international  » ;

-l’article 55 de la Constitution qui confère aux traités et accords internationaux, régulièrement ratifiés et publiés, et sous réserve de réciprocité, une « autorité supérieure à celle des lois ».

On constate que ces dispositions ne mentionnent pas la coutume. Celle-ci peut néanmoins être regardée comme incluse dans les règles du droit public international, auxquelles le Préambule se réfère. En tout cas seuls les traités et accords dûment ratifiés et publiés se voient reconnaître, dans l’ordre juridique interne, une autorité supérieure à celle des lois.

2/ Les effets de la coutume internationale en droit public interne

Peu encline, de façon générale, à consacrer la coutume, la jurisprudence du Conseil d’Etat est longtemps demeurée réservée à l’égard des normes internationales. Du fait de cette double retenue, à l’égard de la coutume et à l’égard du droit international, la coutume internationale est d’abord restée à l’écart du contentieux administratif. Juge de droit interne français, le juge administratif  ne s’en saisissait pas. C’est ce qu’affirme encore  la décision de la section du contentieux du Conseil d’Etat, du 22 novembre 1957, Myrtoon steamship et Cie, aux conclusions du président Heumann : une contestation relative à l’angarie, réquisition de navires étrangers en cas de guerre, se rattache «  tout à la fois à la conduite de la guerre et aux rapports internationaux de l’Etat français avec les autres puissances  » et échappe « à ce double titre  » à la compétence du Conseil d’Etat, statuant au contentieux.

Cette jurisprudence a considérablement évolué.

Après une première ouverture qui résulte implicitement d’une décision de section du 18 avril 1986, société les Mines de potasse d’Alsace, une décision de section du 23 octobre 1987, Société Nachfolger navigation Company  tranche un contentieux relatif à la responsabilité de l’Etat du fait la destruction d’une épave en haute mer au regard des règles du droit coutumier international.

Le tournant est définitivement acquis par la décision d’assemblée du 6 juin 1997, Aquarone. Saisi d’un litige relatif à l’imposition en France de la pension de retraite versée à l’ancien greffier de la Cour internationale de justice, de nationalité australienne mais qui était venu s’établir dans le Vaucluse, le Conseil d’Etat se prononce au regard notamment de la coutume internationale.

Cette jurisprudence est appliquée par la décision Mme Saleh, rendue en section le 14 octobre 2011, à propos  de l’immunité d’exécution des Etats : le Conseil d’Etat juge qu’ « il résulte d’une règle coutumière du droit public international que les Etats bénéficient par principe de l’immunité d’exécution pour les actes qu’ils accomplissent à l’étranger  » et que «  cette immunité fait obstacle à la saisie de leurs biens, à l’exception de ceux qui ne se rattachent pas à l’exercice d’une mission de souveraineté  ».

La coutume internationale produit donc pleinement des effets dans le droit interne. Son autorité y est toutefois différente de celle des traités.

3/ La place de la coutume internationale dans la hiérarchie des normes

En droit international, la coutume a la même autorité que les traités.

En droit interne, il en va différemment. En affirmant que les traités et accords ont une autorité supérieure à celle des lois, l’article 55 de la Constitution a certes ouvert la voie au « contrôle de conventionnalité », qui conduit tous les juges à écarter l’application d’une loi incompatible avec les stipulations d’un traité ou d’un accord, même lorsque la loi est postérieure à ce traité ou à cet accord. Le Conseil constitutionnel a souligné la différence entre ce contrôle, qui appartient au juge administratif et au juge judiciaire, du contrôle de conformité des lois à la Constitution, qu’il est le seul à exercer. En particulier, sa décision du 12 mai 2010, Jeux en ligne, distingue expressément «  le contrôle de conformité des lois à la constitution, qui incombe au Conseil constitutionnel, et le contrôle de leur compatibilité avec les engagements internationaux ou européens de la France, qui incombe aux juridictions administratives et judiciaires  ».

Mais l’article 55 de la Constitution ne concerne que les traités et accords. Il ne mentionne pas la coutume internationale. Aussi le Conseil d’Etat juge-t-il, depuis l’arrêt Aquarone, que «  ni cet article ni aucune autre disposition de valeur constitutionnelle ne prescrit ni n’implique que le juge administratif fasse prévaloir la coutume internationale sur la loi en cas de conflit entre ces deux normes  ». De même, la décision Mme Saleh, précise-t-elle, pour appliquer la règle coutumière d’immunité d’exécution des Etats, que cette règle n’est écartée, en droit interne, par aucune disposition législative.

Devant le juge administratif, la coutume internationale s’impose aux actes administratifs, réglementaires comme individuels. En revanche, elle ne prévaut pas sur la loi, qui peut en écarter l’application, sans qu’il y ait lieu de s’interroger sur la question de savoir si la loi est ou non plus récente que la coutume. Pour le juge administratif, la coutume internationale n’est pas une référence dans l’exercice du contrôle de conventionnalité de la loi.

Pourrait-elle, dans ces conditions, être invoquée devant le juge constitutionnel, dans le cadre du contrôle de constitutionnalité ? La question demeure ouverte.

Le Conseil constitutionnel s’est à plusieurs reprises référé à la règle coutumière « Pacta sunt servanda », qu’il a mentionnée dans ses deux décisions du 9 avril et du 2 septembre 1992, relatives au traité de Maastricht, ainsi que dans ses décisions du 20 juillet 1993 relative au code de la nationalité, du 22 janvier 1999 sur le statut de la Cour pénale internationale, enfin du 2 août 2012 relative au traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire. Particulièrement explicite, cette dernière décision indique qu’après l’entrée en vigueur du traité, la France devra l’appliquer de bonne foi en application de la règle « pacta sunt servanda ».

D’autres règles non écrites du droit international ont été évoquées par le Conseil constitutionnel, comme le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (décision du 30 décembre 1975 relative à la loi sur les conséquences de l’autodétermination des îles des Comores), les effets des nationalisations hors du territoire national (décision du 11 février 1982 sur la loi de nationalisation), certaines règles du droit de la mer (décision du 28 avril 1985 sur la loi relative à la création du registre international français).

Cette jurisprudence du Conseil constitutionnel confirme que  le droit international coutumier produit des effets en droit interne. Sans définir précisément sa place dans la hiérarchie des normes, au regard notamment des missions qui incombent au juge constitutionnel, elle montre que l’Etat a l’obligation de la respecter et qu’à tout le moins, la loi doit être interprétée de manière à satisfaire à cette obligation. Par une telle approche fondée sur la conciliation, la coutume internationale s’inscrit dans le cadre d’ensemble qui , de manière générale, s’applique aux liens entre droit interne et droit international.

VII – La CEDH et autres domaines du droit international public

Le droit coutumier, les normes impératives ( jus cogens ), et la Cour européenne des droits de l’homme

  • William A. Schabas

Professeur de droit international, Middlesex University London; Professeur de droit international pénal et des droits de l’homme, Universiteit Leiden.

Online publication: June 17, 2021

An article of the journal Revue québécoise de droit international / Quebec Journal of International Law / Revista quebequense de derecho internacional  

Special Issue, December 2020 , p. 681–704 70 ans de la Convention européenne des droits de l’homme  : L’Europe et les droits de la personne

© Société québécoise de droit international, 2020

La Cour européenne des droits de l’homme fait appel à diverses sources de droit international afin d’interpréter les normes relatives aux droits de la personne énoncées dans la Convention européenne des droits de l’homme . Elle l’a souvent justifiée en se référant à l’article 31 (3) c) de la Convention de Vienne sur le droit des traités , qui invite l’interprète de tenir compte de « toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations entre les parties ». Bien que la Cour ne fasse aucune distinction réelle entre les instruments de droit conventionnel qui peuvent être applicables et d’autres sources, telles que les résolutions, directives et principes adoptés au niveau international, elle ne considère presque jamais le droit international coutumier en tant que source de droits fondamentaux. Exceptionnellement, elle se réfère à la coutume internationale en ce qui concerne le principe de légalité, conformément au texte de l’article 7. La Cour a fréquemment examiné le droit international coutumier, mais sur des questions autres que les droits fondamentaux, comme les immunités des États. La Cour a également déclaré que certaines normes relèvent du jus cogens . L’article examine l’utilisation du droit international coutumier et du jus cogens par la Cour européenne des droits de l’homme et propose qu’à l’avenir, elle fasse une utilisation plus importante de ces sources.

The European Court of Human Rights consults a range of international law sources for purposes of interpreting the human rights norms set out in the European Convention on Human Rights . It has often justified this with reference to article 31(3)c) of the Vienna Convention on the Law of Treaties , which invites consideration of "any relevant rules of international law applicable in the relations between the parties". Although the Court does not make any real distinction between treaty law instruments that may be applicable and other sources, such as resolutions, guidelines and principles adopted at the international level, it almost never considers customary international law as a source of fundamental rights. Exceptionally, it refers to customary international with respect to the principle of legality, in accordance with the text of article 7. The Court has frequently considered customary international law, but on issues other than fundamental rights, such as State immunities. The Court has also declared that certain norms are jus cogens . The article reviews the use of customary international law and jus cogens by the Court, and proposes that in the future it should make greater use of these sources.

La Corte Europea de Derechos Humanos tiene varias fuentes de derecho internacional para interpretar las normas de derechos humanos enunciados en la Convención europea de derechos humanos . La Corte lo justifico de manera seguida haciéndole referencia al articulo 31 (3) c) de la Convención de Viena sobre el derecho de los tratados , la cual invita el interprete a tener en cuenta de “todo reglamento de derecho internacional importante que puede ser aplicado en las relaciones entre las partes”. Aunque la Corte no hace verdadera distinción entre los instrumentos de derecho convencionales que pueden ser aplicables y otras fuentes, como las resoluciones, las directivas y los principios adoptados al nivel internacional, no considera casi nunca el derecho internacional consuetudinario. Excepcionalmente, se refiere al derecho internacional consuetudinario en lo que concierne el principio de legalidad, en conformidad con el texto del articulo 7. La Corte examino de seguido el derecho internacional consuetudinario, pero en el contexto de otras cuestiones ajenas a los derechos fundamentales, como las inmunidades de los Estados. La Corte también declaro que algunas normas son del ius cogens . El articulo examina la utilización del derecho internacional consuetudinario et del ius cogens por la Corte europea de derecho humanos y propone que, en un futuro, ella haga una utilización más importante de esas fuentes.

Article body

La Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales [1] n’a pas de clause de droit applicable, à la différence des statuts d’autres tribunaux internationaux comme, par exemple, la Cour internationale de justice [2] et la Cour pénale internationale [3] . Toutefois, la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après, la Cour européenne) ne vit pas en vase clos juridique où la seule source de droit applicable est la Convention européenne elle-même. Les arrêts de la Grande chambre contiennent presque systématiquement une section intitulée « Les textes internationaux », « Le droit et la pratique internationaux pertinents », « Autres textes internationaux » ou simplement « Le droit international ». Dans ce contexte, elle peut faire référence aux traités multinationaux et à d’autres instruments de l’Organisation des Nations unies, de l’Organisation internationale du travail ainsi qu'à des systèmes régionaux africains et américains, aux résolutions telle la Déclaration universelle des droits de l’homme [4] , aux conventions de droit international humanitaire, et aux observations et constatations des organes de traités tels que le Comité des droits de l’homme.

Pourtant, les arrêts de la Cour européenne ne contiennent jamais de rubrique intitulée « droit international coutumier » ou «  jus cogens  ». Dans un arrêt récent concernant l’interdiction de l’esclavage et l’interprétation de l’article 4 de la Convention européenne [5] , la Grande chambre a fait état d’un nombre important d’instruments internationaux sur le sujet sans pour autant mentionner l’important rôle du droit coutumier [6] ou le fait que la Commission du droit international a mis l’interdiction de l’esclavage sur sa liste non exhaustive de normes de jus cogens [7] . Les références au droit international coutumier et au jus cogens dans la jurisprudence de la Cour sont excessivement rares. Le dernier renvoi par la Grande chambre au droit international coutumier remonte à 2018. Le requérant avait plaidé que le droit d’accès à la justice prévu à l’article 6 de la Convention européenne  imposé sur l’État une obligation d’exercer une compétence universelle en matière civile pour actes de torture. Selon la Grande chambre,

[s]’agissant d’une éventuelle coutume internationale, il découle de l’étude de droit comparé entreprise par la Cour que, parmi les 39 États européens examinés, seuls les Pays-Bas reconnaissent la compétence universelle en matière civile pour des actes de torture […]. On ne saurait dès lors parler d’une compétence universelle au sens absolu s’agissant de cette affaire-là [8] .

La Cour européenne a très souvent invoqué la Convention de Vienne sur le droit des traités [9] , dont l’entrée en vigueur date de 1980, trente ans après l’adoption de la Convention européenne . Dans son arrêt Golder [10] , de 1975, prononcé quelques années avant l’entrée en vigueur de la Convention de Vienne , la Cour s’est inspirée des articles 31 à 33. Selon l’arrêt,

[c]ette convention n’est pas encore en vigueur et elle précise, en son article 4, qu’elle ne rétroagira pas, mais ses articles 31 à 33 énoncent pour l’essentiel des règles de droit international communément admises et auxquelles la Cour a déjà recouru [11] .

Dans la version anglaise de l’arrêt, la Cour a parlé de «  generally accepted principles of international law to which the Court has already referred on occasion  ». Dans une décision beaucoup plus récente, la Cour a affirmé qu’elle tient compte « des dispositions de la Convention de Vienne , pour autant qu’elles codifient le droit international préexistant, et en particulier de son article 31 § 3 c) » [12] .

L’article 31 de la Convention de Vienne décrit la « règle générale » de l’interprétation : « Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but » [13] . Selon l’article 31(3)(c), dans la recherche du « sens ordinaire » du texte, « [i]l sera tenu compte, en même temps que du contexte : […] c) De toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations entre les parties » [14] . Selon la Cour,

lorsqu’elle examine le but et l’objet des dispositions de la Convention , elle prend également en considération les éléments de droit international dont relève la question juridique en cause. Ensembles constitués des règles et principes acceptés par une grande majorité des États, les dénominateurs communs des normes de droit international ou des droits nationaux des États européens reflètent une réalité, que la Cour ne saurait ignorer lorsqu’elle est appelée à clarifier la portée d’une disposition de la Convention que le recours aux moyens d’interprétation classiques n’a pas permis de dégager avec un degré suffisant de certitude [15] .

Ces « règles pertinentes », selon la Cour, « sont le reflet de principes de droit international communément admis ayant déjà acquis valeur de droit coutumier » [16]  .

I. L’émergence du droit coutumier des droits de la personne

Avec les conventions et les principes généraux, la coutume est l'une des sources principales de droit international. Elle est décrite à l’article 38(1)(b) du Statut de la Cour internationale de justice  : « la coutume comme preuve d’une pratique générale acceptée comme étant le droit » [17] . Dans son étude récente au sujet de la détermination du droit international coutumier, la Commission du droit international a insisté sur l’importance des deux éléments de la coutume, la pratique étatique et l’ opinio juris [18] .

D'une manière générale, dans de nombreux domaines du droit international, il est clair que le droit coutumier s’est développé bien avant le droit conventionnel. Dans un article publié dans un des premiers numéros de la American Journal of International Law , le professeur Lassa Oppenheim de l’Université de Cambridge a expliqué qu’avec le développement du droit international, le droit coutumier serait «  pushed into the background » [19] . L’avenir appartient aux traités, il croyait [20] . L'un de ces domaines où la coutume a précédé la codification est le droit international humanitaire, qui est étroitement lié au droit international des droits de la personne. Cependant, ce modèle de l’évolution du droit international ne se manifeste pas dans le droit international des droits de la personne. Certes, il existe de nombreuses preuves d’une importance croissante des droits fondamentaux en droit interne, datant des révolutions américaine et française. Étant donné que les droits fondamentaux impliquaient des questions qui étaient considérées comme étant de nature essentiellement interne, le saut au niveau international ne s'est réellement produit qu'au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. En droits de la personne, à la différence du droit humanitaire, la codification précède la coutume.

Aujourd’hui, il n'est pas rare que ceux qui négocient un traité ou une déclaration se réfèrent au droit international coutumier. Mais en 1947 et 1948, lors des travaux préparatoires de la Déclaration universelle et les premiers projets du Pacte international relatif aux droits civils et politiques [21] et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels [22] , il n’y avait que quelques références isolées à la coutume internationale. C’est le délégué belge à la troisième commission de l’Assemblée générale, Fernand Dehousse, qui a fait une déclaration formelle sur la portée juridique de la Déclaration universelle . Selon Dehousse, un certain nombre des principes qui seraient inscrits dans la Déclaration universelle

ne feront que répéter des règles figurant déjà dans le droit coutumier des nations et reconnues, par conséquent, par le droit international non écrit ; le fait de les transcrire dans une déclaration internationale ne peut priver ces règles de la valeur obligatoire qu’elles possèdent déjà [23] .

En revanche, disait Dehousse, « d’autres principes qui seront inscrits dans la Déclaration universelle ne relèvent pas du droit des gens coutumier, et le fait de les inclure ne leur donnera certes pas une valeur obligatoire » [24] . Il n’a pas fourni d’exemples. Quelques jours plus tard, lorsque Dehousse a encore signalé l’importance du droit coutumier [25] , René Cassin a confirmé « que sa délégation entend par “droit international” le droit positif, aussi bien coutumier qu'écrit » [26] . Écrivant peu de temps après l'adoption de la Déclaration universelle , Hersch Lauterpacht rejetait explicitement les commentaires de Dehousse sur sa signification juridique, insistant sur le fait qu'avant l'adoption de la Charte des Nations unies [27] , «  apart from the precarious doctrine of humanitarian intervention, international law considered these matters to be within the exclusive domestic jurisdiction of the state  » [28] . Pour Lauterpacht, le droit international coutumier en matière de droits de la personne était inexistant.

Il y a eu peu de discussions au sujet de droit international coutumier des droits de la personne dans les années qui ont suivi l'adoption de la Déclaration universelle . En 1965, Humphrey Waldock, qui serait bientôt élu juge britannique à la Cour européenne des droits de l'homme, a écrit que la Déclaration universelle était revêtue du «  character of customary international law  » [29]  . L’année suivante, le rôle de la coutume en droits de la personne a été souligné par le juge Kōtarō Tanaka de la Cour internationale de justice dans les affaires du Sud-ouest africain [30] . Seán MacBride, un des rédacteurs de la Convention européenne lorsqu’il était ministre irlandais des affaires étrangères [31] , et plus tard l’avocat du requérant notoire Gerard Richard Lawless devant la Commission européenne des droits de l’homme, a écrit dans le Courrier de l'UNESCO en 1968, à l'occasion du vingtième anniversaire de l'adoption de la Déclaration universelle , que

there is a growing view among international lawyers that some of its provisions, which are justiciable, now form part of customary international law […]. The Universal Declaration does now represent in written form the basis for the law of nations, the laws of humanity and the dictates of the public conscience as accepted in the twentieth century [32] .

Dans les années 1980, le droit international coutumier des droits de l'homme a suscité un grand intérêt parmi des universitaires américains [33] . Cela s’explique par une certaine frustration avec la lenteur de la ratification des traités par le gouvernement américain. Il a également été motivé par une ouverture des tribunaux américains envers la coutume résultant de la redécouverte de la Alien Tort Claims Act [34] . En 1987, le American Law Institute a publié une liste relativement courte de normes coutumières : les prohibitions de génocide, de l’esclavage, du meurtre et de la disparition, de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants, de la détention arbitraire prolongée, de la discrimination raciale systématique, et d’un pattern de violations graves de droits humains internationalement reconnus [35] . Cette liste, et plus généralement l’engouement des universitaires américains, a suscité des critiques, entre autres parce qu’elle correspondait essentiellement au contenu du Bill of Rights [36] tel qu’amendé) et qu’elle ignorait complètement les droits économiques, sociaux et culturels [37] .

Mais la vision américaine a eu un appui inattendu du Comité des droits de l’homme qui a proposé, dans une Observation générale adoptée en 1994, qu’une réserve à l’encontre d’une norme coutumière est contraire à l’objet et au but du Pacte international relatif aux droits civils et politiques [38]  :

Ainsi, un État ne peut se réserver le droit de pratiquer l’esclavage ou la torture, de soumettre des personnes à des traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants, de les priver arbitrairement de la vie, de les arrêter et de les détenir arbitrairement, de dénier le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, de présumer une personne coupable tant que son innocence n’a pas été établie, d’exécuter des femmes enceintes ou des enfants, d’autoriser l’incitation à la haine nationale, raciale ou religieuse, de dénier à des personnes nubiles le droit de se marier, ou de dénier aux minorités le droit d’avoir leur propre vie culturelle, de professer leur propre religion ou d’employer leur propre langue [39] .

Les travaux préparatoires de ce paragraphe sont complètement opaques [40] . Le Comité n’est jamais revenu sur la question du droit coutumier.

II. Le droit coutumier et la Cour européenne des droits de l’homme

Il ne semble pas être fait mention du droit international coutumier dans les travaux préparatoires de la Convention européenne . Dans la jurisprudence de la Commission européenne des droits de l’homme, on trouve de rares mentions du droit coutumier au sujet du droit des traités [41] , de la compétence de la Commission [42] et sur les immunités [43] . Dans la jurisprudence de la Cour, à part quelques mentions insignifiantes dans les plaidoiries et des opinions dissidentes [44] , c’est le juge Loucaides qui fait la première véritable référence au droit coutumier dans deux affaires concernant des atrocités commises en Allemagne de l’Est. Les requérants avaient invoqué le principe de légalité prévu à l’article 7 de la Convention européenne [45] . L’arrêt de la Cour a jugé que le droit interne en vigueur était prévisible et accessible et donc conforme à l’article 7. Dans ses opinions concordantes, le juge Loucaides souhaitait qu’on aborde le problème sous l’angle des crimes contre l’humanité en vertu du droit international coutumier [46] . Il s’est appuyé sur un jugement récent de la Chambre d’appel du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie [47] .

Il y a très peu d’exemples de jugements de la Cour européenne où on se prononce sur la qualification coutumière d’une norme de droit international des droits de la personne. Le cas par excellence est celui de l’interdiction de la torture [48] . La Cour a aussi rejeté la prétention qu’il y a une règle de droit coutumier imposant la négation de génocide, pour laquelle la pratique des États « est loin d’être généralisée et cohérente » [49] . Autrement, pour la considération de la coutume à l’égard des droits fondamentaux, il faut consulter des opinions individuelles et plus particulièrement celles du juge Paolo Pinto de Albuquerque, juge portugais de 2011 à 2020. Parfois avec le concours d’un ou deux collègues, le juge Pinto de Albuquerque a constaté le caractère coutumier de plusieurs droits fondamentaux reconnus déjà dans la Convention européenne et ses Protocoles [50] , tels que le droit à la vie et le droit à l’intégrité physique [51] , ainsi que l’obligation de réprimer le discours haineux [52] et la criminalisation de la négation du génocide [53] . Il a considéré comme coutumier le droit d’accès au tribunal [54] , l’inamovibilité des juges [55] , le droit au procès équitable [56] , le principe de la légalité [57] et la règle ne bis in idem [58] . Selon le juge Pinto de Albuquerque, l’ Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela) [59] «  reflect customary international law in many respects » [60] . L’obligation procédurale, c’est-à-dire de faire enquête et de poursuivre, est de nature coutumière en ce qui concerne l’esclavage et les travaux forcés [61] , et la violence domestique [62] . Le juge Pinto de Albuquerque a aussi reconnu le caractère coutumier de certains droits qui ne sont pas prévus par la Convention européenne , dont le droit à l’autodétermination [63] , le droit aux soins de santé [64] , la protection contre l’apatridie [65] , le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant [66] l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité [67] , la répression pénale de la pornographie enfantine [68] et la responsabilité de protéger [69] .

À quelques occasions, d’autres juges de la Cour se sont prononcés sur le droit international coutumier des droits fondamentaux. Avec une référence à l’article 6 de la Déclaration universelle des droits de l’homme ainsi qu'à l’article 16 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques , le juge Vučinić a conclu que « le droit à la personnalité juridique est bien ancré dans le droit international des droits de l’homme tant universel que coutumier » [70] . Pour le juge Serghides, il y a une un droit coutumier de permettre des étrangers menacés de l’expulsion d’exprimer leurs vues sur la régularité de leur séjour [71] . Plusieurs juges ont reconnu la nature coutumière de l’interdiction du refoulement de réfugiés [72] .

Lors d’un colloque tenu en 2012 intitulé « Le juge et la coutume internationale », la juge Inete Ziemele, alors présidente de section de la Cour européenne des droits de l’homme, a cité l’importance des articles 31 à 33 de la Convention de Vienne . Elle a fait référence aux extraits d’un arrêt de la Grande chambre qui, d’ailleurs, ne fait pas mention du droit coutumier [73] . La Grande chambre avait expliqué qu’elle

n’a jamais considéré les dispositions de la Convention comme l’unique cadre de référence dans l’interprétation des droits et libertés qu’elle contient. Au contraire, elle doit également prendre en considération toute règle et tout principe de droit international applicables aux relations entre les Parties contractantes [74] .

Pour la Grande chambre,

[e]nsembles constitués des règles et principes acceptés par une grande majorité des États, les dénominateurs communs des normes de droit international ou des droits nationaux des États européens reflètent une réalité, que la Cour ne saurait ignorer lorsqu’elle est appelée à clarifier la portée d’une disposition de la Convention que le recours aux moyens d’interprétation classiques n’a pas permis de dégager avec un degré suffisant de certitude[…]. La Cour rappelle à cet égard que dans la recherche de dénominateurs communs parmi les normes de droit international, elle n’a jamais distingué entre les sources de droit selon qu’elles avaient ou non été signées et ratifiées par le gouvernement défendeur [75] .

La juge Ziemele a continué avec la citation de l’arrêt de la Grande chambre [76]  :

quand elle définit le sens des termes et des notions figurant dans le texte de la Convention , peut et doit tenir compte des éléments de droit international autres que la Convention , des interprétations faites de ces éléments par les organes compétents et de la pratique des États européens reflétant leurs valeurs communes. Le consensus émergeant des instruments internationaux spécialisés et de la pratique des États contractants peut constituer un élément pertinent lorsque la Cour interprète les dispositions de la Convention dans des cas spécifiques [77] .

Enfin, il n’est pas nécessaire

que l’État défendeur ait ratifié l’ensemble des instruments applicables dans le domaine précis dont relève l’affaire concernée. Il suffit à la Cour que les instruments internationaux pertinents dénotent une évolution continue des normes et des principes appliqués dans le droit international ou dans le droit interne de la majorité des État membres du Conseil de l’Europe et attestent, sur un aspect précis, une communauté de vues dans les sociétés modernes [78] .

La juge Ziemele a reconnu que les formulations de la Grande chambre « may be confusing to an international lawyer » [79] . Selon elle, la Cour voulait dire que même si un État n'avait pas ratifié un traité particulier, cela ne signifie pas que le droit international ne prévoit pas d'obligation pertinente [80] . Elle a poursuivi en indiquant que «  Normally, this would lead us to think about an obligation deriving from a customary norm » [81] . Comme nous l'avons déjà signalé, sauf dans les opinions séparées ou dissidentes de quelques juges, à quelques exceptions près, la Cour n'invoque pas le droit international coutumier aux fins d'interpréter les dispositions de la Convention européenne . Néanmoins, il existe des circonstances dans lesquelles la Cour est obligée de déterminer s'il existe une règle applicable de droit international coutumier dans un domaine autre que les droits de la personne.

Ainsi, la Cour a fait appel à la coutume dans le cadre de l’article 6 et des allégations que l’accès à la justice est limité par la doctrine de l’immunité de l’État. Pour la juge Ziemele, la Cour n’a pas au sens strict « a jurisdiction to establish the existence of a rule of customary law in the field of State immunity as such  » [82] . En revanche, elle a expliqué que la Cour ne peut pas refuser d'examiner la question de l'accès à un tribunal au titre de l'article 6 [83] simplement parce qu'elle n'a peut-être pas la compétence directe pour établir la portée des règles de l'immunité des États [84] . Des jugements de la Cour ont déclaré que l’immunité de juridiction des États est régie par le droit international coutumier [85] . La Cour a reconnu l’immunité de l’État même lorsque le recours a trait aux allégations de torture [86] et de crimes contre l’humanité [87] . À plusieurs reprises, elle a invoqué l’article 11 de la Convention des Nations unies sur l’immunité juridictionnelle des États et de leurs biens [88] à titre de codification de la coutume même si cette convention n’est toujours pas en vigueur [89] . Afin d’offrir quelque soulagement aux victimes, parfois la Cour ajoute qu’on ne peut pas exclure « un développement du droit international coutumier dans le futur » [90] . La portée de l’immunité coutumière n’est pas sans contestation [91] .

La Cour internationale de justice a endossé l’approche de la Cour européenne aux immunités de l’État dans l'arrêt Al Adsani [92] . Sur quelle base la Cour internationale a-t-elle invoqué l’arrêt Al Adsani ? Cette question a été examinée dans une étude du Secrétariat pour la Commission de droit international. On s’est demandé si la Cour internationale de Justice a considéré l’arrêt de la Grande chambre ainsi que des décisions de tribunaux constitutionnels nationaux comme un moyen auxiliaire ou comme relevant de la pratique des États [93] . En d'autres termes, la Cour internationale a peut-être fait référence à la jurisprudence de la Cour européenne comme preuve du droit coutumier et plus particulièrement de l’ opinio juris . Les conclusions de la Commission du droit international sur la preuve de la coutume reconnaissent « les décisions des juridictions nationales » comme « formes de preuve de l’acceptation comme étant le droit ( opinio juris ) » [94] .

Dans sa communication précitée, la juge Ziemele a déclaré que la Cour n’a pas compétence pour établir l’existence d’une règle de droit coutumier. Ce constat semble discutable. Elle ne précise pas quels tribunaux sont compétents pour statuer sur les immunités. Il appert assez évidemment que les tribunaux internationaux de compétence générale, comme la Cour internationale de justice, ont une telle autorité. Bien entendu, il en va de même pour les tribunaux nationaux, qui se prononcent régulièrement sur les immunités et dont les juges ainsi contribuent à la pratique des États qui forme la base du droit international coutumier. Pourquoi, alors, la Cour européenne des droits de l'homme est-elle exclue? En statuant sur la question de savoir si l’article 6 de la Convention européenne est neutralisé par une norme internationale d’immunité, la Cour européenne des droits de l’homme doit déterminer s’il existe une telle immunité, comme tout autre tribunal, national ou international.

La juge Ziemele a attaché une importance à l'identification d'un « consensus européen » [95] . Parfois, avec une terminologie qui n’est pas toujours très cohérente, la Cour parle d’un « consensus international » [96] , d’un « large consensus qui existe dans la communauté internationale » [97] , d’un « large consensus – y compris en droit international » [98] , d'un « large consensus, notamment en droit international » [99] d’un « large consensus à l’échelle internationale et européenne » [100] , d'un « consensus à l'échelle internationale » [101] d’un « consensus parmi les États contractants » [102] , ou tout simplement d’un « consensus européen » [103] . Cet exercice présente des similitudes avec la méthodologie de la Cour internationale de justice afin d’identifier des normes coutumières, dans la mesure où elle présente les vues des tribunaux nationaux. Cependant, la Cour européenne considère la pratique des États aux fins d'interpréter la Convention européenne , notamment dans l’application de la doctrine de la marge d’appréciation [104] , et non pour identifier des règles de droit coutumier. Dans l’affaire Perinçek , la Grande chambre a donné comme exemple de l’absence d’une règle de droit coutumier son opinion dans l’affaire X. c. Autriche [105] , qui avait trait à l’adoption d’enfants par des couples du même sexe [106] . Mais ce dernier arrêt ne mentionne pas le droit international coutumier. La Cour parle, plutôt, de la recherche d’« une communauté de vues actuelle entre les États européens » [107] .

La situation est différente lorsqu'il s'agit de règles juridiques autres que les droits fondamentaux énoncés dans la Convention européenne . Dans l’affaire Jones et al. c. Royaume-Uni [108] , le gouvernement britannique avait « sollicité des observations sur l’étendue de l’immunité d’État accordée par le droit national des États membres du Conseil de l’Europe » [109] . La Grande chambre n'a accordé aucune importance à l'étude, parce que « peu d’États ont été confrontés en pratique au problème particulier de savoir s’il existe, en droit national ou en droit international coutumier, une immunité en matière civile pour les actes de torture » [110] . Dans une autre affaire, la Grande chambre est arrivée à la même conclusion, vu que

[l]es autorités dudit État n’en étaient pas non plus obligées en vertu du droit coutumier, étant donné que la pratique des États, comme expression d’une  opinio juris  (article 38 § 1 b) du Statut de la C.I.J.) en faveur de l’existence d’une compétence universelle civile, faisait clairement défaut [111] .

De la même manière, la Cour a appliqué le droit coutumier en matière de succession d'États. Ainsi, elle a jugé que la Convention de Vienne de 1983 sur la succession d’États en matière de biens, archives et dettes d’États [112] pouvait être une source de droit malgré le fait qu’elle n’était pas encore en vigueur. Selon la Cour,

il est bien établi en droit international que, même non ratifiée, une disposition d’un traité peut avoir force contraignante si elle reflète le droit international, soit qu’elle « codifie » ce dernier, soit qu’elle donne naissance à de nouvelles règles coutumières [113] .

La Grande chambre a constaté que

[l]a question de la succession des États continuateurs à la dette publique de l'État prédécesseur comporterait bien des incertitudes, mais il n'existerait manifestement aucune preuve de l'existence d'une norme de droit international coutumier qui mettrait à la charge conjointe et solidaire des États successeurs les obligations financières de l'État prédécesseur [114] .

Dans la même affaire, la Chambre avait conclu que la Slovénie « aurait exécuté toutes les obligations pouvant lui incomber au titre du droit international coutumier concernant la succession d’États » [115] .

La Cour a également fait référence au droit coutumier au sujet de l'exercice extraterritorial de la compétence de l’État dans les affaires concernant des actes accomplis à l’étranger par des agents diplomatiques ou consulaires, ou à bord d’aéronefs immatriculés dans l’État ou de navires battant son pavillon [116] . Dans l’affaire Medvedev c. France , la Cour a constaté l’absence de preuve d’

une pratique constante des États de nature à établir l’existence d’une norme de droit international coutumier qui conférerait une autorisation générale d’intervention à tout État ayant de sérieuses raisons de penser qu’un navire battant pavillon d’un autre État se livre au trafic de stupéfiants [117] .

Dans l’affaire Al Skeini c Royaume-Uni [118] , sous la rubrique « Éléments pertinents de droit international » la Cour a discuté de droit coutumier applicable aux territoires occupés [119] , mais sans en tenir compte dans son appréciation. Dans l’affaire Behrami et Behrami c. France et Saramati c. France, Allemagne et Norvège [120] la Grande chambre a déclaré que « l'interdiction du recours unilatéral à la force […] est aujourd'hui partie intégrante du droit coutumier international » [121] .

À plusieurs reprises, la Cour a tenu compte du droit coutumier dans le domaine de droit international humanitaire. Par exemple, dans une décision sur la recevabilité, une chambre de la Cour a déclaré que la règle prohibant l’emploi du gaz moutarde comme arme de guerre dans un conflit international, énoncée pour la première fois dans un traité remontant à 1925, avait acquis valeur de droit coutumier. La décision fait référence au Protocole de 1925 concernant le gaz asphyxiant [122] et à la Convention de 1972 sur des armes bactériologiques [123]  :

The Court thus finds that at the time when the applicant supplied thiodiglycol to the Government of Iraq a norm of customary international law existed prohibiting the use of mustard gas as a weapon of war in an international conflict [124] .

Un exposé beaucoup plus détaillé et convaincant paraît dans l’étude du droit coutumier publiée par le Comité international de la Croix-Rouge [125] , et que la Cour a souvent cité dans d’autres décisions et jugements [126] . Pourquoi a-t-elle cité les traités plutôt que d'insister sur le fait que la norme est coutumière?

La Cour a fait référence au droit international humanitaire coutumier au sujet de l’amnistie. Dans l’affaire Marguš , une Chambre de la Cour a conclu qu’il est « de plus en plus admis que l’octroi d’une amnistie relativement à des “crimes internationaux”– qui comprennent les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et les génocides – est interdit par le droit international » [127] . Selon la Chambre,

[c]ette conception ressort des règles coutumières du droit international humanitaire, des traités en matière de droits de l’homme ainsi que des décisions de tribunaux internationaux et régionaux et de la pratique émergente des États, sachant que l’on observe une tendance croissante des juridictions internationales, régionales et nationales à annuler les amnisties générales édictées par les gouvernements [128] .

Toutefois, l’emploie des mots « émergence » et « croissante » suggère la lex ferenda plutôt qu’une règle ferme. L’arrêt de la Grande chambre dans la même affaire fait preuve également d’une certaine équivoque [129] .

L’affaire Janowiec et al. c. Russie [130] avait trait au massacre des prisonniers polonais à Katyń et ailleurs en Belarus et en Ukraine en 1940 par la police secrète soviétique. Une Chambre de la Cour européenne avait remarqué que même si l’Union soviétique n’était pas partie aux conventions humanitaires applicables, « l’obligation de traiter les prisonniers avec humanité et de s’abstenir de les tuer était manifestement une règle de droit international qu’elle se devait de respecter » [131] . Une opinion dissidente a noté que les efforts des procureurs soviétiques d’imputer la responsabilité pour ce crime aux dirigeants nazis devant le Tribunal militaire international « confirme la reconnaissance par l’URSS du caractère juridiquement obligatoire de cette obligation » [132] .

L’article 7 de la Convention européenne fournit une invitation relativement directe à examiner le contenu du droit coutumier lorsqu’il déclare que « [n]ul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d’après le droit national ou international » [133] . Or, la question qui hantait le Tribunal militaire international à savoir l’existence de crimes internationaux non codifiés, et qui explique la présence du paragraphe 2 de l’article 7 de la Convention européenne , s’est aussi posée devant la Cour européenne. Dans l’affaire Kononov c. Lettonie la Chambre a fait référence aux règles coutumières des lois de la guerre reconnues par le Tribunal militaire international de Nuremberg ainsi que par le Tribunal militaire international pour l’Extrême-Orient [134] . Selon la Grande chambre,

[à] l’époque considérée, les lois de la guerre se dégageaient non seulement de traités, mais aussi « d’us et de coutumes progressivement et universellement reconnus, de la doctrine des juristes, de la jurisprudence des tribunaux militaires » [135] .

La Grande chambre a confirmé qu’en vertu du droit en vigueur en 1944, lorsque l’attaque brutale a eu lieu, « les civils ne pouvaient être attaqués que lorsqu’ils participaient directement aux hostilités et pendant la durée de cette participation » [136] . Même si les victimes avaient elle-même commis des crimes de guerre, la Grande chambre a dit que le droit coutumier en vigueur en 1944 « n’autorisait le requérant et son unité qu’à arrêter les villageois et, après seulement le prononcé d’une condamnation à l’issue d’un procès équitable, à exécuter le châtiment infligé » [137] . Trois membres dissidents de la Grande chambre ont écrit que les exemples de poursuites pour crimes de guerre antérieurs à la Seconde Guerre mondiale donnés par la majorité étaient « isolés et embryonnaires », et « loin de révéler l’existence d’un droit coutumier suffisamment établi » [138] .

La définition du crime de génocide qui fait autorité se trouve à l’article 2 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide [139] . Dans l’affaire Vasiliauskas c. Lituanie [140] , il était question d’une poursuite pour actes commis en 1953, mais selon une définition du crime de génocide plus étendue que celle de la Convention sur le génocide , comprenant la destruction de groupes politiques [141] . Sans hésitation, la Grande chambre a confirmé que le génocide était déjà un crime d’après le droit international coutumier [142] . Toutefois, elle ne croyait pas pouvoir conclure, « avec un degré suffisant de certitude, que le droit international coutumier donnait de ce crime une définition plus large que celle figurant dans l’article II de la Convention sur le génocide  » [143] . Des difficultés comparables surgissent avec les crimes contre l’humanité. Une approche audacieuse est proposée dans une opinion dissidente, où on prétend que cette catégorie de crimes internationaux était déjà reconnue lors de la Première Guerre mondiale. Selon cette opinion, le Traité de Sèvres [144] d’août 1920 était déclaratoire du droit coutumier. L’article 230 prévoyait la responsabilité individuelle des dirigeants ottomans pour « massacres » [145] . Dans une décision d’irrecevabilité qui ne mentionne pas le droit coutumier en tant que tel, une chambre de la Cour a noté que la déportation de populations civiles avait « été expressément reconnue comme crime contre l’humanité en 1945 dans le Statut du Tribunal de Nuremberg » [146] .

Si ce tribunal fut constitué pour juger les principaux criminels de guerre des pays européens de l’Axe pour les infractions qu’ils avaient commises avant ou pendant la Seconde Guerre mondiale, la Cour relève que la validité universelle des principes relatifs aux crimes contre l’humanité a été confirmée par la suite, notamment par la résolution 95 de l’Assemblée générale des Nations unies (11 décembre 1946) puis par la Commission du droit international [147] .

III. Jus cogens et la Cour européenne des droits de l’homme

Dans un arrêt de l’an 2020, la Cour suprême du Canada a expliqué que « [l]e droit international coutumier comprend un sous-ensemble de normes dites de  jus cogens , ou normes impératives » [148] . Mais c’est plus juste, selon la Commission du droit international, de dire qu’il existe « diverses manières dont les différentes sources de droit international peuvent contribuer à la formation d’une norme impérative du droit international général » [149] . Le projet de conclusion 5 sur les normes impératives du droit international général ( jus cogens ) adopté par la Commission en 2019 déclare que « [l]e droit international coutumier est le fondement le plus commun des normes impératives du droit international général ( jus cogens ) » [150] , mais que « [l]es dispositions conventionnelles et les principes généraux du droit peuvent également servir de fondement des normes impératives du droit international général ( jus cogens ) » [151] . La Commission a proposé une liste très courte mais non exhaustive de normes impératives qui contient certains droits fondamentaux : l’interdiction du génocide et des crimes contre l’humanité, l’interdiction de la discrimination raciale et de l’apartheid, l’interdiction de l’esclavage, l’interdiction de la torture [152] .

Les normes de jus cogens « reflètent et protègent les valeurs fondamentales de la communauté internationale » [153] . La Commission du droit international a trouvé l’origine de la notion de « valeurs fondamentales de la communauté internationale » dans l’avis consultatif de la Cour internationale de justice sur des Réserves à la Convention sur le génocide , avec ses références à « la loi morale » [154] et à « la conscience humaine » [155] . La Cour a pris ces formulations du préambule de la résolution de l’Assemblée générale de 1946 déclarant que la répression du crime de génocide était « une affaire d’intérêt international » [156] .

Quant au jus cogens , la notion elle-même n’existait guère en 1950, lors de l’adoption de la Convention européenne . Le sujet a rarement été invoqué dans la jurisprudence de la Commission européenne des droits de l’homme [157] . Dans un rapport de la Commission concernant la situation à Chypre, Christos Rozakis a contesté les conclusions de la majorité parce que, selon lui, elles ignoraient la volonté de la communauté internationale de considérer que dans la partie nord de l'île, une illégalité persistait en raison de l’occupation de ce territoire par les forces militaires turques [158] . Pour Christos Rozakis, il s’agissait d’une violation continue de normes de jus cogens . Il a dit que l’approche « réaliste et pragmatique » de la Commission minait la cohésion de la politique de la communauté internationale [159] .

La première référence au jus cogens dans la jurisprudence de la Cour est dans une opinion individuelle du juge Verdross dans l’affaire Ringeisen c. Autriche [160] . Le juge Verdross a déclaré que « les règles du droit international général concernant l’épuisement des voies de recours internes ne font pas partie du jus cogens  » [161] . Dans l’affaire Belilos c. Suisse [162] , où la question en litige était la légalité d’une réserve à l’article 6 de la Convention européenne , le juge Meyer a écrit qu’

[o]n conçoit mal que des réserves puissent être admises en ce qui concerne des dispositions reconnaissant des droits de ce genre. On peut même penser que de telles réserves, ainsi que les dispositions qui les autorisent, sont incompatibles avec le ius cogens  et, dès lors, nulles, à moins qu’elles ne se rapportent qu’à des modalités de mise en oeuvre, sans toucher à la substance même des droits dont il s’agit [163] .

C’est l’arrêt Al-Adsani c. Royaume-Uni qui fait autorité au sujet de jus cogens . En novembre 2001, la Grande chambre de la Cour a déclaré que la prohibition de la torture doit être qualifiée de norme de jus cogens [164] . Dans la partie de l’arrêt sur les textes juridiques pertinents, la Cour a fait référence au rapport de 1999 d’un groupe de travail de la Commission du droit international qui faisait état d’arrêts des tribunaux américains et britanniques accueillant la thèse de jus cogens en matière de torture [165] . La Grande chambre a également invoqué des jugements du Tribunal international pénal pour l’ex-Yougoslavie au même effet [166] . Avec une référence à article 31(3)(c) de la Convention de Vienne , la Cour a cité des autorités afin de démontrer « l’importance primordiale que revêt l’interdiction de la torture » [167] . En conclusion, « la Cour admet, sur la foi de ces précédents jurisprudentiels, que l'interdiction de la torture est devenue une règle impérative du droit international » [168] . Même en 2001, il n'y avait rien de particulièrement innovant ou révolutionnaire de la reconnaissance par la Cour européenne que l’interdiction de la torture était une norme de jus cogens . Une chambre de première instance du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie l’avait dit en décembre 1998 [169] . Cette même année, le juge Cançado Trindade, alors membre de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, avait émis une opinion au même effet [170] .

Depuis lors, d’autres tribunaux internationaux, y compris la Cour internationale de justice, sont arrivés à la même conclusion [171] . L’interdiction de la torture se trouve sur la liste de normes de jus cogens que la Commission du droit international a adopté en 2019 [172] . L’arrêt Al-Adsani a été suivi dans d’autres décisions et jugements de la Cour européenne [173] . Dans une formulation curieuse, une Chambre de la Cour a déclaré que la Convention contre la torture

reflète la volonté claire de la communauté internationale d’inscrire plus profondément encore dans le  jus cogens  l’interdiction de la torture en prenant une série de mesures pour éradiquer cette pratique et supprimer tout élément pouvant inciter à y recourir [174] .

Or, la Convention contre la torture ne prétend pas codifier une norme de jus cogens . Étant donné que le jus cogens est hiérarchiquement supérieur aux dispositions des traités, il est difficile de comprendre comment la Convention contre la torture peut « inscrire plus profondément encore » une prohibition impérative.

La Cour a aussi reconnu que la prohibition du génocide relève du  jus cogens [175] . Cette qualification est également soutenue par d’autres autorités, dont la Cour internationale de justice [176] et la Commission du droit international [177] . Autrement, depuis l’arrêt Al-Adsani , aucun autre jugement de la Cour n'a élargi la portée de jus cogens à d'autres droits fondamentaux. Au sujet des garanties d’un procès équitable, et en particulier le droit d’accès à un tribunal au sens de l’article 6(1), malgré leur importance, la Grande chambre « ne considère pas ces garanties comme figurant parmi les normes du jus cogens en l’état actuel du droit international » [178] .

Comme pour la coutume, une vision plus large de la portée du jus cogens découle de quelques opinions individuelles. Dans une opinion dissidente, le juge Dedov a dit que « l’interdiction des violations de la dignité humaine, comme la torture, l’esclavage ou la discrimination raciale, font désormais partie du jus cogens  » [179] . Le juge Pinto de Albuquerque a décrit l’interdiction de recourir à la force, prévue à l’article 2(4) de la Charte des Nations unies [180] , comme norme impérative [181] . Il a aussi identifié comme jus cogens l’obligation de prévention et de répression de génocide, des crimes contre l’humanité et les crimes de guerre [182] . Pour les juges Pinto de Albuquerque, Vučinić et Dedov, le principe de la légalité en droit pénal relève du  jus cogens [183] .

Le juge Dedov a aussi affirmé que la prohibition des crimes de guerre constitue une norme de jus cogens [184] . Cette proposition est douteuse. La liste de la Commission du droit international comprend trois des quatre crimes qui constituent la compétence de la Cour pénale internationale, le génocide, les crimes contre l’humanité et le crime d’agression. Mais on n’a jamais suggéré que la qualification de jus cogens peut aussi s’appliquer aux crimes de guerre, qui est une notion très large susceptible d’englober des actes isolés d’un seul combattant indiscipliné. Deux juges ont déclaré que « [l]es règles de procédure sont de  jus cogens  ; elles relèvent de l'ordre public et les justiciables doivent pouvoir s'attendre à ce que ces règles soient respectées et appliquées » [185] mais c’est une opinion très isolée. La juge Tsotsoria a considéré que « [l]’interdiction de la discrimination s’est matérialisée en une norme de  jus cogens  » [186] . Cette conclusion est plus solide et elle est soutenue par la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme [187] . Toutefois, la Commission du droit international n’a pas adopté une vision large de la discrimination. Elle s’est bornée à « [l]’interdiction de la discrimination raciale et de l’apartheid » [188] .

Quelques juges ont explicitement rejeté la qualification de jus cogens pour certaines normes. Après avoir accepté que parmi les normes impératives établies figurent l’interdiction du recours à la force, le droit à l’autodétermination, l’interdiction du génocide et certains droits de l’homme fondamentaux, le juge Sajó a affirmé que « [p]armi ces droits ne figurent pas le droit d’une personne au respect de ses biens, la liberté économique ou l’accès à un tribunal, notamment dans une procédure civile » [189] . Dans l’affaire Al-Adsani , plusieurs des juges dissidents ont constaté que les règles sur l'immunité des États, « qu'elles soient coutumières ou conventionnelles, ne relèvent pas du  jus cogens » [190] .

Le professeur Ian Brownlie a décrit le jus cogens comme une Bentley qui ne sort jamais de son garage [191] . Le rôle du jus cogens en droits de la personne n’est pas évident. Certainement, classer un droit comme étant du jus cogens sert des fins rhétoriques, élevant son statut comme si on mettait le texte en majuscules et en caractères gras. La Convention de Vienne sur de droit des traités prévoit la nullité de tout traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du droit international général [192] . De plus, « [s]i une nouvelle norme de jus cogens survient, tout traité existant qui est en conflit avec cette norme devient nul et prend fin » [193] . Ces deux dispositions présentent peu d'intérêt en ce qui concerne les conventions de droits de la personne. Il est difficile d’imaginer une disposition d’un traité sur les droits de la personne qui entrerait en conflit avec une norme impérative.

On a fait valoir que les normes de jus cogens priment sur une série de règles de fond et de procédure du droit international public. Devant la Cour européenne, le statut de jus cogens a été invoqué afin de neutraliser d'autres règles de droit international public, notamment les règles de droit coutumier qui garantissent l'immunité des États. Dans l'affaire Al-Adsani , l'action civile d’une victime de torture contre l’État koweïtien a été déclarée irrecevable par les tribunaux britanniques au motif de l'immunité, prévu par la loi britannique en conformité avec ses obligations internationales. Le requérant avait allégué une violation de l’article 6(1) de la Convention européenne parce qu’il était privé de son droit d’accès à un tribunal. La Grande chambre a jugé que malgré l’extrême gravité des allégations et le statut de jus cogens de l’interdiction de la torture, les tribunaux nationaux n’étaient pas tenus de faire exception à l’immunité de l’État. La Grande chambre était divisée, avec huit des dix-sept juges dissidents [194] , comme la Cour internationale de justice lorsqu’elle a donné sa bénédiction au jugement de la majorité [195] . Par la suite, des arrêts de la Cour européenne ont cité la Cour internationale de justice dans l’affaire Immunités juridictionnelles [196] .

Il ne semble pas y avoir de débat sur la question de savoir si la Cour européenne des droits de l'homme peut se référer au droit international coutumier. Les nombreuses déclarations de la Cour sur le rôle de l'article 31(3)(c) de la Convention de Vienne sur le droit des traités le montrent d'une manière extrêmement claire. Pour ces raisons, la relative rareté des références au droit international coutumier peut paraître étrange. Dans la mesure où la Cour invoque le droit international coutumier, cela concerne des questions accessoires de droit international public, telles que les immunités, plutôt que les droits fondamentaux. On peut en dire autant du jus cogens .

En défense de la Cour, ses fréquentes énumérations de sources de droit et de pratique, généralement dans une rubrique distincte de ses arrêts, pourraient bien être considérées comme l’équivalant à un examen de preuves aux fins de l'identification de la coutume. Sans vraiment faire de distinction entre les sources contraignantes et non contraignantes, la Cour européenne cite les dispositions pertinentes de conventions, y compris celles de traités non encore en vigueur, les résolutions et décisions de divers organes politiques et d'experts, et d'autres documents parfois qualifiés de «  soft law  ».

Le juge qui a fait preuve du plus grand enthousiasme tant pour le droit coutumier que pour le jus cogens Paulo Pinto de Albuquerque, a exhorté la Cour à adopter une « customary international law-friendly interpretation of the Convention » [197] . La version française de ses propos est moins éloquente et aussi moins précise, faisant référence à « une interprétation de la Convention tenant compte du droit international coutumier ». On trouve quelque chose de comparable dans la discussion du rôle du jus cogens par le juge ad hoc John Dugard de la Cour internationale de justice. Selon le juge Dugard,

[l]es normes du jus cogens sont un mélange de principes et de politiques […]. Parce qu’elles promeuvent à la fois des principes et des politiques, les normes du jus cogens doivent inévitablement jouer un rôle prépondérant dans le processus du choix judiciaire [198] .

À la suite des travaux de pionnier du juge Pinto du Albuquerque, dans les cas appropriés, la Cour européenne des droits de l’homme pourrait facilement inclure des observations sur la nature coutumière de droits spécifiques dans les résumés de la législation et de la pratique pertinentes qui figurent dans ses arrêts. Ainsi, une plus grande attention portée au droit international coutumier peut renforcer l'impact de la Cour dans les régions du monde où la Convention européenne ne s'applique pas. Aussi, dans la mesure où ses déclarations trouvent un appui et peuvent être enracinées dans le droit international coutumier d'application universelle, la jurisprudence de la Cour peut avoir un impact plus direct dans les régions d'Europe qu'elle n'atteint pas (Biélorussie et le Saint-Siège) ainsi que certains territoires non européens des États membres du Conseil de l'Europe qui sont à l’abri de la Convention européenne [199] . Sans doute, sa voix porte bien au-delà du continent européen. Une référence accrue par la Cour à la fois à la coutume et au jus cogens ne peut que renforcer son rayonnement.

Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales , 4 novembre 1950, 213 RTNU 221 (entrée en vigueur   : 3 septembre 1953) [ Convention européenne ] .

Charte des Nations Unies et Statut de la Cour internationale de justice , 26 juin 1945, 33 RTNU 993, RT Can 1945 n o 7 art 38(1) [ Statut de la CIJ ].

Statut de Rome de la Cour pénale internationale , 17 juillet 1998, 2187 RTNU 38544 art 21 (entrée en vigueur : 1er juillet 2002) [ Statut de Rome ].

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S.M. c Croatie [GC], n o 60561/14 (25 juin 2020) aux para 107-94.

Procureur c Alex Tamba Brima , SCSL-04-16-T, Jugement (20 juin 2007) au para 705 (Tribunal spécial pour la Sierra Leone, Chambre de 1 ère instance II); Procureur c Bosco Ntaganda , ICC-01/04-02/06-2026, Décision relative à la compétence juridictionnelle de la Cour (4 janvier 2017) au para 51 (Cour pénale internationale); David Weissbrodt et Anti-Slavery International, Abolishing Slavery and its Contemporary Forms , Doc off OHCHR (2002 ) HR/PUB/02/4, 1 à la p 3; Renee Colette Redman, « The League of Nations and the Right to be Free from Enslavement : The First Human Right to be Recognized as Customary International Law », (1994) 70 : 10 Chicago-Kent L Rev 759 à la p 759.

Rapport de la Commission du droit international , Doc off CDI, 71 e sess, supp n o 10, Doc NU, A/74/10 (2019) à la p 155 [ Rapport de la Commission du droit international , CDI 2019]; voir aussi un arrêt récent de la Cour suprême du Canada  : Nevsun Resources Ltd. c Araya, 2020 SCC 5 au para 101, 443 DLR (4 th ) 183, juge Abella [ Nevsun ].

Naït-Liman c Suisse [GC], n o 51357/07 (15 mars 2018) aux para 183, 200-01 [ Naït-Liman [GC] (2018)].

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Golder c Royaume-Uni , (1975) 18 Cour Eur DH (Sér A) au para 29 [ Golder ].

Ibid. Voir aussi les opinions des juges Zekia et Verdross dans Ringeisen c Autriche (1971) 13 Cour Eur DH (Sér A).

Stichting Mothers of Srebrenica et autres c Pays-Bas (déc), n o 65542/12, [2013] III CEDH 285 [ Stichting mothers of Srebrenica ].

Convention de Vienne , supra note 9, art 31(1).

Ibid , art 31(3)(c).

Opuz c Turquie , n o 33401/02 (9 juin 2009) au para 184.

Perinçek c Suisse [GC], n o 27510/08, [2015] VII CEDH 181 [ Perinçek [GC] (2015)] au para 150; Bianchi c Suisse , n o 7548/04 (2006) au para 81; Stoll c Suisse [GC], n o 69698/01, [2007] V CEDH 205 au para 59; Janowiec et al. c Russie [GC], n o 55508/07, [2013] V CEDH 203 aux para 3, 5, juge Wojtyczek, opinion en partie concordante et en partie dissidente.

Statut de la CIJ , supra note 2, art 38(1)(b).

Rapport de la Commission du droit international , Doc off CDI, 70 e sess, supp n o 10, Doc NU A/73/10 (2018) aux pp 123-66 [ Rapport de la Commission du droit international , CDI 2018].

Lassa Oppenheim, « The Science of International Law: Its Task and Method » (1908) 2 AJIL 313 à la p 349.

Pacte international relatif aux droits civils et politiques , 19 décembre 1966, 999 RTNU 171 (entrée en vigueur : 23 mars 1976) [ PIDCP ].

Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels , 16 décembre 1966, 993 RTNU 3 (entrée en vigueur : 3 janvier 1976).

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Convention européenne , supra note 1, art 7.

K.-H.W. c Allemagne [GC], n o 37201/97, [2001] II CEDH 463, juge Loucaides, opinion concordante; Streletz, Kessler et Krenz c Allemagne [GC], n o 34044/96, [2001] II CEDH 351, juge Loucaides, opinion concordante.

Procureur c Dusco Tadić , IT-94-1-A, Arrêt (15 juillet 1999).

Al-Adsani c Royaume-Uni [GC], n o 35763/97, [2001] XI CEDH 117 au para 61 [ Al-Adsani ].

Perinçek [GC] (2015), supra note 16 contra Perinçek c Suisse , n o 27510/08 (17 décembre 2013), juges Vučinić et Pinto de Albuquerque, opinion en partie dissidente [ Perinçek (2013)].

Pour accéder à l'ensemble des Protocoles , voir Conseil de l'Europe, Bureau des traités, en ligne : < www.coe.int/fr/web/conventions/search-on-treaties/-/conventions/treaty/results/subject/3 >.

Lopes de Sousa Fernandes c Portugal [GC], n o 56080/13 (19 décembre 2017), au para 66, juge Pinto de Albuquerque, opinion en partie concordante et en partie dissidente [ Lopes de Sousa Fernandes ].

Vona c Hongrie , n o 35943/10, [2013] IV CEDH 237, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante.

Perinçek (2013), supra note 49 au para 16.

Al Dulimi and Montana Management Corporation c Suisse [GC], n o 5809/08 (21 juin 2016), aux para 28, 33 37, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante à laquelle se rallient les juges Hajiyev, Pejchal et Dedov [ Al Dulimi ].

Baka c Hongrie [GC], n o 20261/12 (23 juin 2016) au para 19, juges Pinto de Albuquerque et Dedov, opinion concordante commune.

Al Dulimi , supra note 54 au para 28.

Maktouf et Damjanović c Bosnie et Herzegovine [GC], n o 2312/08, [2013] IV CEDH 47, au para 9, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante à laquelle se rallie le juge Vučinic; Ilnseher c Allemagne [GC], n o 10211/12 (4 décembre 2018), au para 75, juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente à laquelle se rallie le juge Dedov.

A. et B. c Norway [GC], n o 24130/11 (15 novembre 2016), aux para 6‑15, juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente; Mihalache c Roumanie [GC], n o 54012/10 (8 juillet 2019), au para 47, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante.

Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (règles Nelson Mandela) , Doc NU E/CN.15/2015/L.6/Rev.1, Annexe (2015).

Tautkus c Lithuania , n o 29474/09 (27 novembre 2012), juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente.

J. et al. c Autriche , n o 58216/12 (17 janvier 2017), au para 40, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante à laquelle se rallie la juge Tsotsoria.

Valiulienė c Lituanie , n o 33234/07 (26 mars 2013), juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante.

Chiragov et al. c Arménie [GC], n o 13216/05, [2015] III CEDH 311, au para 42, juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente.

Lopes de Sousa Fernandes , supra note 51 au para 71.

Ramadan c Malte , n o 76136/12 (21 juin 2016), au para 7, juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente.

X. c Lettonie [GC], n o 27893/09, [2013], VI CEDH 379, à la p 432, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante.

Mocanu et al. c Romania [GC], n o 10865/09, [2014] V CEDH 345, au para 5, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante à laquelle se rallie le juge Vučinić.

Söderman c Suède [GC], n o 5786/08, [2013] VI CEDH 259 2013-VI, à la p 306, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante.

Sargsyan c Azerbaïjan [GC], n o 40167/06, [2015] IV CEDH 161 au para 29, juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente [ Sargsyan ].

Kurić c Slovénie [GC], n o 26808/06, [2012] IV CEDH 93, à la p 182, juge Vučinić, opinion en partie dissidente et en partie concordante.

Khlaifia et al. c Italie [GC], n o 16483/12 (15 décembre 2016), au para 24, juge Serghides, opinion en partie dissidente.

F.G. c Suède [GC], n o 53611/11 (23 mars 2016), au para 7, juges Ziemele, de Gaetano, Pinto de Albuquerque et Wojtyczek, opinion commune séparée; Hirsi Jamaa et al. c Italie [GC], n o 27765/09, [2012] II CEDH 1, à la p 77, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante.

Inete Ziemele, « Customary International Law in the Case Law of the European Court of Human Rights » dans The Judge and International Custom/Le juge et la coutume internationale , présenté à Paris, septembre 2012, à la p 76 [Ziemele « Customary International Law »]. Voir aussi Inete Ziemele, « Customary International Law in the Case Law of the European Court of Human Rights – The Method », (2013) 12 Law & Prac Intl Cts & Trib 243 à la p 244.

Demir et Baykara c Turquie [GC], n o 34503/97, [2008] V CEDH 333 au para 67 [ Demir et Baykara ].

Ibid aux para 76 et 78.

Ziemele « Customary International Law », supra note 73 à la p 76.

Demir et Baykara , supra note 74 au para 85.

Ibid , au para 86.

Ziemele « Customary International Law », supra note 73 à la p 77.

Ibid aux pp 7778.

Ibid à la p 79.

Convention européenne , supra note 1, art 6.

Ziemele « Customary International Law », supra note 73 à la p 80.

Ndayegamiye-Mporamazina c Suisse , n o 16874/12 (5 février 2019) au para 21; Sabeh el Leil c France [GC], n o 34869/05 (29 juin 2011) au para 18.

Al-Adsani , supra note 48 au para 66.

Kalogeropoulou et al. c Grèce et Allemagne (déc), n o 59021/00 (12 décembre 2002) à la p 3 [ Kalogeropoulou ].

Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens , 2 décembre 2004, RTNU A/59/508 (pas en vigueur à ce jour), Annexe.

Cudak c Lituanie [GC], n o 15869/02, [2010] III CEDH 121 au para 67 (voir aussi l'opinion concordante du juge Cabral Barreto, à laquelle se rallie le juge Popović); Sabeh el Leil c France (déc), n o 34869/05 (21 octobre 2008); Sabeh el Leil c France [GC], n o 34869/05 (29 juin 2011) aux para 53-54; Wallishauser c Autriche , n o 156/04 (17 juillet 2012) au para 65; Oleynikov v Russia , n o 36703/04 (14 mars 2013) aux para 6668; Ndayegamiye-Mporamazina c Suisse , supra note 85 au para 53.

Kalogeropoulou supra note 87 à la p 10; Manoilescu et Dobrescu c Roumanie et Russie , n o 60861/00 (3 mars 2005) au para 81.

Fogarty c Royaume-Uni [GC], n o 37112/97, [2001] XI CEDH 177, juge Loucaides, opinion dissidente [ Fogarty ].

Immunités juridictionnelles de l’État (Allemagne c. Italie ; Grèce (intervenant)) , [2012] CIJ Rec 99 au para 96.

Doc off AGNU, 68 e sess, 691 e séance, Doc NU A/CN.4/691 (2016) au para 26.

Rapport de la Commission du droit international , CDI 2018, supra note 18 à la p 148.

Ziemele « Customary International Law », supra note 73 aux pp 7982.

Strand Lobben et al. c Norvège [GC], n o 37283/13 (10 septembre 2019) au para 207 [ Strand Lobben ]; Naït-Liman [GC] (2018), supra note 8 au para 97.

N.D. et N.T. c Espagne [GC], n o 8675/15 (13 février 2020) au para 232.

Strand Lobben , supra note 96 au para 204; Luzi c Italie, n o 48322/17 (5 décembre 2019) au para 67; R.C. et V.C. c France , n o 76491/14 (12 juillet 2016) au para 78.

Diala c Suisse (déc), n o 35201/18 (10 décembre 2019) au para 39.

M.S.S. c Belgique et Grèce [GC], n o 30696/09, [2001] I CEDH 121 au para 251; N.H. et al. c France , n o 28820/13 (2 juillet 2020) au para 162.

Mugenzi c France , n o 52701/09 (19 juillet 2014) au para 54.

Vanyo Todorov c Bulgarie , n o 31434/15 (21 juillet 2020) aux para 62, 65.

Magyar Kétfarkú Kutya Párt c Hongrie [GC], n o 201/17 (20 janvier 2020) au para 80; Abdyusheva et al. c Russie , n o 58502/11 (26 novembre 2019) au para 120; Theodorou et Tsotsorou c Grèce , n o 57854/15 (5 septembre 2019) au para 30; Ahunbay et al. c Turquie (déc), n o 6080/06 (29 janvier 2019) au para 25; D. c France , n o 11288/18 (16 juillet 2020) au para 52.

S.A.S. c France [GC], n o 43835/11, [2014] III CEDH 91 aux para 155-56.

X. et al. c Autriche [GC] , n o 19010/07, [2013] II CEDH 73 au para 150 [ X. c Autriche ].

Perinçek [GC] (2015), supra note 16 au para 266.

X. c Autriche , supra note 105.

Jones et al. c Royaume-Uni , n o 34356/06, [2014] I CEDH 75 [ Jones ].

Ibid au para 110.

Naït-Liman c Suisse , n o 51357/07 (21 juin 2016) au para 120 [ Naït-Liman ( 2016)].

Convention de Vienne de 1983 sur la succession d’États en matière de biens, archives et dettes d’États , (8 avril 1983) A/CONF.117/14 (non encore en vigueur).

Ališić et al. c Bosnie-Herzégovine, Croatie, Serbie, Slovénie et l’ex-République yougoslave de Macédoine , n o 60642/08 (6 novembre 2012) au para 40.

Kovačić et al. c Slovénie [GC], n o 44574/98 (3 octobre 2008) au para 231.

Allemagne et al. c Slovénie , n o 44574/98 (6 novembre 2006) au para 194.

Banković et al. c Belgique et al. [GC], n o 52207/99, [2001] VII CEDH 371 au para 73; Hirsi Jamaa et al. c Italie [GC], n o 27765/09, [2012] II CEDH 1 au para 75.

Medvedyev c France [GC], n o 3394/03, [2010] III CEDH 1 au para 85. Voir, toutefois, l'opinion partiellement dissidente commune aux juges Costa, Casadevall, Bîrsan, Garlicki, Hajiyev, Šikuta et Nicolaou au para 8.

Al Skeini c Royaume-Uni [GC], n o 55721/07, [2011] IV CEDH 199.

Ibid au para 91.

Behrami et Behrami c France et Saramati c France, Allemagne et Norvège [GC] (déc), n o 71412/01 (2 mai 2007).

Ibid au para 148.

Protocole concernant la prohibition d'emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques , (17 juin 1925) 94 RTSN 65 (entrée en vigueur : 8 février 1928).

Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction , (10 avril 1972) 1974 RTNU 45 (entrée en vigueur : 26 mars 1975).

Van Anraat v The Netherlands (déc), n o 65389/09 (6 juillet 2010) au para 92.

Jean-Marie Henckaerts et Louise Doswald-Beck, Droit international humanitaire coutumier , Vol. I, Bruxelles, Éditions Bruylant, 2006.

Korbely c Hongrie [GC], n o 9174/02, [2008] IV CEDH 363 au para 51; Sargsyan , supra note 69 au para 95; Chiragov et al. c Armenie [GC], n o 13216/05, [2015] III CEDH 311 au para 97; Marguš c Croatie [GC], n o 4455/10, [2014] III CEDH 87 au para 45; Janowiec et al. c Russie [GC], n o 55508/07 [2013] V CEDH 305, au para 126, juges Ziemele, de Gaetano, Laffranque et Keller, opinion en partie dissidente; Mocanu et al. c Romania [GC], n o 10865/09 [2014] V CEDH 345, au para 5, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante à laquelle se rallie le juge Vučinić; J. et al. , supra note 61 au para 14, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante à laquelle se rallie la juge Tsotsoria; Kononov c Lettonie , n o 36376/04 (24 juillet 2008) au para 10, juges Fura-Sandström, Davíd Thór Björgvinsson et Ziemele, opinion dissidente commune [ Kononov (2008)]; Marguš c Croatie , n o 4455/10 (13 novembre 2012) au para 29 [ Marguš ].

Marguš , ibid au para 74.

Marguš c Croatie [GC], n o 4455/10, [2014] III CEDH 87 au para 130.

Ibid au para 139.

Janowiec et al. c Russie, n o 55508/07 (16 avril 2012).

Ibid au para 140.

Ibid au para 6, juges Spielmann, Villiger et Nussberger, opinion partiellement dissidente commune. Sur ce sujet, voir William A. Schabas, « The Katyn Forest Massacre and the Nuremberg Trial » dans Morten Bergsmo, Cheah Wui Ling, Song Tianying et Yi Ping, dir, Historical Origins of International Criminal Law , vol 3, Bruxelles, Torkel Opsahl Academic Publishers, 2015, 249.

Kononov (2008) supra note 126 au para 120.

Kononov c Lettonie [GC], n o 36376/04 [2010] IV CEDH 137 au para 52 (références omises).

Ibid au para 203.

Ibid au para 221.

Ibid au para 11, juge Costa, opinion dissidente à laquelle se rallient les juges Kalaydjieva et Poalelungi.

Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide , 9 décembre 1948, 78 RTNU 277 (12 janvier 1951), art 2 [ Convention sur le génocide ].

Vasiliauskas c Lituanie [GC], n o 35343/01 [2015] VII CEDH 221.

Ibid au para 178.

Ibid aux para 168, 172.

Traité de Sèvres , Empire britannique, France, Italie, Japon, Arménie, Belgique, Grèce, Hedjaz, Pologne, Portugal, Roumanie, État serbe-croate-slovène, Tchécoslovaquie et Turquie, 10 août 1920, traité non ratifié.

Perinçek (2013), supra note 49 au para 6, juges Vučinić et Pinto de Albuquerque, opinion en partie dissidente.

Kolk et Kislyiy c Estonie (déc), n o 23052/04, [2006] I CEDH 413 à la p 424. Voir aussi Accord concernant la poursuite et le châtiment des grands criminels de guerres des Puissances européennes de l'Axe et statut du tribunal international militaire, Londres, 8 août 194, art 6(c)).

Nevsun , supra note 7 au para 83.

Rapport de la Commission du droit international , CDI 2019, supra note 7 à la p 169.

Ibid à la p 151 .

Ibid à la p 155.

Ibid à la p 150.

Réserves à la Convention sur le génocide , Avis consultatif, [1951] CIJ Rec 15 à la p 23.

Doc off AG NU, Le crime de génocide , 11 décembre 1946, A/RES/96(I). L’expression « loi morale » n’était pas dans le projet original, A/BUR/50, dont on croit que l’auteur était Rafael Lemkin.

W. c Royaume-Uni (1983), DR 32 Comm Eur DHDR 190 aux pp 195, 205; Chypre c Turquie , n o 25781/94 (1999) au para 93, rapport de la Commission (31).

Chrysostomos et Papachrysostomou c Turquie , n o 15299/89, rapport de la Commission (31), Christos Rozakis, opinion partiellement concurrente et partiellement dissidente.

Ringeisen c Autriche (1971), 13 Cour Eur DH (Sér A) au para 1, juge Verdross.

Belilos c Suisse (1988), 132 Cour Eur DH (Sér A).

Ibid , juge de Meyer, opinion concordante.

Al-Adsani , supra note 48 au para 60.

Ibid au para 23.

Procureur c Furundžija , IT-95-17/1, Jugement (10 décembre 1998) au para 144 [ Furundžija ]; Procureur c Delalić et al. , IT-96-21-T, Jugement (16 novembre 1998) au para 454; Procureur c Kunarac et al., IT-96-23-T, Jugement (22 février 2001), au para 466.

Al-Adsani , supra note 48 au para 60

Ibid au para 61. Voir aussi Fogarty , supra note 91, juges Caflisch, Costa et Vajić, opinion concordante.

Furundžija , supra note 166 aux para 153‑157.

Blake c Guatemala (1998), Cour Inter-Am DH (sér C) n o 36 aux para 15 et 25, juge Cançado Trindade, Annual Report of the Inter-American Court of Human Rights , OEA/Ser.L/V/III.43/doc.11 (1999) 16.

Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader (Belgique c Sénégal) , [2012] CIJ Rec 422 au para 99.

Rapport de la Commission du droit international , CDI 2019, supra note 7 à la p 155.

Kalogeropoulou , supra note 87; Demir et Baykara c Turquie [GC], n o 34503/97 [2008] V CEDH 333 au para 73; Ould Dah c France (déc), n o 13113/03 [2009] I CEDH 415; Naït-Liman (2016), supra note 111 aux para 116, 121 et Opinion dissidente des juges Karakas, Vučinić et Kūris au para 2.

Othman (Abu Qatada) c Royaume-Uni , n o 8139/09 [2012] X CEDH 249 au para 266.

Jorgić c Allemagne , n o 74613/01 [2007] III CEDH 301 au para 68; Stichting Mothers of Srebrenica , supra note 12 au para 156.

Activités armées sur le territoire du Congo (nouvelle requête : 2002) (République démocratique du Congo c Rwanda) , [2006] CIJ Rec 6 au para. 64 [ Activités armées sur le territoire du Congo ]; Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro) , [2007] CIJ Rec 43 au para 161; Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie) , [2015] CIJ Rec 3 au para 87.

Rapport de la Commission du droit international , CDI 2019, supra note 7 à la p 218; Dire Tladi, Quatrième rapport sur les normes impératives du droit international général ( jus cogens ), Doc off, 71 e sess, Doc NU A/CN.4/727, (2019) 1 aux para 78-83.

Al-Dulimi , supra note 54 au para 136.

Naït-Liman [GC] (2018), supra note 8, juge Dedov, opinion dissidente.

Charte des Nations unies , supra note 27, art 2(4).

Sargsyan , supra note 69 aux para 21, 23, 30, juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente; Chiragov et al. c Arménie [GC], n o 13216/05, [2015] III CEDH 311 au para 40, juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente.

Sargsyan , supra note 69 au para 21, juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente.

Maktouf et Damjanović c Bosnie et Herzegovine [GC], n o 2312/08 [2013] IV CEDH 47 au para 9, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante à laquelle se rallie le juge Vučinić; Ilnseher c Allemagne [GC], supra note 57 au para 75, juge Pinto de Albuquerque, opinion dissidente à laquelle se rallie le juge Dedov.

Janowiec et al. c Russie [GC], n o 55508/07, [2013] V CEDH 203, juge Dedov, opinion concordante.

Cañete de Goñi c Espagne , n o 55782/00, [2002] VIII CEDH 83 au para 3, juge Casadevall, opinion dissidente à laquelle se rallie la juge Strážnická.

Georgie c Russie (I) [GC], n o 13255/07, [2014] IV CEDH 1, juge Tsotsoria, opinion en partie dissidente.

Condición jurídica y derechos de los migrantes indocumentados (Mexique) (2003), Avis consultatif OC-18/03, Cour Inter-Am DH (sér A) n o 17 au para 101, Annual report of the Inter-American Commission on Human Rights : 2003 , OEA/Ser.L/V/II.118/doc.5 (2003) 397; Personas dominicanas y haitianas expulsadas vs Republica Dominicana (2014), Cour Inter-Am DH (sér C) n o 282 au para 264, Annual report of the Inter-American Commission on Human Rights : 2014 , OEA/Ser.L/V/II./doc.13 (2015); Nadege Dorzema et al. c République Dominicaine (2012), Inter-Am Ct HR (sér C) n o 251 au para 225; Atala Riffo et filles c Chili (2012), Cour Inter-Am DH (sér C) n o 239 au para 79; Comunidad Indígena Xákmok Kásek c Paraguay (2010), Cour Inter-Am DH (sér C) n o 214 au para 269; Yatama c. Nicaragua (2005), Cour Inter-Am DH (sér C) n o 127 au para 184; Servellón-García et al. c Honduras (2006), Inter-Am Ct HR (sér C) n o 152 au para 94; Norín Catrimán y otros ( Dirigentes, Miembros y Activista del Pueblo Indígena Mapuche) c Chili (2014), Cour Inter-Am DH (sér C) n o 279 au para 197; Veliz Franco et al. c Guatemala (2014), Cour Inter-Am DH (sér C) n o 277 au para 205.

Rapport de la Commission du droit international , CDI 2019, supra note 7 à la p 155. Voir aussi Dire Tladi, Quatrième rapport sur les normes impératives du droit international général ( jus cogens ), Doc off, 71 e sess, Doc NU A/CN.4/727, (2019) 1 au para 101.

Al-Dulimi and Montana Management Inc. c Suisse , n o 5809/08 (26 novembre 2013), juge Sajó, opinion en partie dissidente.

Al-Adsani , supra note 48 au para 6, juges Rozakis et Caflisch, opinion dissidente commune à laquelle déclarent se rallier les juges Wildhaber, Costa, Cabral Barreto et Vajić.

Ian Brownlie, « Comment » dans Joseph Weiler et Antonio Cassese, dir, Change and Stability in International Law-Making , Berlin, de Gruyter, 1988, à la p 110, cité dans Al-Dulimi , supra note 54. Au para 35, juge Pinto de Albuquerque, opinion concordante à laquelle se rallient les juges les Hajiyev, Pejchal et Dedov.

Convention de Vienne , supra note 9 à l'art 53.

Ibid à l'art 64.

Al-Adsani , supra note 48, juges Rozakis et Caflisch, opinion dissidente commune à laquelle déclarent se rallier les juges Wildhaber, Costa, Cabral Barreto et Vajić, juge Ferrari Bravo, opinion dissidente et juge Loucaides, opinion dissidente. Voir aussi Fogarty , supra note 91, juges Caflisch, Costa et Vajić, opinion concordante.

Immunités juridictionnelles de l’État (Allemagne c Italie ; Grèce (intervenant)), [2012] CIJ Rec 99 aux para 90, 96 [ Immunités juridictionnelles ].

Jones , supra note 108 aux para 88-94; Naït-Liman [GC] (2018), supra note 8 aux para 71, 99 (voir aussi l'opinion dissidente du juge Dedov); Stichting Mothers of Srebrenica , supra note 12 au para 158; O’Keeffe c Irlande [GC], n o 35810/09, [2014] I CEDH 233, au para 7, juge Ziemele, opinion concordante.  

Lopes de Sousa Fernandes c Portugal [GC], n o 56080/13 (19 décembre 2017), au para 71, juge Pinto de Albuquerque, opinion en partie concordante et en partie dissidente.

Activités armées sur le territoire du Congo , supra note 176, au para 10, juge ad hoc Dugard.

Chagos Islanders c Royaume-Uni s, n o 35622/04 (11 décembre 2012) au para 47.

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L’ordre juridique international entre tradition et innovation

Première partie. théorie générale du droit des gens.

L’individu, la coutume internationale et le juge national1

L’individu, la coutume internationale et le juge national 1

Texte intégral, i. introduction.

1 Paru dans les Mélanges dédiés à Robert Pelloux , 1980, pp. 193-209. © Ed. L’Hermès, Lyon.

1 En accordant une attention soutenue à la protection internationale des droits de l’homme, le Professeur Robert Pelloux a apporté le témoignage d’une conviction profonde, que beaucoup partagent avec lui, voulant que le droit n’ait d’autre finalité que le bien de l’être humain.

2 Cela vaut aussi pour le droit des gens, même si la structure de l’ordre juridique international en fait un droit à fondement interératique.

3 On remarque que l’individu apparaît de plus en plus fréquemment au centre de la règle internationale. Si le phénomène est manifeste en matière de droits de l’homme et de droit humanitaire, il peut aussi être observé dans d’autres domaines, où la réglementation internationale vise à harmoniser les rapports transnationaux, et notamment à préserver l’individu des aléas résultant pour lui de la diversité des systèmes juridiques nationaux.

4 Cela se traduit, dans la jurisprudence des tribunaux nationaux, par un accroissement sensible des arrêts qui, d’une manière ou d’une autre, font application directement, ou indirectement par le truchement d’une règle nationale, de normes d’origine internationale, principalement de traités internationaux. On assiste à un véritable éveil du juge interne au droit international. La doctrine n’a pas manqué d’être sensible à cette évolution, et l’on a vu, depuis une trentaine d’années, se multiplier les études consacrées à l’application du droit des gens par les juridictions nationales, avec un accent principal sur l’application directe des traités internationaux.

5 Nous voudrions, ici, nous arrêter plus particulièrement au problème de la coutume internationale, en limitant notre propos, pour l’essentiel, à la question de savoir si l’individu peut l’invoquer et en déduire des droits susceptibles d’être reconnus par le juge interne.

6 Sans doute, on peut penser que le rôle de la coutume ne saurait se comparer à celui que joue le droit conventionnel, qui régit dans une mesure qui va s’élargissant des matières de nature transnationale. Cependant, le problème de l’application directe de la coutume n’est pas dépourvu d’intérêt théorique et pratique.

  • 1 Pour une analyse des jurisprudences nationales, voir notamment : Dubouis , « L’application du droit (...)

7 Bien évidemment, une analyse approfondie excéderait les limites assignées à cette étude. Nous nous bornerons ici à évoquer quelques-unes des questions que l’on peut se poser, en illustrant notre propos par des exemples empruntés aux jurisprudences internes, dont nous ne prétendons pas pouvoir donner un aperçu d’ensemble, fût-il sommaire. 1

II. LA VALIDITÉ DE LA COUTUME INTERNATIONALE DANS L’ORDRE INTERNE

A. validité et effets directs.

8 Pour que l’individu puisse, le cas échéant, trouver dans la coutume internationale le fondement de droits faisant partie de son patrimoine juridique, il faut tout d’abord que le droit des gens coutumier soit en principe valable dans l’ordre interne, qu’il prenne place parmi l’ensemble des normes juridiques qui s’imposent à l’attention du juge.

  • 2 Sur cette nécessaire distinction Bleckmann , Begriff und Kriterien der innerstaatlichen Anwendbarkei (...)
  • 3 Voir cependant la décision du Tribunal fédéral suisse relative au chiffre 5 d’une décision de l’OEC (...)
  • 4 Bien entendu, une troisième question se présente, celle du rang, dans l’ordre interne, de la dispos (...)

9 Cette question de la validité dans l’ordre interne est distincte de celle des effets directs, quand bien même des points de contact s’établissent entre l’une et l’autre. Il s’agit d’une distinction que l’on ne souligne peut-être pas toujours avec suffisamment de clarté, sinon dans la doctrine 2 , du moins dans la jurisprudence 3 , lorsque surgit la question de l’application directe des traités internationaux. Dans le sillage de la pratique judiciaire américaine, on s’interroge en effet sur le caractère «  self-executing » d’un traité, ou plus précisément d’une norme conventionnelle spécifique dont se réclame un plaideur, sans mesurer avec la netteté qui conviendrait que l’on concentre en définitive en une seule opération deux démarches distinctes et successives répondant à deux questions. Tout d’abord, la norme conventionnelle fait-elle partie, en principe, du faisceau des normes pertinentes pour le juge aux fins de trancher le cas d’espèce ? Ensuite, dans l’affirmative, cette norme confère-t-elle au justiciable un droit dont il peut se réclamer ? 4

  • 5 Pour une analyse comparative des systèmes nationaux, voir Wildhaber , Treaty-Making Power and Consti (...)

10 On s’explique que la distinction ne soit pas toujours clairement faite, car le juge pour lequel la disposition empruntée à un traité international est susceptible, en principe, d’être prise en considération n’est conduit à en envisager l’application que si elle lui apparaît directement applicable. C’est sur ce problème qu’il concentre son attention, et cela peut être observé aussi bien dans les systèmes qui consacrent la réception ou l’adoption du droit conventionnel dans l’ordre interne que dans ceux qui sont fondés sur le principe de la transformation générale du traité par l’effet de la loi d’adoption. 5 Dans un cas comme dans l’autre, le juge tient pour acquis que le droit conventionnel s’impose en principe à son attention – en tant que droit international ou en tant que droit interne – et s’interroge d’emblée sur le caractère directement applicable de la norme invoquée.

11 Il importe toutefois de ne pas méconnaître que la distinction entre les deux ordres de questions n’est pas dépourvue d’importance.

  • 6 Autre est la question de savoir si les Etats parties à un traité ont l’obligation de lui assurer va (...)
  • 7 La question de savoir si un traité est applicable dépend dans une large mesure, sans doute, du droi (...)

12 Tout d’abord, on doit observer que la première question, celle de la validité du droit des gens dans l’ordre interne, relève en définitive de l’ordre juridique national. C’est la constitution, ou, lorsque celle-ci est muette, une coutume constitutionnelle, qui fixe les modalités de la pénétration du droit international public dans l’ordre interne. 6 En revanche, la deuxième question, celle de l’application directe, relève du droit international, puisqu’il s’agit d’examiner la portée de la norme en cause, à la lumière de sa structure et de son objet. 7

  • 8 Cela peut dépendre de la nature de la demande formulée en justice ; on peut citer l’exemple de cert (...)

13 En second lieu, on peut remarquer, comme nous le verrons encore, que la même norme est susceptible, dans certains cas, d’application directe, alors que dans d’autres cas elle ne l’est pas. 8 Etant donné qu’elle ne peut être à la fois valable et non valable dans l’ordre interne, il faut bien constater que cette question de validité est distincte de celle de l’application directe.

14 En outre, comme nous allons l’observer particulièrement au sujet de la coutume internationale, une règle du droit des gens peut être appelée à jouer un rôle dans un litige porté devant le juge, non pas en tant que règle pertinente pour statuer sur la demande formulée en justice, mais afin de résoudre une question incidente, telle, par exemple, celle de la validité d’un traité. On voit donc apparaître, dans des décisions judiciaires rendues entre particuliers, des règles du droit des gens qui pourtant ne fondent aucun droit direct au bénéfice des individus, ce qui révèle bien que le problème de la validité du droit des gens pour le juge interne présente un caractère autonome et distinct par rapport à ce qu’il est convenu d’appeler les effets directs ou la nature «  self-executing » .

B. Les solutions nationales

  • 9 C’est principalement en République fédérale d’Allemagne qu’est fermement ancrée la théorie de la tr (...)
  • 10 C’est en 1765 que Blackstone résuma l’enseignement de la jurisprudence : « The law of nations (when (...)
  • 11 Cf. par exemple Salmon , loc. cit. , supra , note 1, p. 220, pour la Belgique, et Dominicé , dans l’étu (...)
  • 12 Article 25 de la loi fondamentale allemande ; article 10 (1) de la Constitution italienne ; article (...)

15 Il est remarquable de constater que, de manière très générale, les ordres juridiques internes admettent en principe la validité – validité immédiate ou par transformation 9 – du droit international coutumier. La tradition juridique anglo-américaine, illustrée par le fameux commentaire de Blackstone et de non moins célèbres prononcés judiciaires, consacre le principe selon lequel le droit des gens coutumier fait partie du droit du pays. 10 La jurisprudence, sur le continent européen, a généralement suivi la même voie, partout où la constitution est muette en la matière. 11 Quant aux Constitutions qui contiennent une disposition relative aux règles coutumières du droit international public, elles consacrent leur validité dans l’ordre interne. 12

16 On peut donc, à première vue, se réjouir de constater une uniformité, s’agissant de la coutume, qui ne peut être observée en matière de traités internationaux.

17 Un examen plus attentif révèle cependant que la portée d’un principe qui semble généralement adopté peut varier très sensiblement d’un pays à l’autre. Sans entrer dans le détail, il suffit de mentionner ici la question du rang de la coutume dans la hiérarchie des normes. Les solutions adoptées dans les divers pays n’apparaissent le plus souvent pas très clairement, mais il est évident qu’elles offrent entre elles d’importantes différences.

18 On peut rappeler sans doute qu’il en va de même pour les traités internationaux, mais il faut souligner que lorsque le droit conventionnel est valable pour le juge interne il prend au moins la valeur d’une loi, de sorte que dans la situation la moins favorable il l’emporte sur une loi interne antérieure.

  • 13 Article 25 de la loi fondamentale allemande, cf. Bleckmann , Grundgesetz und V ö lkerrecht , 1975, p. 2 (...)

14 Cf. Mann , loc. cit. , supra , note 1, p. 17.

19 Pour la coutume, on constate certes qu’elle peut se voir reconnaître un rang supérieur aux lois, et tel est notamment le cas lorsque la Constitution ordonne cette primauté. 13 Elle peut aussi être assimilée à une loi formelle et l’emporter par conséquent sur toutes les normes juridiques de rang inférieur. Toutefois, la prise en considération de la coutume internationale peut aussi être limitée aux cas où n’existe aucune règle écrite du droit interne ; sa place dans l’ordre interne, sans être négligeable, est singulièrement réduite. Telle est bien, semble-t-il, la situation tant au Royaume-Uni qu’aux Etats-Unis, où, si l’on y regarde de près, la coutume internationale fait en somme partie de la common law interne, qui cède devant une règle écrite. 14

  • 15 Tel est le cas du juge administratif français, cf. Gervais , « Constatations et réflexions sur l’att (...)

20 Si l’on ajoute que parfois le juge s’interdit de recourir à la coutume internationale 15 ou qu’il hésite devant une source qui lui est peu familière et lui paraît incertaine, on comprend que le principe de la validité dans l’ordre interne recouvre des réalités concrètes fort différentes. Il n’en reste pas moins important de constater la consécration générale de ce principe.

III. LA QUESTION DES EFFETS DIRECTS DE LA COUTUME

A. le problème.

21 Un bref survol des jurisprudences nationales révèle que, sous diverses appellations, le droit international coutumier fait son apparition dans les décisions plus fréquemment qu’on ne l’imagine. On ne saurait cependant en déduire derechef que le droit international général produit des effets directs dans la personne des particuliers.

  • 16 Dans l’abondante littérature, on peut citer les deux ouvrages de Bleckmann , Begriff und Kriterien d (...)
  • 17 Cela fut mis particulièrement en lumière par le fameux arrêt van Gend en Loos de la Cour de Justice (...)

22 Que faut-il entendre par effets directs ? La question est fort discutée en matière de traités internationaux. En dépit de divergences dans les définitions, dues pour une part à la variété des « structures d’accueil » offertes au droit des gens par les ordres juridiques nationaux, on peut admettre qu’il y a effets directs d’une norme internationale lorsque celle-ci crée au bénéfice du justiciable un droit dont il peut se prévaloir à l’appui de sa demande ou de sa défense. 16 Tel est le cas de la norme qui énonce un droit d’une manière suffisamment précise et complète, mais tel est également le cas de la règle qui formule une interdiction à la charge des Etats : il y a effet direct dans la mesure où l’individu peut, en se fondant sur cette interdiction, demander au juge de ne pas appliquer une mesure étatique qui la transgresse, ou d’en constater l’invalidité. 17

23 La théorie de l’effet direct, développée à l’égard du droit conventionnel, vaut-elle aussi pour la coutume, ou se heurte-t-elle à des objections de principe ?

24 On peut écarter rapidement l’objection qui serait fondée sur le caractère interétatique de la coutume internationale. Les conventions, elles aussi, sont du droit interétatique, mais le fait que seuls les Etats qui les concluent sont liés par elles n’empêche nullement qu’elles puissent créer des droits au bénéfice des particuliers, ou des obligations à leur charge, preuve en soient les nombreuses décisions internes fondées sur l’application de dispositions de traités internationaux. On observera au demeurant que l’on admet que la coutume internationale puisse imposer des obligations à l’individu, comme en témoigne l’exemple bien connu de diverses règles du droit des conflits armés, dont la violation (crimes de guerre) par les membres des forces armées entraîne les responsabilités parallèles de l’auteur de l’infraction et de l’Etat dont il est l’organe.

  • 18 Les différentes thèses sont analysées dans les ouvrages de Bleckmann et Koller cités supra , note 16
  • 19 L’une des illustrations les plus frappantes est l’application directe, par les tribunaux américains (...)

25 Faut-il retenir une deuxième objection, déduite de la thèse que l’effet direct des normes conventionnelles résulte de la volonté des Etats qui concluent la convention, de sorte que toute analogie sur ce point entre le traité et la coutume serait exclue ? Il est vrai que la théorie subjective de l’application directe a connu une certaine faveur, et trouve encore aujourd’hui des défenseurs. On doit observer cependant que les critères objectifs sont apparus toujours plus nettement au premier plan 18 , et qu’un courant dominant de la doctrine, ainsi qu’une pratique jurisprudentielle qui va s’affirmant, admettent désormais l’effet direct dès que la norme invoquée, compte tenu de sa structure et de son objet, se prête, dans le contexte spécifique du cas d’espèce, à fonder une décision. Sans doute ne sommes-nous pas là en présence d’un phénomène général, mais il suffit qu’il soit assez répandu pour montrer que l’application directe d’une règle internationale d’origine conventionnelle, indépendamment de toute référence à la volonté des parties, est de plus en plus fréquente. 19

26 On ne voit aucun motif, ni de principe, ni de technique juridique, qui ne rendrait pas possible pour la règle coutumière ce qui l’est pour la disposition conventionnelle.

27 Encore faut-il que la coutume se prête à l’application directe. Peut-on trouver des indications dans la jurisprudence des tribunaux internes ? Elle est à vrai dire très disparate ; nous ne pouvons présenter ici que quelques observations générales, et l’on doit tout d’abord constater que dans de nombreux cas où le juge a recours à la coutume internationale, c’est soit pour trancher une question incidente, soit pour statuer sur un problème d’immunité de juridiction ou d’exécution, alors qu’en revanche l’effet direct proprement dit est plus difficile à identifier.

B. Les questions incidentes

20 Cf. Dubouis , loc. cit. , supra , note 1, p. 85.

28 On rencontre des décisions dans lesquelles le droit international général fait son apparition d’une manière incidente, par l’effet d’un renvoi de la règle interne, notamment lorsque celle-ci se réfère à une notion empruntée au droit des gens. 20 Mais il arrive aussi que le juge interne, s’il est en mesure de le faire compte tenu des limites assignées à son pouvoir, fasse appel à la coutume internationale afin de trancher une question incidente ou préalable qui doit être élucidée pour déterminer les règles applicables au litige.

21 On trouve de nombreux exemples dans les études citées supra , note 1.

29 Dans de tels cas, quand bien même il y a recours à la coutume, il n’y a pas lieu de constater d’effet direct, car le droit invoqué par le plaideur n’y trouve pas sa source. On peut donc se borner à donner quelques exemples. 21

  • 22 Une analyse des arrêts belges et suisses sur ces questions se trouve dans Salmon , loc. cit ., supra , (...)

30 L’Etat du for et un Etat étranger sont-ils liés par une Convention internationale, dont on demande ou conteste l’application au litige ? Il peut être nécessaire, pour trancher cette question, de se prononcer sur l’identité d’un Etat, sur la succession d’Etat, sur l’extinction du traité en raison de sa violation par une des Parties, ou du fait d’un changement fondamental de circonstances, ou du fait de la guerre. 22

23 Cf. Salmon , loc. cit ., supra , note 1, p. 235.

31 Un Etat est-il lié par les actes de son prédécesseur ? La question de la succession d’Etat peut surgir dans d’autres matières que celle des traités. 23

  • 24 Cf. Dominicé , loc. cit ., supra , note 1, p. 23. Voir aussi l’important arrêt de la Cour d’appel de P (...)

32 Lorsqu’une règle de conflit de lois renvoie au droit étranger, ou s’il s’agit d’apprécier un problème d’immunité de juridiction, il peut être nécessaire de constater l’existence d’un Etat étranger qui n’est pas reconnu par l’Etat du for. 24

33 En bref, ces quelques exemples, qui ne sauraient épuiser la matière, suffisent pour montrer que la coutume internationale apparaît dans les décisions du juge interne, mais que, sous l’angle de l’effet direct au bénéfice des particuliers, une partie substantielle des jurisprudences nationales ne peut fournir d’indications positives.

  • 25 Voir dans ce sens Weil , « Le contrôle par les tribunaux nationaux de la licéité internationale des (...)

34 Observons enfin qu’on qualifiera de question incidente celle de savoir si le droit étranger normalement applicable ne doit pas être écarté au motif qu’il est contraire au droit international. 25 Cette question est cependant liée à celle de l’effet direct, car si, plutôt que de faire appel à l’ordre public, le juge reconnaît à l’individu le droit d’invoquer la coutume internationale à l’appui de sa demande, il reconnaît du même coup que celle-ci produit des effets dans la personne du plaideur. Nous évoquerons ce problème plus loin.

C. Le cas particulier des immunités de juridiction

  • 26 Voir particulièrement la décision très longuement motivée du Tribunal constitutionnel fédéral allem (...)

35 L’immunité de juridiction (et d’exécution) des Etats, ainsi que les immunités des agents diplomatiques, ont fait l’objet de très nombreuses décisions judiciaires. 26 Bien souvent, le juge prend appui sur le droit international coutumier, quand bien même la situation varie d’un pays à l’autre, selon que le législateur est intervenu ou non en la matière.

36 Voici donc un domaine où, sans doute, la règle coutumière est appliquée par le juge, mais peut-on, pour autant, reconnaître qu’elle crée des droits dans la personne des individus ?

37 Tel n’est pas le cas en ce qui concerne l’immunité des Etats. Le seul effet de la règle est de soustraire à la compétence du juge des prétentions dirigées contre un Etat étranger. Si le juge estime que la règle internationale s’applique, il se déclare incompétent. Dans le cas contraire (notamment parce qu’il s’agit d’un acte iure gestionis ), il tranche le litige sur la base du droit interne applicable.

38 Quant aux immunités des agents diplomatiques, c’est bien à des personnes physiques qu’elles permettent d’échapper à l’intervention du juge de l’Etat accréditaire, mais elles le doivent à leur qualité d’organes étatiques, ainsi qu’en témoigne la possibilité pour l’Etat d’envoi de lever l’immunité ou d’y renoncer.

39 On doit en définitive se rendre à l’évidence qu’il y a bien application directe de la coutume, lorsque c’est sur elle que le juge fonde sa décision d’incompétence, mais que c’est au seul bénéfice de l’Etat, soit directement, soit indirectement en la personne de ses agents, et que le seul droit que confère la règle internationale est celui d’échapper à la compétence du juge.

40 Il faut donc bien reconnaître à la matière des immunités un caractère particulier.

D. Les effets directs

41 Les brèves observations qui précèdent montrent que le recours par le juge national à la coutume internationale n’implique pas que celle-ci produise des effets directs dans le chef des particuliers. Il serait même téméraire d’affirmer que cette thèse trouve un appui sérieux dans la jurisprudence, qui ne fournit à notre connaissance que quelques indications positives, et tend bien davantage, prise dans son ensemble, à justifier la thèse contraire.

  • 27 Dans ce sens Salmon , loc. cit. , supra , note 1, p. 194, qui reconnaît la coutume susceptible de prod (...)

42 Il nous paraît cependant que la question mérite d’être posée 27 , et c’est ce que nous voudrions suggérer, en limitant notre propos à quelques exemples.

28 Cf. supra , note 2, p. 199.

43 Il convient de rappeler que l’effet direct de la règle internationale est susceptible d’être reconnu, non pas seulement lorsqu’elle énonce de manière suffisamment précise et complète le droit de l’individu, mais aussi lorsqu’elle impose aux Etats une obligation, plus particulièrement une interdiction. Celle-ci peut avoir pour objet, parallèlement à la relation interétatique, une relation entre l’Etat et l’individu, de sorte qu’en vertu de l’effet direct ce dernier peut contester la validité, ou l’application au cas d’espèce, d’une mesure étatique contraire à cette interdiction. C’est du moins l’enseignement de la jurisprudence relative à l’effet direct des traités internationaux. 28

44 C’est dans cette perspective que l’on peut, en guise d’illustration, évoquer la matière du droit des étrangers, encore largement régie par le droit coutumier, malgré les nombreux traités d’établissement ou de protection des investissements qui ont été conclus.

45 Il s’agit bien entendu de règles interétatiques, dont la violation engendre une responsabilité internationale d’Etat à Etat. Cela n’exclut cependant pas qu’elles soient comprises comme conférant simultanément certains droits aux individus. Sans doute, dans l’ensemble des règles coutumières concernant le traitement des étrangers, il en est peu qui énoncent concrètement des droits. Elles exigent bien plutôt un certain résultat des Etats, que ceux-ci doivent réaliser par l’intermédiaire de leur droit interne, mais on peut précisément constater qu’elles s’analysent à certains égards comme constituant des interdictions (interdiction des mauvais traitements, de la détention sans procédure judiciaire, du déni de justice, de l’expropriation sans indemnité, etc.), de sorte qu’un juge interne pourrait, en vertu de la théorie de l’effet direct, refuser d’appliquer une mesure contraire à la coutume internationale, ou la modifier (s’il s’agit d’une décision judiciaire par exemple), ou ordonner une réparation.

  • 29 La règle de la liberté de navigation en haute mer, dont on doit se demander si elle produit des eff (...)
  • 30 Qu’il s’agisse de la conduite des opérations militaires, de l’occupation, du commerce neutre, par e (...)

46 Ces réflexions valent aussi pour d’autres domaines du droit des gens que le droit des étrangers, on peut penser par exemple au régime juridique des espaces « libres » 29 , ou au droit des conflits armés. 30

47 Pour cerner de plus près, par quelques exemples, le problème de l’effet direct, il convient d’opérer une distinction selon que la coutume internationale est invoquée par l’individu vis-à-vis de l’Etat du for ou à l’encontre d’un acte d’un Etat étranger pour le juge.

31 Salmon , loc. cit. , supra , note 1, p. 224.

48 (i) Dans le premier cas, on peut relever que c’est semble-t-il sur la base du droit international général que, dans une jurisprudence ancienne, les tribunaux belges ont admis les étrangers à ester en justice. 31 Cependant, il ne paraît pas que jusqu’ici l’on ait clairement reconnu l’effet direct de la coutume à l’encontre d’une mesure de l’Etat du for. Le principe de la suprématie de la loi y est pour beaucoup, le fait aussi que là où la coutume internationale se voit reconnaître une place privilégiée – nous pensons notamment à la République fédérale d’Allemagne – les garanties constitutionnelles et l’application de textes conventionnels (Convention européenne des droits de l’homme, traités d’établissement) suffisent à rendre inutile tout recours à la coutume.

49 Il demeure que, si l’occasion s’en présentait, on souhaiterait voir le juge interne consacrer le principe de primauté de la coutume internationale sur la mesure interne contraire. Cela paraîtrait d’autant plus justifié que la règle de l’épuisement préalable des recours internes – condition de la responsabilité internationale pour atteinte aux droits des étrangers – est précisément destinée à permettre aux juridictions nationales d’assurer l’harmonie entre le comportement de l’Etat et ses obligations internationales.

  • 32 Arrêt du 22 octobre 1962, cf. Lucchini , « Un aspect des mesures de surveillance maritime au cours d (...)

50 Pour évoquer brièvement un autre domaine que celui du droit des étrangers, rappelons la question soulevée à l’occasion de l’arraisonnement en haute mer, par la marine française, du cargo italien Duizar . La société propriétaire fit grief à la France d’avoir transgressé le principe de la liberté de la haute mer, en se référant à la coutume, puisque la Convention de Genève de 1958 sur la haute mer n’était pas en vigueur lorsque les faits se sont produits. Le Tribunal administratif de Paris 32 se déclara incompétent pour connaître des mesures se rattachant « aux rapports internationaux de l’Etat français avec les autres puissances ». La question n’en demeure pas moins posée de savoir si une règle comme celle qui était invoquée – et le problème subsiste en ce qui concerne le droit conventionnel actuellement en vigueur – engendre droits et devoirs dans la seule personne des Etats, ou si l’on ne doit pas admettre qu’elle crée également des droits pour les particuliers, susceptibles d’être reconnus comme tels par le juge, s’il en a le pouvoir, ou même le devoir lorsque la Constitution l’oblige à assurer le respect du droit international général.

  • 33 Nous évoquons ce problème uniquement sous l’angle de l’effet direct du droit international général. (...)

51 Dans les rapports entre l’individu et l’Etat du for, rien ne nous paraît donc s’opposer, sinon les injonctions du droit interne ou la timidité des juges, à l’application directe de la coutume internationale, pour autant bien entendu, il convient de le souligner encore, que la règle invoquée, en raison de son objet, soit de nature à créer des droits dans le chef des particuliers. Les règles relatives à la souveraineté territoriale, par exemple, n’ont pas ce caractère, car on n’imagine pas un droit de souveraineté de l’individu, de sorte que celui qui est traduit devant un tribunal à la suite de la violation de la souveraineté d’un Etat étranger ne peut déduire aucun droit de cette circonstance. 33 Il faudrait une coutume spécifique, disant en substance « male captus male detentus » , pour que puisse être défendue la thèse de l’effet direct. Sur ce point, la pratique internationale va dans l’autre sens.

  • 34 Voir notamment les études de Mann , loc. cit. , supra , note 1, et de Weil , « Le contrôle par les trib (...)

52 (ii) Quant au problème des éventuels effets directs de la coutume internationale lorsque le justiciable fait grief à un Etat étranger à celui du for d’en avoir méconnu les termes, il est particulièrement délicat. Il constitue l’un des aspects parmi d’autres du problème du contrôle par le juge interne de la licéité internationale des actes des Etats étrangers, qu’il ne s’agit pas d’aborder ici dans toute son ampleur. 34 Nous voulons uniquement mettre en lumière quelques points de repère suggérés par la jurisprudence, en limitant de surcroît notre propos à un seul exemple, celui des expropriations.

  • 35 Pour un résumé des diverses solutions, voir l’étude de Weil mentionnée dans la note précédente et l (...)
  • 36 Cf. la très ferme jurisprudence française, Weil , loc. cit. , supra , note 34, pp. 22-23. C’est égalem (...)
  • 37 Arrêt de la Cour suprême d’Aden du 9 janvier 1953, 20 ILR , p.  316 (« […] following international la (...)
  • 38 Cf. 33 ILR , pp. 30 et 40, p. 7 : il fut jugé que le Gouvernement indonésien avait violé le droit in (...)
  • 39 On se rappelle que dans ce cas célèbre le premier juge avait reconnu aux anciens propriétaires d’un (...)

53 On sait que la question des expropriations étrangères a été soumise au juge interne, dans la plupart des cas, lorsqu’un bien, ou le produit de sa vente, se trouve dans l’Etat du for et fait l’objet de revendications contradictoires, dont celle du propriétaire dont les biens ont été visés par la mesure d’expropriation. Si, par le jeu normal des règles de conflit, la mesure d’expropriation n’est pas applicable au bien en litige, le problème de la licéité internationale ne se pose pas. En revanche, ce problème se pose si la loi de l’Etat expropriant est en principe celle qui doit être appliquée : tel est le cas si le bien en litige se trouve sur le territoire de l’Etat qui procède à l’expropriation au moment où celle-ci est ordonnée. Si, par la suite, ce même bien – ce qui se présente particulièrement pour les « produits chauds » – est exporté dans l’Etat du for, ou si le produit de sa vente s’y trouve, le propriétaire dépossédé peut-il récupérer son bien ou obtenir le versement du produit de sa vente ? Comme le montre une importante jurisprudence, la réponse est négative si l’on s’en tient au principe de territorialité, ou à la doctrine de l’ Act of State , en vertu de laquelle le juge ne doit pas s’ériger en censeur des actes d’un gouvernement étranger. Elle est positive si le juge estime devoir considérer comme nul, ou en tout cas comme dépourvu de tout effet pour lui, l’acte d’expropriation. 35 Mais quel est alors le motif sur lequel il se fonde ? On sait que c’est bien souvent l’ordre public plutôt que la violation du droit international 36 , mais on rencontre néanmoins des arrêts – et c’est ce qui nous intéresse ici – qui se réclament expressément du droit international coutumier. C’est le cas notamment dans l’affaire du Rose Mary 37 , dans les arrêts néerlandais relatifs aux nationalisations indonésiennes 38 , dans l’affaire Sabbatino . 39

  • 40 Que le motif déterminant soit bien la violation du droit international est attesté, aux Etats-Unis, (...)
  • 41 L’ordre public permet de protéger également les nationaux de l’Etat étranger, cf. Mann , loc. cit. , (...)

54 Dans ces décisions, il y a, nous semble-t-il, une illustration de l’effet direct de la coutume internationale, dès lors que c’est en invoquant la violation de celle-ci à son préjudice que l’individu obtient que soient tenus pour nuls des actes étrangers le concernant. 40 Il est vrai que le même résultat peut être obtenu par le truchement de l’ordre public, ce qui peut rendre la question quelque peu académique. 41

  • 42 Voir les étapes successives de cette affaire dans 62 AJIL , 1968, p. 182 ; 65 AJIL , 1971, p. 195 et (...)

55 Le doute n’est en tout cas plus permis lorsque la victime de l’expropriation se voit reconnaître un droit, alors que ni le bien saisi ni le produit de sa vente ne se trouvent dans l’Etat du for. Dans l’affaire de la First National City Bank , la banque américaine, consécutivement à la liquidation d’une opération de crédit garantie par nantissement, se trouvait en possession d’une somme qu’elle devait restituer à la Banque nationale de Cuba. Elle s’y refusa en invoquant la confiscation de ses succursales cubaines, ce dont elle déduisait un droit à réparation qu’elle entendait exercer, partiellement à tout le moins, en conservant la somme litigieuse. Elle obtint gain de cause. 42

  • 43 Cf. Loewenfeld , « Does Failure to Pay Compensation for Expropriated Property Come Within the Act of (...)

56 Il ne suffisait pas ici, comme dans les cas usuels du type Sabbatino , de refuser tout effet à des mesures confiscatoires. Il fallait justifier l’existence d’une créance ou d’une prétention susceptible d’être satisfaite, partiellement à tout le moins, au moyen de la somme que, dans le cadre de ses opérations commerciales, la banque devait au gouvernement cubain. Cette prétention résultant de la nationalisation des succursales ne pouvait être fondée que sur le droit international. C’est bien ce qui a été reconnu. 43 L’ordre public n’est d’aucun secours dans un cas de ce genre.

  • 44 Il faut reconnaître que les circonstances se prêteront rarement à la satisfaction de la prétention (...)

57 Ainsi donc, en admettant l’effet direct d’une règle du droit international coutumier, on peut reconnaître l’existence d’une prétention (claim) dans la personne de l’individu, personne physique ou morale du droit interne. Il est bien évident que cela ne fait pas disparaître le droit de l’Etat à obtenir réparation, consacré par le droit international. Il y a bien plutôt deux prétentions parallèles, dont chacune s’éteint par la satisfaction de l’autre. Si l’Etat, par la voie arbitrale ou par un accord (qui peut être un accord d’indemnisation forfaitaire), dispose de sa prétention, celle de l’individu disparaît. Cependant, tant qu’aucun règlement interétatique n’est intervenu, la prétention individuelle existe et peut être sanctionnée par le juge interne, si les circonstances s’y prêtent. 44

  • 45 Voir par exemple le problème des naturalisations forcées évoqué par Mann , loc. cit. , supra , note 1, (...)

58 D’autres aspects du droit des étrangers que celui des confiscations, et d’autres domaines du droit des gens, mériteraient d’être examinés sous l’angle de l’effet direct de la coutume internationale, et de l’éventuelle prétention que l’individu pourrait tirer de sa violation lorsque la règle coutumière produit des effets directs. 45

IV. OBSERVATIONS FINALES

59 Le problème évoqué dans cette étude n’a été abordé que de manière partielle et incomplète. Plusieurs questions sont restées dans l’ombre. Les quelques observations qui ont été faites permettent néanmoins d’affirmer que le droit international coutumier est susceptible de se voir reconnaître des effets directs au bénéfice des particuliers, lorsqu’il s’agit d’une norme qui, tout en régissant des rapports entre Etats, est également apte à régir la situation juridique des individus. Nous sommes même tenté de dire que certaines coutumes ont vocation à l’application directe.

60 Cela ne signifie pas, bien entendu, que le juge national soit tenu de reconnaître ces effets directs, sauf si son droit interne le lui enjoint. Aussi bien peut-on se demander s’il est opportun qu’il s’engage dans cette voie.

61 On pourrait le contester en soulignant le caractère parfois incertain de la coutume internationale. C’est un problème que le juge international rencontre lorsqu’il s’agit pour lui de se prononcer sur l’existence et la teneur d’une règle non écrite. C’est une démarche dont le juge interne devrait également être capable, tout en faisant preuve d’une certaine prudence, mais sans redouter d’appliquer une coutume bien établie.

46 Cf. Weil , loc. cit. , supra , note 25, p. 36.

62 Quant au débat principal, qui est de savoir si les affaires extérieures doivent rester du ressort exclusif des autorités politiques, il est largement ouvert. L’unanimité ne se fera pas de sitôt. 46

63 S’il s’agit pour le juge de faire application de la coutume dans les rapports entre l’individu et l’Etat du for, on ne voit pas quels inconvénients majeurs devraient en résulter. La révérence systématique devant le fait du prince n’est pas nécessairement bonne politique judiciaire.

64 S’il s’agit de censurer les actes d’un Etat étranger, y a-t-il vraiment péril pour la conduite des relations diplomatiques ? Les droits du justiciable ne méritent-ils pas une égale considération ? Ce sont des questions que le juge ne devrait pas esquiver. Il doit se les poser, et l’on peut souhaiter qu’il leur donne une réponse inspirée de considérations de justice et non d’opportunité.

1 Pour une analyse des jurisprudences nationales, voir notamment : Dubouis , « L’application du droit international coutumier par le juge français », in Reuter et al. , L’Application du droit international par le juge français , 1972, p. 75 ; Salmon , « Le rôle de la Cour de cassation belge à l’égard de la coutume internationale », Miscellanea Ganshof van der Meersch , tome I,1972, p. 217 ; Dominicé , « Le droit international coutumier dans l’ordre juridique suisse », Mémoires de la Faculté de droit de Genève , n o  27, 1969, p. 11 ; Geiger , « Zur Lehre vom Völkergewohnheitsrecht in der Rechtsprechung des Bundesverfassungsgerichts », Archiv des öffentlichen Rechts , 103, 1978, p. 382 ; Rudolf , Völkerrecht und deutches Recht , 1967 ; Erades et Gouldes , The Relation between International Law and Municipal Law in the Netherlands and in the United Stales , 1961 ; Mann , ’The Consequences of an International Wrong in International Law and National Law », 48 BYIL , 1976-77, p. 1 ; Mosler , « L’application du droit international public par les tribunaux nationaux », RCADI , vol. 91, 1957-I, p. 619.

2 Sur cette nécessaire distinction Bleckmann , Begriff und Kriterien der innerstaatlichen Anwendbarkeit völkerrechtlicher Verträge , 1970, p. 57 et les auteurs cités.

3 Voir cependant la décision du Tribunal fédéral suisse relative au chiffre 5 d’une décision de l’OECE : « Pour pouvoir créer un droit […] la disposition du chiffre 5 doit être obligatoire sur le plan international et valable sur le plan interne ; de plus elle doit être immédiatement applicable » ( ATF 100 b 226, extraits dans ASDI , XXXI, 1975, p. 208).

4 Bien entendu, une troisième question se présente, celle du rang, dans l’ordre interne, de la disposition conventionnelle, qui cependant ne surgit qu’en cas de conflit entre cette disposition et une règle du droit interne.

5 Pour une analyse comparative des systèmes nationaux, voir Wildhaber , Treaty-Making Power and Constitution , 1971, p. 190 ss.

6 Autre est la question de savoir si les Etats parties à un traité ont l’obligation de lui assurer validité interne. Cette obligation ne peut résulter que du traité lui-même, et c’est ainsi qu’elle est prescrite, par exemple, par le Traité instituant la Communauté économique européenne – qui prescrit en outre que le droit communautaire doit l’emporter sur le droit national – mais non pas la Convention européenne des droits de l’homme.

7 La question de savoir si un traité est applicable dépend dans une large mesure, sans doute, du droit interne qui constitue la « structure d’accueil », cf. Bleckmann , op. cit. , supra , note 2, p. 138 ss. Ce que nous voulons dire ici, c’est qu’il convient d’interpréter la norme pour déterminer les relations qu’elle régit ; cette interprétation relève du droit international.

8 Cela peut dépendre de la nature de la demande formulée en justice ; on peut citer l’exemple de certaines dispositions des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, cf. Dominicé , « La Convention européenne des droits de l’homme devant le juge national », ASDI , XXVIII, 1972, p. 9, ad p. 24.

9 C’est principalement en République fédérale d’Allemagne qu’est fermement ancrée la théorie de la transformation, bien qu’elle soit parfois contestée dans la doctrine, cf. Bleckmann , Grundgesetz und Völkerrecht , 1975, p. 291.

10 C’est en 1765 que Blackstone résuma l’enseignement de la jurisprudence : « The law of nations (whenever any question arises which is properly the object of its jurisdiction) is here adopted in its full extent by the common law of the land » (cité par Mann , loc. cit. , supra , note 1, p. 17). La Cour suprême des Etats-Unis consacra le même principe dès les premières années de son existence, cf. Bourguignon , « Incorporation of the Law of Nations during the American Revolution – The Case of the San Antonio », 71 AJIL , 1977, p. 270.

11 Cf. par exemple Salmon , loc. cit. , supra , note 1, p. 220, pour la Belgique, et Dominicé , dans l’étude citée supra , note 1, p. 194, pour la Suisse.

12 Article 25 de la loi fondamentale allemande ; article 10 (1) de la Constitution italienne ; article 9 de la Constitution autrichienne ; voir aussi le préambule de la Constitution française de 1946, auquel renvoie celui de la Constitution de 1958. Cf. de Visscher , « Les tendances internationales des Constitutions modernes », RCADI , vol. 80, 1952-I, p. 511.

13 Article 25 de la loi fondamentale allemande, cf. Bleckmann , Grundgesetz und V ö lkerrecht , 1975, p. 293. Le problème se pose en France pour le Conseil constitutionnel, cf. Favoreu , « Le Conseil constitutionnel et le droit international », AFDI , XXIII, 1977, p. 95.

15 Tel est le cas du juge administratif français, cf. Gervais , « Constatations et réflexions sur l’attitude du juge administratif français à l’égard du droit international », AFDI , XI, 1965, p. 3, ad p. 20.

16 Dans l’abondante littérature, on peut citer les deux ouvrages de Bleckmann , Begriff und Kriterien der innerstaatlichen Anwendbarkeit völkerrechtlicher Verträge , 1970, et Koller , Die unmittelbare Anwendbarkeit völkerrechtlicher Verträge , 1971.

17 Cela fut mis particulièrement en lumière par le fameux arrêt van Gend en Loos de la Cour de Justice des Communautés européennes ( Recueil , vol. 9, p. 1).

18 Les différentes thèses sont analysées dans les ouvrages de Bleckmann et Koller cités supra , note 16.

19 L’une des illustrations les plus frappantes est l’application directe, par les tribunaux américains notamment, de dispositions de l’Accord général GATT, cf. l’une des récentes décisions résumée dans 72 AJIL , 1978, p. 415.

22 Une analyse des arrêts belges et suisses sur ces questions se trouve dans Salmon , loc. cit ., supra , note 1, p. 233 ss ; et Dominicé , loc. cit. , supra , note 1, p. 23. Pour l’extinction des traités du fait de la guerre, voir aussi les récentes décisions américaines citées dans 71 AJIL , 1977, pp. 357 et 791.

24 Cf. Dominicé , loc. cit ., supra , note 1, p. 23. Voir aussi l’important arrêt de la Cour d’appel de Paris du 7 juin 1969, AFDI , XVI, 1970, p. 931.

25 Voir dans ce sens Weil , « Le contrôle par les tribunaux nationaux de la licéité internationale des actes des Etats étrangers », AFDI , XXIII, 1977, p. 9, ad. p. 16.

26 Voir particulièrement la décision très longuement motivée du Tribunal constitutionnel fédéral allemand du 13 décembre 1977, Zeitschrift für ausländisches öffentliches Recht und Völkerrecht , 38, 1978, p. 242.

27 Dans ce sens Salmon , loc. cit. , supra , note 1, p. 194, qui reconnaît la coutume susceptible de produire des effets directs.

29 La règle de la liberté de navigation en haute mer, dont on doit se demander si elle produit des effets directs au bénéfice des particuliers, s’analyse notamment comme une interdiction faite aux Etats d’arraisonner des navires étrangers, sauf exceptions prévues par le droit des gens.

30 Qu’il s’agisse de la conduite des opérations militaires, de l’occupation, du commerce neutre, par exemple, on rencontre maintes règles qui constituent des prohibitions. Il y a de bonnes raisons de penser que leur violation engendre des prétentions dans le chef des particuliers, cf. par exemple dans ce sens l’interprétation donnée à un arrêt du Tribunal fédéral allemand par Seidl-Hohenveldern , Individual Rights and the State in Foreign Affairs (ouvrage collectif), 1977, p. 252.

32 Arrêt du 22 octobre 1962, cf. Lucchini , « Un aspect des mesures de surveillance maritime au cours des opérations d’Algérie », AFDI , VIII, 1962, p. 920.

33 Nous évoquons ce problème uniquement sous l’angle de l’effet direct du droit international général. La question reste ouverte de savoir si en vertu d’une autre construction juridique l’Etat devrait relaxer le détenu. Cf. les causes célèbres Eichmann , 36 ILR , p. 5, et Argoud , AFDI , XI, 1965, p. 935.

34 Voir notamment les études de Mann , loc. cit. , supra , note 1, et de Weil , « Le contrôle par les tribunaux nationaux de la licéité internationale des actes des Etats étrangers », AFDI , XXIII, 1977, p. 9.

35 Pour un résumé des diverses solutions, voir l’étude de Weil mentionnée dans la note précédente et les références citées.

36 Cf. la très ferme jurisprudence française, Weil , loc. cit. , supra , note 34, pp. 22-23. C’est également la doctrine de l’ordre public qui est retenue en République fédérale d’Allemagne, mais avec l’exigence d’un lien suffisant avec celle-ci (voir l’affaire du cuivre chilien jugée par le Tribunal de Hambourg, 12 ILM , 1973, p. 251).

37 Arrêt de la Cour suprême d’Aden du 9 janvier 1953, 20 ILR , p.  316 (« […] following international law as incorporated in the domestic law of Aden this court must refuse validity to the Persian Oil Nationalisation Law […] ». La référence à l’incorporation signifie simplement que le droit international général a validité pour le juge). Les tribunaux italiens appliquèrent également le droit international général aux litiges concernant le pétrole iranien, tout en jugeant qu’il n’avait pas été transgressé car une indemnisation était prévue par la loi de nationalisation. Cf. 22 ILR , pp. 19 et 23.

38 Cf. 33 ILR , pp. 30 et 40, p. 7 : il fut jugé que le Gouvernement indonésien avait violé le droit international en nationalisant sans indemnité les filiales d’une société hollandaise, ce qui entraînait l’invalidité des mesures prises.

39 On se rappelle que dans ce cas célèbre le premier juge avait reconnu aux anciens propriétaires d’une cargaison de sucre expropriée à Cuba le droit d’obtenir le versement de la somme due par un tiers pour l’achat ultérieur de ce sucre. Les décrets cubains furent jugés invalides car contraires au droit international (55 AJIL , 1961, p. 741). Confirmée en appel (56 AJIL , 1962, p. 1085), cette décision fut cassée par la Cour Suprême, qui s’en tint à la doctrine de l’ Act of State (58 AJIL , 1964, p. 779). Par la suite, à la faveur d’un amendement législatif, le cas devait trouver une solution conforme à la décision du premier juge (60 AJIL , 1966, p. 107 ; et 62 AJIL , 1968, p. 165).

40 Que le motif déterminant soit bien la violation du droit international est attesté, aux Etats-Unis, par l’affaire Dunhill , 15 ILM , 1976, p. 735 : s’agissant de propriétaires cubains, les effets des mesures prises à Cuba à l’égard des biens se trouvant dans ce pays au moment de la confiscation ne furent pas invalidés.

41 L’ordre public permet de protéger également les nationaux de l’Etat étranger, cf. Mann , loc. cit. , supra , note 1, p. 28.

42 Voir les étapes successives de cette affaire dans 62 AJIL , 1968, p. 182 ; 65 AJIL , 1971, p. 195 et p. 812 ; 66 AJIL , 1972, p. 856 ; 68 AJIL , 1974, p. 130.

43 Cf. Loewenfeld , « Does Failure to Pay Compensation for Expropriated Property Come Within the Act of State Doctrine ? », 66 AJIL , 1972, p. 823.

44 Il faut reconnaître que les circonstances se prêteront rarement à la satisfaction de la prétention de l’individu. Il faut que l’Etat étranger soit titulaire, dans l’Etat du for, d’une créance liée à une activité commerciale, mais il faut en outre que la prétention de l’individu, pour ne pas se heurter à l’immunité de juridiction de l’Etat étranger, puisse être présentée sous forme d’action reconventionnelle. C’est du moins une question qu’il conviendrait d’analyser plus en détail.

45 Voir par exemple le problème des naturalisations forcées évoqué par Mann , loc. cit. , supra , note 1, p. 39.

Notes de fin

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Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0 . Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

L’individu, la coutume internationale et le juge national1

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Chapitre 3 : La formation du droit international public

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L’article 38 du Statut de la CIJ énumère les différentes sources que la Cour va appliquer pour régler les différends qui lui sont soumis : > les conventions internationales (générales ou spéciales) > la coutume internationale > les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées (expression vieillie) > les décisions judiciaires et la doctrine des publicistes les plus qualifiés des différentes nations

Pour les positivistes, le droit n’existe que par la volonté des États.

On remarque que sont absents : > les actes unilatéraux des États > les actes unilatéraux des organisations internationales (ex : décisions de l’AGNU / du Conseil de sécurité ; ex : directives et règlements de l’UE)

La CIJ est tenue de les appliquer.

Il existe aussi des instruments dépourvus de force obligatoire (ex : actes concertés non conventionnels).

A – Les traités internationaux

1) les actes unilatéraux des états, 2) les actes unilatéraux des organisations internationales, a – la coutume internationale, b – les principes généraux du droit, i – la codification du droit international public, ii – la fragmentation du droit international public, a – les normes erga omnes (applicables à tous les états), b – les normes impératives, section 1 : les modes de formation du droit international public, i – le mode volontaire de formation du droit international public.

Les sources du droit international qui sont issues de ce mode de formation volontaire sont celles qui émanent directement de la volonté des États / qui découlent d’un processus conscient de création du droit.

Cela implique pour les États de manifester leur volonté à s’engager juridiquement.

Le mode volontaire de formation du droit international public regroupe les traités et les actes unilatéraux.

Les traités sont la source la plus formalisée et utilisée du droit international. Ils peuvent aussi être nommés “convention”, “protocole”, “pacte”… Ils sont la source la plus formalisée et utilisée du droit international.

Article 2 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 : un traité est un accord international conclu par écrit et régi par le droit international.

La technique du bilatéralisme, issue du système westphalien, a longtemps été la norme. La technique multilatérale apparaît au Congrès de Vienne de 1815 qui institue le concert européen en établissant les droits et obligations respectives de tous les États parties.

La Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, négociée pour approuvée à l’unanimité en décembre 1948 par l’AGNU, illustre cette évolution de la portée des traités.

On relève aussi un développement de l’objet des traités, qui dans les premiers temps du droit international n’avaient pour objet que de renforcer la coopération entre les États.

Le traité est un accord de volonté entre sujets du droit international. Il est l’expression de la volonté concordante des États. 💡 “sujets du droit international” = pas uniquement les États → une organisation internationale peut également conclure un traité

La Cour internationale de justice a affirmé qu’un État ne peut pas, dans ses rapports conventionnels, être lié sans son consentement. → incarnation de la doctrine positiviste volontariste

Ce consentement doit être conclu par écrit. La signature indique que le texte est devenu définitif, mais la ratification est importante. C’est la ratification qui manifeste la volonté définitive de l’État d’être lié par le traité.

La procédure de ratification est propre au droit interne de chaque État, qui va en définir les modalités. En France, la procédure de ratification est définie par les articles 52 et 53 de la Constitution.

Un traité international est porteur d’effets juridiques. Il crée des droits et des obligations internationales. L’article 26 de la Convention de Vienne pose le principe pacte sunt servanda (”tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi”). → principe d’effet relatif : un traité ne lie que les parties

Il faut distinguer les traités des actes concertés non conventionnels (exemples : communiqués publiés à l’issue du G7/G20 ; textes issus de conférences internationales pour officialiser l’issue d’une discussion ; etc.).

Le droit international prévoit la possibilité d’adopter des réserves.

B – Les actes unilatéraux

Les actes unilatéraux sont adoptés par les États ou les organisations internationales. Ils constituent un autre mode de formation volontaire de droit international, en permettant de créer des normes et situations juridiques opposables aux tiers sous réserve de certaines conditions établies par le droit international.

Les États peuvent faire valoir leurs intérêts de manière unilatérale dans l’ordre juridique international, par exemple pour prendre position à l’égard d’une situation de faits, pour affirmer qu’ils sont en position d’un droit… Ces actes vont aussi produire des effets juridiques.

On distingue 3 catégories d’actes unilatéraux :

  • Les actes unilatéraux qui ont trait à l’exercice de droits souverains : ils sont pris dans l’ordre juridique interne afin d’exercer des compétences conférées par le droit international aux États. Exemples : délimitation des eaux territoriales ou de la ZEE, attribution de sa nationalité à une personne physique ou morale, immatriculation d’un navire ou d’un aéronef, déclaration d’embargo ou de guerre… Ces actes, qui ont trait à l’exercice de ces droits souverains, permettent à l’État de revendiquer unilatéralement ces droits. Ils prennent le plus souvent la forme d’une loi ou d’un règlement interne, dont la validité dépend de leur conformité au droit international.
  • Les actes unilatéraux qui ont trait à l’opposabilité d’une situation juridique : ils sont pris dans l’hypothèse où l’État proteste ou reconnaît la validité d’une situation porteuse d’effets juridiques. Exemple : pratique de la reconnaissance de l’État : lorsqu’un État reconnaît l’existence d’un autre, cette reconnaissance lui est opposable.
  • Les actes unilatéraux qui ont trait à la création d’engagements juridiques : ils sont pris par l’État dans l’objectif de renoncer à l’exercice d’un droit, ou pour créer une obligation à son égard. On peut parler de “promesse unilatérale” : l’État s’engage à faire ou ne pas faire. Exemple : dans l’affaire des essais nucléaires opposant la France à l’Australie devant la CIJ, la France a renoncé par une déclaration à poursuivre ses essais nucléaires dans l’atmosphère.

On distingue :

  • Les actes qui ont pour fonction la régulation interne de l’organisation internationale : on parle d’ actes autonormateurs ;
  • Les actes qui visent à réguler le comportement des États membres : on parle d’ actes hétéronormateurs .

Dans la grande majorité des cas, les organes des organisations internationales ont simplement un pouvoir de recommandation. Le Conseil de sécurité de l’ONU peut néanmoins adopter des résolutions obligatoires pour les membres de l’organisation, au titre de l’article 35 de la Charte des Nations Unies.

L’article 289 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) prévoit 3 types d’actes unilatéraux obligatoires : les règlements, les directives et les décisions du Parlement européen. Il mentionne également les avis et les recommandations, qui sont des actes unilatéraux mais qui ne créent aucun droit ni obligation pour leurs destinataires.

II – Le mode spontané de formation du droit international public

Dans le mode volontaire de formation du droit international, les normes internationales naissent d’une manifestation expresse de la volonté des États et/ou des organisations internationales. ≠ Dans le mode spontané de formation du droit international, les normes internationales naissent d’un processus empirique fondé sur les répercussions des comportements des membres de la communauté internationale convaincus de respecter une norme. → pas formalisées dans un écrit

La difficulté est de les identifier, puisqu’il s’agit de droit non écrit. Le processus par lequel se forme la norme internationale est invisible.

La coutume a longtemps été la source principale du droit international. Exemple : liberté en haute mer, immunité diplomatique…

La coutume s’applique à l’ensemble des membres de la communauté internationale : elle a une portée erga omnes (et non inter partes comme les traités).

Il y a une controverse doctrinale sur le fondement de la coutume internationale :

  • Selon l’ interprétation volontariste , la coutume est le reflet d’un accord tacite ; elle s’impose donc aux États. Elle est une sorte de “traité implicite” entre États. Cette interprétation a été consacrée dans l’affaire du Lotus de 1927, dans laquelle la CPJI rappelle le fondement volontariste du droit international. Elle est aujourd’hui remise en cause par l’interprétation objectiviste, qui défend le fondement spontané du droit coutumier :
  • Selon l’ interprétation objectiviste , la coutume est avant tout un phénomène sociologique dicté par des nécessités sociales.

Les approches convergent sur ce qu’est la coutume. Les éléments constitutifs de la coutume sont :

Cet élément objectif et matériel est plus simple à démontrer que l’élément subjectif :

  • Un élément subjectif ou psychologique : renvoie à l’acceptation par les États de cette pratique comme étant du droit ( opinio juris ).

Les sources spontanées du droit international laissent une grande place à l’interprétation, notamment du juge. Souvent, en cas de différend, lorsque les États invoquent la violation d’une règle coutumière, le juge doit rechercher si cette coutume existe.

La coutume, à la différence des traités, oblige l’intégralité des États, sans qu’ils n’aient activement participé à sa conception.

La théorie de l’objecteur persistant affirme que seul un État qui n’aurait cessé de s’opposer à l’émergence d’une règle coutumière peut se voir dispensé de l’appliquer.

Le statut de la CIJ fait référence aux “principes généraux du droit reconnus par les nations civilisées”, qui constituent une source distincte de la coutume. Ils sont mobilisés par le juge international lorsque la solution au litige ne peut pas être trouvée dans une coutume ou un traité.

Les principes généraux du droit sont des principes communs aux ordres juridiques de droit interne. Tous les États n’ont pas les mêmes traditions juridiques, mais ils ont des principes communs que l’on peut internationaliser. Exemple : principes en matière de responsabilité internationale.

Les principes généraux du droit international sont des principes qui sont propres à l’ordre juridique international. Ce sont généralement des principes abstraits desquels découlent des normes internationales plus précises, qui pourront être formalisées dans des traités ou donner lieu à l’émergence de règles coutumières.

Ces principes généraux sont par définition abstraits. Ils guident le comportement des États et s’appliquent en l’absence de règles internationales plus précises.

Section 2 : Les dynamiques de formation du droit international public

Le processus de codification consiste en le passage d’un droit non écrit à un droit écrit. De nombreuses normes coutumières se sont vues être codifiées dans des conventions internationales.

La codification a certains avantages : > elle rend le droit international plus intelligible ; > elle permet de garantir la sécurité juridique, en figeant le droit international.

C’est la Commission du droit international qui est en charge de la codification des normes coutumières. Elle est composée de 34 experts à la compétence reconnue. On peut noter son Projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite (2001) .

On constate une dynamique de fragmentation qui concerne les normes du droit international (et non les sources), en raison d’un mouvement de spécialisation croissant du droit international.

Difficulté : certaines règles peuvent entrer en contradiction. Par exemple, les règles relatives à la libéralisation des échanges internationaux (dans le cadre de l’OMC) sont-elles compatibles avec les règles relatives à l’environnement ? Un État pourrait-il interdire l’entrée de produits fabriqués dans un État tiers au motif qu’ils sont dommageables pour l’environnement ?

La Commission du droit international a proposé une solution fondée sur la Convention de Vienne sur le droit des traités (1969) : la règle spéciale s’applique en priorité sur la règle générale. + quand 2 règles contradictoires dans 2 traités sont toutes les 2 des règles spéciales, la règle postérieure s’applique en priorité.

Cette solution ne s’applique que sur les traités auxquels les mêmes États sont parties, elle est donc insuffisante. Pour la Commission du droit international, il est nécessaire d’établir une hiérarchie des normes. Cette hiérarchie des normes ne semble cependant pas envisageable dans le droit international, en raison de l’équivalence des sources.

III – L’objectivisation du droit international public

Le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire ont donné naissance à des normes qui doivent être respectées par tous les États. Ce concept a été reconnu par la Cour internationale de justice, lors de sa décision dans l’affaire Barcelona Traction opposant en 1970 la Belgique à l’Espagne. Exemple : l’interdiction de commettre un crime d’agression ou un génocide.

À la suite de la Seconde Guerre mondiale, l’article 53 de de la Convention de Vienne sur les traités mentionne l’existence de normes impératives. L’apparition de ces normes impératives remet en cause l’équivalence normative en instaurant une hiérarchie entre normes impératives et normes classiques.

Comment définir quelles normes sont impératives ? Il n’existe pas de liste de normes impératives, mais seulement quelques exemples : l’interdiction du recours à la force, l’auto-détermination des peuples, le caractère sacré de la personne humaine…

Les États ont refusé de consacrer ces normes impératives, laissant le soin aux juridictions internationales de déterminer le contenu de cette notion. La CIJ a longtemps refusé d’admettre leur existence, avant de consacrer cette notion en 2006 dans l’ affaire des activités armées sur le territoire du Congo , en affirmant que l’interdiction du génocide est une norme impérative. La CIJ ne tire cependant aucune conséquence juridique de cette qualification de norme impérative, parce qu’elle a un rôle juridictionnel, et non politique. → elle ne souhaite pas entrer dans une logique de hiérarchisation, pour éviter les critiques des États

Si la notion de norme impérative participe au phénomène d’objectivisation du droit international public, elle n’a pas remplacé sa logique horizontale et intersubjective.

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  • Assemblée générale
  • Sixième Commission

La détermination du droit international coutumier entre « clarté » et « incertitude » devant la Sixième Commission

La détermination du droit international coutumier a été l’un des principaux axes de discussion de la Sixième Commission, chargée des affaires juridiques, au troisième jour d’examen des premiers chapitres thématiques du rapport* annuel de la Commission du droit international (CDI), les délégations estimant que ce rapport ne dissipe pas les « incertitudes » sur ce sujet.  Lors de cette séance très technique, de nombreux pays ont aussi salué l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI.

Le rapport de la CDI contient 16 projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, sujet crucial, puisque la coutume est, avec les traités, l’une des deux sources essentielles du droit international.  Ces deux sources entretiennent d’ailleurs « une relation complexe et interactive », selon l’expression du délégué de Sri Lanka.  Son homologue de l’Afrique du Sud a en outre noté que le droit international coutumier est de plus en plus souvent invoqué devant les tribunaux, y voyant là la preuve que le droit international n’est pas le « domaine réservé » de quelques-uns.

Entrant dans les détails, le délégué de Sri Lanka a estimé que le projet de conclusion 11 qui établit dans quelle mesure une règle conventionnelle peut refléter une règle de droit international coutumier est une disposition « vitale » qui jette une certaine « clarté » sur cette relation.  Ce projet de conclusion sera d’une aide précieuse pour les praticiens afin de dissiper les ambiguïtés, a-t-il déclaré.

Même son de cloche du côté de la Fédération de Russie, dont la représentante a estimé que ces projets de conclusion tombent « à point nommé » afin de contrer la tendance à conclure à l’existence d’une norme de droit coutumier suivant la pratique de tel État ou organe international.  « Seule la pratique des États peut contribuer à la formation du droit coutumier, et non celle des organisations », a-t-elle rappelé.

Sur ce point de la pratique des organisations internationales, lesquelles « servent souvent d’arènes ou de catalyseurs de la pratique des États » selon une expression du rapport précité, la représentante de la Nouvelle-Zélande a exprimé ses doutes devant le libellé du projet de conclusion 4 qui prévoit que cette pratique contribue à la formation du droit international coutumier « dans certains cas ».

La déléguée a ainsi souhaité des précisions sur cette dernière expression, ainsi que sur les organisations internationales dont la pratique peut effectivement contribuer à la formation de ce droit.  Le commentaire relatif à ce projet de conclusion n’est pas d’un grand recours puisqu’il mentionne la pratique de « certaines organisations, mais pas de toutes », a-t-elle remarqué.  Le délégué d’Israël a également regretté la « confusion » sur ce sujet.

Notant les divergences des États, la déléguée de la Roumanie a déclaré que la pratique de ces organisations peut déterminer le droit international coutumier, « notamment si ces organisations ont été l’objet de transferts de compétences de la part des États ».  De son côté, son homologue du Royaume-Uni a estimé que ce projet de conclusion apporte une clarification utile.

Le projet de conclusion 15 sur « l’objecteur persistant », qui est une exception à l’application du droit international coutumier, a été abondamment discuté, notamment par le représentant de Sri Lanka.  « Certains États ont indiqué que lorsqu’un État a objecté à une règle de droit international coutumier lorsqu’elle était en voie de formation, cette règle n’est pas opposable audit État, lequel n’aurait pas à maintenir son objection », a-t-il dit.  Le projet de conclusion 15 prévoit que l’objection doit « être maintenue de manière persistante ». 

Mais la charge la plus virulente est venue du représentant de Chypre qui a vu dans ce principe, un « véritable virus » inoculé au droit international coutumier.  Un État ne peut déroger à ses obligations découlant d’une règle coutumière internationale, une fois que celle-ci a été identifiée, a déclaré le délégué, en se disant lui-même « objecteur persistant » à ce principe.  Il a précisé qu’il s’agit d’un concept « polémique » qui n’a pas le soutien des États.

Le représentant de Sierra Leone s’est lui penché sur le projet de conclusion 6 concernant la détermination du droit international coutumier, lequel note que l’inaction peut, « dans certaines circonstances », être considérée comme la pratique d’un État.  « Le libellé aurait dû être plus précis et il aurait dû tenir compte de deux aspects majeurs: la conscience de l’État de la pratique et l’inaction volontaire d’agir qui est différente de « l’abstention délibérée d’agir », a-t-il déclaré.

Enfin, de nombreuses délégations, en particulier des petits États insulaires en développement, mais aussi le Canada, qui possède le plus long littoral du monde, ont salué l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la Commission.  « Un pas de géant dans la bonne direction », selon la Papouasie-Nouvelle-Guinée, sur un sujet « intergénérationnel », comme l’a dit la République de Corée.  Le délégué des Tonga a déclaré qu’il n’existe pas de menace plus grave, tandis que son homologue des États fédérés de Micronésie a demandé que les études sur le sujet puissent commencer au plus vite.

« Qu’adviendra-t-il de l’État dont les populations auront fui l’élévation de la mer?  Celui-ci aura-t-il disparu au regard du droit international ou faudra-t-il attendre qu’il soit submergé totalement par les eaux? » a demandé le délégué des Fidji.  Un bémol est venu de la délégation de Chypre, qui a rappelé que le sujet a déjà été traité par l’Association de droit international et a donc douté de l’utilité d’y consacrer des ressources déjà « maigres ».

La Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 25 octobre, à 15 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-DIXIÈME SESSION

Suite des déclarations sur les chapitres I à V, XII et XIII du rapport

Mme VICTORIA HALLUM ( Nouvelle-Zélande ) a loué la « considérable contribution » de la CDI au droit international, la Commission ayant par exemple jeté les fondations pour la création de la Cour pénale internationale (CPI).  Elle s’est félicitée de l’adoption des 16 projets de conclusion, assortis de commentaires, sur la détermination du droit international coutumier, en notant le souci de concision de la Commission.  Cependant, en certaines occurrences, cela a conduit à des déclarations générales sans valeur pratique claire.  Elle a exprimé ses doutes s’agissant du projet de conclusion 4 disposant que dans certains cas, la pratique des organisations internationales contribue également à la formation, ou à l’expression, de règles de droit international coutumier.  La déléguée a demandé des précisions sur cette expression « dans certains cas », le commentaire afférent n’étant pas d’un grand recours puisqu’il indique que la pratique de « certaines organisations, mais pas toutes » peut être pertinente. 

La déléguée a salué l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI.  C’est une question d’importance pour mon pays, a-t-elle dit.  « Notre objectif est de trouver le moyen, le plus rapidement possible, de garantir aux États côtiers qu’ils ne perdront pas leurs droits sur leurs ressources maritimes et leurs zones de juridiction en raison de l’élévation du niveau de la mer. »  Mme Hallum a indiqué que tous les États ont intérêt à préserver l’équilibre délicat entre leurs droits et obligations défini par la Convention sur le droit de la mer et à éviter les contentieux éventuels.  En conclusion, elle a souhaité que ce point fasse partie du programme actuel de travail de la CDI.

Pour Mme ALINA OROSAN ( Roumanie ), la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international est assez importante pour que la CDI s’en saisisse et en fasse un élément de son programme de travail.  La Roumanie précise que les études engagées sur ce thème ne doivent pas chercher à modifier le droit international, mais plutôt analyser la façon dont le droit international traite des problèmes soulevés par ce phénomène et dont il peut s’adapter, et, par conséquent, identifier des lacunes potentielles.  La délégation encourage donc le groupe d’étude et attend ses conclusions.

Concernant la question des accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, la Roumanie salue le travail du Rapporteur spécial, M. Georg Nolte, et se félicite également de l’adoption des projets de conclusion relatifs à la détermination du droit international coutumier.  Mme Orosan a noté que les commentaires des États ont été fort divergents sur le point relatif à la pertinence de la pratique des organisations internationales dans la détermination du droit international coutumier.  La Roumanie est d’avis que la pratique de ces organisations peut effectivement déterminer le droit international coutumier, notamment si ces organisations ont été l’objet de transferts de compétences de la part des États. 

Mme CHAVANART THANGSUMPHANT ( Thaïlande ) s’est félicitée de l’adoption des projets de conclusion sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Le rôle de ces accords et pratique ultérieurs, tel que visé par l’article 31 de la Convention de Vienne, ne peut se comprendre que dans le contexte de l’interprétation des traités, a-t-elle dit.  Elle a ajouté que toute modification des dispositions d’un traité doit respecter l’article 39 de ladite Convention pour garantir la stabilité des relations internationales.  À cette même fin, elle a prôné la prudence s’agissant de l’utilisation des accords et pratique ultérieurs en vue de l’« interprétation évolutive » des textes, laquelle devrait être circonscrite « à certaines circonstances ou à certaines catégories de traités ayant un objet spécifique ».  « Nous recommandons par conséquent de recourir à l’interprétation évolutive seulement dans le contexte où des accords et pratique ultérieurs sont utilisés pour déterminer l’intention des parties de conférer ou non un sens évolutif à une disposition d’un traité. »

Commentant l’inscription de la compétence pénale universelle dans le programme de travail de long terme de la CDI, la déléguée a rappelé que ce concept doit être distingué de l’obligation de poursuivre ou d’extrader et des autres formes de compétence, y compris territoriale et de nationalité.  Elle a invité la Commission à apporter des clarifications s’agissant de la définition, de la nature et de la portée du principe de compétence pénale universelle.  Enfin, la représentante a déclaré que la Thaïlande suivra avec un grand intérêt les discussions sur l’autre sujet inscrit au programme de travail de long terme, l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, avant d’appeler à un dialogue renforcé entre la CDI et la Sixième Commission. 

M. ALEJANDRO ALDAY ( Mexique ) s’est félicité de l’adoption par la CDI des 13 projets de conclusion relatifs aux accords et à la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Il a estimé que les projets de conclusions 2, 4, 5, 6, 7 et 10 favorisent l’équilibre entre les mécanismes formels d’interprétation des traités.  Ces textes, a-t-il noté, constituent « une grande avancée » dans le développement progressif du droit international et du renforcement des moyens complémentaires d’interprétation des traités. 

Le représentant a également salué l’adoption des 16 projets de conclusion portant sur la détermination du droit international coutumier, qui fourniront un outil utile permettant de clarifier la pratique des États et l’ opinio juris , ainsi que leur manifestation.  Il a encouragé les membres de la Sixième Commission à mettre en œuvre le fruit des travaux de la CDI, considérés « impartiaux et apolitiques ».  S’agissant de l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail de la CDI, il a rappelé que la Sixième Commission s’est déjà prononcée à maintes reprises sur cette question, et qu’elle bénéficierait de l’analyse technique de la CDI. 

M. FIRAT SUNEL ( Turquie ) a déploré le fait que la Commission ne compte que 4 femmes parmi ses membres, et seulement 7 au cours de ses 70 années d’existence.  Par ailleurs, il a estimé que l’inscription de la compétence pénale universelle au programme de travail à long terme de la CDI permettra de combler les lacunes qui subsistent dans la lutte contre l’impunité.  De même, il a estimé que l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international aura des incidences sur les États, les droits de l’homme, les frontières maritimes et l’environnement. 

Le représentant s’est félicité de l’adoption des projets de conclusion relatifs aux accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et à la détermination du droit international coutumier.  Il a noté que le concept d’objecteur persistant constitue un principe du droit international général, qui fait partie intégrante du droit coutumier. 

M. AMRITH ROHAN PERERA ( Sri Lanka ) a rappelé, à propos des projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, la relation complexe et interactive qui existe entre coutume et traités, les deux sources primaires du droit international.  Le projet de conclusion 11 sur la portée de certains moyens de détermination du droit international coutumier est une disposition vitale qui jette « une certaine clarté » sur cette relation, a-t-il relevé.  « Le droit coutumier international est souvent évoqué pour combler les lacunes du droit conventionnel et pour clarifier les droits et obligations découlant des traités. » Ce texte, selon lequel une règle énoncée dans un traité peut refléter une règle de droit international coutumier s’il est établi que la règle conventionnelle a codifié une règle de droit international coutumier existante à la date de la conclusion du traité ou a servi de point de départ à une opinio juris , sera d’une aide précieuse pour les praticiens afin de dissiper les ambiguïtés, a-t-il relevé. 

Le délégué a ensuite évoqué le projet de conclusion 15 sur « l’objecteur persistant », exception à l’application de ce droit, qui a fait l’objet de divergences entre États, certains d’entre eux mettant en garde contre des abus de ce principe.  Certaines délégations ont ainsi indiqué que lorsqu’un État a objecté à une règle de droit international coutumier lorsqu’elle était en voie de formation, cette règle n’est pas opposable audit État, lequel n’aurait pas à maintenir son objection, contrairement à ce que prévoit le projet précité.  Par ailleurs, M. Perera a estimé que les projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités apportent également « une certaine clarté ».  Enfin, il a recommandé que ces conclusions figurent en annexe des résolutions de l’Assemblée générale. 

La CDI, y compris ses membres russes, ont contribué au développement du droit international, s’est félicitée Mme ZAMAKHINA EVGENIIA ( Fédération de Russie ).  Elle a salué « l’absence de politisation » et l’accent mis sur le consensus qui ont cours à la Commission.  Elle a toutefois estimé que la CDI devrait ralentir la cadence de ses travaux afin de permettre la mise en œuvre de projets répondant aux besoins de tous les États.  La Commission doit donc entendre les avis des États et en tenir compte.  Abordant les interactions entre la CDI et la Sixième Commission, la représentante a noté qu’en général, l’Assemblée générale prend note des projets de résolution et attire l’attention des États Membres, tandis que ceux-ci utilisent les textes pour le développement du droit malgré l’absence de consensus.  Or, la plupart de ces projets ne relèvent pas du droit coutumier, a-t-elle déploré, avant de suggérer de recueillir l’avis des États dans un document distinct. 

Mme Evgeniia a pris note des projets de conclusion relatifs aux accords et à la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, fondés sur les dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Quant aux projets de conclusion relatifs à la détermination du droit international coutumier, ils tombent à point nommé « afin de contrer la tendance à conclure à l’existence d’une norme de droit coutumier suivant la pratique de tel État ou organe international ».  En effet, la pratique ou l’ opinio juris ne peuvent être considérées comme des éléments constitutifs du droit coutumier si elles ne correspondent pas à une norme de jus cogens , comme stipulé dans les Conventions de Vienne, a fait valoir la représentante.  Seule la pratique des États peut contribuer à la formation du droit coutumier, et non celle des organisations, a précisé la représentante, pour qui toute norme de droit international doit être instituée dans un traité ou le droit coutumier. 

Selon la représentante, les rapports de la CDI devraient être « avant tout analytiques ».  Enfin, elle n’a pas jugé opportun d’inscrire la question de la compétence pénale universelle au programme déjà chargé de la CDI.

Si Mme JANE J. CHIGIYAL ( États fédérés de Micronésie ) a salué la décision d’inscrire la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI, elle a toutefois appelé la Commission à l’inclure dans son programme actuel pour que les études sur le sujet puissent commencer « au plus vite ». 

À partir du moment où l’examen de la question s’avère utile pour la communauté internationale, alors les États devraient pouvoir participer activement aux travaux du groupe d’étude, a fait valoir Mme Chigiyal.  De plus, leur contribution ne devrait pas se limiter aux interventions au cours des réunions de la Sixième Commission; elle pourrait prendre la forme de commentaires, de comptes rendus, de séminaires interactifs ou d’autres modes informels de participation, tout en accordant du poids à l’implication des petits États insulaires en développement (PEID) et d’autres pays en développement ayant des zones côtières de faible élévation. 

L’élévation du niveau de la mer soulève de graves questions de droit international pour des PEID comme la Micronésie, a reconnu la représentante, mais « c’est aussi un sujet qui intéresse la communauté internationale dans son ensemble ».  De fait, ce phénomène pourrait par exemple modifier les frontières maritimes des États ou provoquer des migrations humaines.  En conclusion, elle a cité les mises en garde contenues dans le cinquième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et son rapport spécial récent sur le réchauffement planétaire de 1,5° C.

Considérant que le développement progressif du droit international doit porter sur les défis mondiaux actuels, M. VILIAMI VA’INGA TONE ( Tonga ) a déclaré qu’il n’existe pas de menace « plus urgente » que l’élévation du niveau de la mer découlant des changements climatiques.  Saluant l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI, il a mis l’accent sur la protection des personnes affectées par ce phénomène.  Il a souligné l’importance de mener des études approfondies sur ces questions, tout en respectant les dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer concernant la délimitation des frontières maritimes.

M. ALAN KESSEL ( Canada ) a rappelé que le Canada possède le plus long littoral au monde et que le pays est donc directement affecté par l’élévation du niveau de la mer et les effets des changements climatiques.  Les questions juridiques liées à ce phénomène sont nombreuses et complexes, a-t-il ajouté, notamment en ce qui concerne le droit de la mer, la notion d’État, les délimitations maritimes et la protection des personnes affectées.  Bien que ces questions soient traitées au sein d’autres entités des Nations Unies, y compris l’Assemblée générale, le Canada appuie « vigoureusement » l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI, et considère que ce sujet pourrait également être inscrit à son programme actuel. 

Pour le représentant, la certitude et la stabilité juridique des zones maritimes participent à l’établissement de relations ordonnées entre les États et à la paix et la sécurité internationales, ainsi qu’à l’utilisation durable des ressources maritimes.  Il a mis la Commission en garde contre le risque de s’égarer dans les débats sur les questions les plus larges découlant de l’élévation du niveau de la mer, qui viendraient compliquer l’examen du sujet. 

M. MICHAEL IRMAN KANU ( Sierra Leone ) est revenu sur le projet de conclusion 13 qui indique que la pertinence des prononcés d’un organe conventionnel d’experts aux fins de l’interprétation d’un traité dépend des règles applicables du traité.  Pour la délégation, ces prononcés peuvent, dans certaines circonstances, donner naissance ou faire référence à un accord ultérieur ou une pratique ultérieure des parties au sens du paragraphe de l’article 31 de la Convention de Vienne.

Par ailleurs, le représentant s’est référé au premier paragraphe du projet de conclusion 6 concernant la détermination du droit international coutumier, lequel note que l’inaction peut, « dans certaines circonstances », être considérée comme la pratique d’un État.  Pour la délégation, le libellé aurait dû être plus précis et il aurait dû tenir compte de deux aspects majeurs: la conscience de l’État de la pratique et l’inaction volontaire d’agir qui est différente de « l’abstention délibérée d’agir ». 

Au sujet de la compétence pénale universelle, la Sierra Leone rappelle qu’elle avait par le passé demandé quelles seraient les conclusions éventuelles de la Commission sur ce thème.  M. Kanu a souhaité que l’examen de cette question au sein d’autres instances onusiennes ne vienne pas compromettre son étude par la Sixième Commission.  Il y a vu une occasion pour la Sixième Commission et la CDI de rapprocher leurs méthodes de travail dans le cadre de l’examen parallèle de ce même thème.  Enfin, la Sierra Leone appuie l’inscription de la question de l’élévation du niveau de la mer au programme de travail de la CDI.  Le pays souhaite même que des corapporteurs soient désignés pour cette question importante. 

M. ANDREW MURDOCH ( Royaume-Uni ) a salué la décision d’inscrire le sujet « Principes généraux du droit » au programme de travail de la CDI et celle d’inscrire l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international à son programme de travail à long terme.  Il a pris note de l’inscription de la compétence pénale universelle au programme de travail à long terme, tout en jugeant que ce sujet n’est pas assez « mûr » pour être discuté par la Commission.  Il a ensuite invité la Commission à faire preuve de clarté dans la codification du droit international.  Lorsque la Commission propose de nouveaux apports au droit international, les États doivent pouvoir en discuter, a-t-il dit, en déplorant que certains sujets fassent l’objet d’un traitement rapide.

M. Murdoch a salué l’adoption des projets de conclusion, assortis de commentaires, sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  « Il s’agit là d’une boussole utile pour les praticiens dans l’art de l’interprétation des traités. »  Abordant les projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, le délégué du Royaume-Uni s’est félicité de la clarification apportée par le projet de conclusion 4 sur la pratique des organisations internationales.  Enfin, le délégué a noté l’importance de ces projets de conclusion, le droit international coutumier étant de plus en plus souvent invoqué devant les tribunaux.

Selon Mme MARIANA DURNEY ( Chili ), les projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités ont permis de systématiser les normes et procédés existants, au bénéfice des praticiens du droit international.  La conclusion 7, qui porte sur les effets possibles des accords et de la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation, indique que l’interprétation ne peut aller au-delà de la détermination du sens du traité, et qu’un accord sur cette interprétation ne constitue pas une modification dudit traité à moins d’indications claires des parties. 

Mme Durney a accueilli favorablement les projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier.  Se référant au projet de conclusion 4, elle a partagé l’avis de la CDI selon lequel la pratique des États joue un rôle primordial dans la formation du droit international coutumier, sans préjudice de la conduite des organisations internationales.  Elle a souligné, comme le commentaire relatif au projet de conclusion 5, que la pratique des États doit être connue des autres États pour contribuer à la formation et à l’identification des normes du droit international coutumier.  Quant à la conclusion 6, elle indique que seule l’abstention délibérée d’un État peut être considérée comme une pratique du droit coutumier.  La représentante s’est également dite en accord avec la conclusion 12, qui stipule que l’effet des résolutions adoptées par les organisations internationales ou les conférences intergouvernementales « contribue au développement » d’une norme du droit international coutumier.  

Alors que la Commission célèbre son soixante-dixième anniversaire, Mme Durney a considéré la faible représentation des femmes au sein de la CDI comme un problème urgent, contraire à l’article 8 des statuts de la Commission sur la représentation adéquate de l’ensemble de la communauté internationale.  Elle invité les États Membres à proposer à l’avenir la candidature de femmes afin que soient réellement représentés les grandes civilisations et systèmes juridiques du monde. 

M. DEKALEGA FINTAKPA LAMEGA ( Togo ), abordant les 16 projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, a partagé les inquiétudes « au sein même de la Commission » relatives à la portée de la pratique des organisations internationales soulevée au projet de conclusion 4.  S’il est admis dans certains cas que cette pratique peut constituer un important aspect pour la formation de ce droit, il convient de préciser de quelle pratique il s’agit, à quel moment elle serait pertinente et quelles considérations devront être prises en compte pour évaluer le poids de cette pratique par rapport à celle des États eux-mêmes, a-t-il argumenté.  Évoquant le projet de conclusion 8, il a déclaré que son pays aurait préféré qu’une référence claire à la notion « d’États spécialement affectés et concernés » soit faite dans ce projet et non pas seulement dans son commentaire.

Par ailleurs, M. Fintakpa Lamega a espéré que l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI permettra une analyse juridique approfondie de cette « importante problématique ».  Enfin, il a indiqué que le point de la compétence pénale universelle doit demeurer à l’étude dans la mesure « où toute analyse juridique de ce concept ne saurait occulter son abus et sa politisation ».

Mme SANDEA DE WET ( Afrique de Sud ) a regretté le nombre insuffisant de femmes au sein de la CDI.  Elle s’est félicitée de la clarté apportée par les projets de conclusion sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  S’agissant des 16 projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, elle a souligné que ce droit est souvent évoqué devant les tribunaux.

Ces projets de conclusion ne doivent pas être circonscrits au monde académique parce qu’ils trouveront à s’appliquer dans des situations de la vie réelle, a dit Mme De Wet, en dissipant le « mythe » qui veut que le droit international soit le domaine réservé de quelques-uns.  Elle s’est félicitée du caractère non-prescriptif de ces projets et a rappelé que les États sont les acteurs majeurs dans l’identification de ce droit.  Les projets de conclusion ne reconnaissent pas la conduite d’acteurs non étatiques dans la formation du droit international coutumier.  Enfin, la déléguée a salué l’inclusion du principe d’« objecteur persistant », tout en rappelant la nécessité que ce principe soit de nature temporaire et soumis à des critères d’application très rigoureux.

M. LUIS XAVIER OÑA GARCÉS ( Équateur ) a cité l’Article 13 de la Charte des Nations Unies qui demande à l’Assemblée générale d’encourager le développement progressif du droit international et sa codification.  Ce mandat permet d’assurer que le droit international suit l’évolution de la « science juridique » et des sociétés.  Il s’est félicité des précisions contenues dans les projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  De même, les projets de conclusion relatifs à la détermination du droit international coutumier permettent d’identifier les normes du droit coutumier. 

Le représentant a souligné la mise en place d’un groupe de travail chargé de rédiger les commentaires accompagnant les conclusions, qui serviront de guide sur la détermination de l’existence des normes du droit international coutumier.  Ces instruments seront particulièrement utiles aux juges nationaux, qui sont souvent appelés à déterminer les normes du droit international coutumier dans les affaires qu’ils traitent.  Il a salué, en terminant, l’inscription des principes généraux du droit, de la compétence pénale universelle et de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail de la CDI.

M. REUVEN EIDELMAN ( Israël ) a salué l’adoption des projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier et s’est dit partisan de la rigueur sur ce sujet.  Il a rappelé que les États sont les acteurs majeurs dans l’identification de ce droit et souligné les deux éléments constitutifs du droit coutumier: l’existence d’une pratique générale et son acceptation comme étant le droit.  Il a exprimé certaines réserves, en pointant notamment une confusion dans les projets de conclusion relatifs au rôle des organisations internationales.  « Les commentaires ne reflètent pas la pratique actuelle. »

Le délégué a demandé des éclaircissements sur l’inaction d’un État, celle-ci devant être une inaction délibérée, avant d’ajouter qu’une opinio juris ne peut être déduite du silence d’un État.  Il a par ailleurs déploré que les projets de conclusion laissent une trop grande place aux traités qui ne sont pas encore entrés en vigueur, alors que le nombre de signatures nécessaires a tendance à être de plus en plus bas.  Évoquant l’idée que ces projets figurent en annexe des résolutions de l’Assemblée générale, le délégué a rappelé le caractère juridiquement non contraignant de ces dernières, avant de déplorer « la politisation » du concept de compétence pénale universelle.

M. FRED SARUFA ( Papouasie-Nouvelle-Guinée ) a rappelé la préoccupation des États insulaires devant l’élévation du niveau de la mer, qui représente pour eux une menace existentielle.  Il s’est félicité de la décision de la CDI d’inclure ce sujet dans son programme de travail à long terme.  Bien que la portée des travaux se limite strictement aux implications juridiques de ce phénomène climatique sur le droit de la mer, le statut d’État, et la protection des personnes touchées, pour notre pays, a affirmé le représentant, « c’est un pas de géant dans la bonne direction ».

M. Sarufa a attiré l’attention sur les questions relatives aux zones maritimes pour les États archipels tels que le sien, avant d’annoncer que la Papouasie-Nouvelle-Guinée est en train de finaliser les cartes et des coordonnées géographiques fixant ses nouvelles zones maritimes avant soumission au Secrétaire général.  « Il existe des règles spéciales pour les États archipels dans la partie IV de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, en particulier l’article 47 sur les bases maritimes des archipels », a souligné M. Sarufa.  Parmi ces règles, figurent un ratio eau/terre spécifique et une limitation sur la longueur des bases: or, la perte des petites îles périphériques ou des récifs découvrants en raison de la montée du niveau des eaux est de nature à modifier le statut même de ces bases et, par conséquent, les zones maritimes des États archipels, a observé le représentant.

C’est la raison pour laquelle ces questions d’importance doivent être examinées dans le cadre d’une analyse qui déterminerait le degré auquel le droit international dans sa forme actuelle est en mesure ou non de répondre à ces préoccupations, et comment les États peuvent développer des solutions pratiques.  S’agissant des migrations humaines, le représentant a recommandé à la CDI de prendre en compte la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967.

Mme OKSANA ZOLOTAROVA ( Ukraine ) s’est félicitée de l’adoption de projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Les projets de principe sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés revêtent une importance particulière pour son pays, a-t-elle dit ensuite, notant la faiblesse du cadre juridique existant.  « Il est grand temps que la CDI se penche sur cette question. » 

L’Ukraine a fait l’expérience des ravages causés par une Puissance occupante qui ne prête aucune attention aux dommages environnementaux causés en Crimée et dans le Donbass du fait de l’occupation, a témoigné la représentante.  La mauvaise gestion des zones naturelles et agricoles en Crimée a des conséquences sur les droits de la personne et la protection environnementale, a-t-elle poursuivi.  Elle a donné pour exemple la construction non autorisée du pont de Kertch, qui risque d’occasionner des dommages côtiers et environnementaux dans la mer d’Azov et contrevient au droit international humanitaire et à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

M. DOROS VENEZIS ( Chypre ) a mis en garde contre une acceptation généralisée du concept d’« objecteur persistant », visé au projet de conclusion 15 relatif à la détermination du droit international coutumier.  Cette question relève de l’application de ce droit et pas de sa formation, a-t-il dit.  Une fois qu’une norme coutumière a été établie, il n’est pas possible d’y faire objection, a-t-il tranché.  Il a indiqué que peu d’États invoquent ce principe, qui est un « véritable virus inoculé au droit international coutumier ».  Un État ne peut déroger à ses obligations découlant d’une règle coutumière internationale, une fois que celle-ci a été identifiée, a insisté le délégué, en exprimant son désaccord avec les commentaires sur ce sujet.  Les objecteurs persistants sapent la pratique étatique de nombre d’États en développement.

Le délégué s’est dit lui-même « objecteur persistant » à ce projet de conclusion 15 sur un concept qui est « polémique » et n’a pas le soutien des États, même s’il est reconnu par la doctrine et la CDI.  Enfin, s’il a salué l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme à long terme de la Commission, il a déploré le manque de coopération entre la CDI et la Sixième Commission sur un sujet qui, en outre, a été traité par l’Association de droit international.  Au vu de ces doublons, le délégué de Chypre a douté de l’utilité de consacrer à ce nouveau sujet des ressources déjà « maigres ».

M. MANUEL DE JESÚS PIREZ PÉREZ ( Cuba ) s’est inquiété du nombre excessif de points inscrits à l’ordre du jour de la CDI.  En particulier, il a considéré que la compétence pénale universelle en tant que sujet ne remplit pas les conditions posées à la cinquantième session, et devrait faire l’objet de débats additionnels à la Sixième Commission.  Selon lui, les projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités doivent respecter le régime établi par le Convention de Vienne sur le droit des traités, reflet de la pratique coutumière. 

Quant aux projets de conclusion relatifs à la détermination du droit international coutumier, le représentant les a trouvés opportuns en tant qu’outils de référence à l’intention des États et des praticiens du droit.  La conduite de l’État doit se limiter à la pratique de l’État, sans considérer la pratique des organisations internationales, a-t-il argué.  De plus, il a jugé le projet de conclusion 8 contradictoire, alors qu’il fait état de la pratique constante sans fixer de calendrier précis. 

M. GENE WAQANIVALU BAI ( Fidji ) a salué la décision d’introduire la question de l’élévation du niveau de la mer dans le programme de travail à long terme de la CDI.  Il a souligné les conséquences dévastatrices de cette élévation pour les populations qui pourraient être déplacées.  « Qu’adviendra-t-il de l’État dont les populations auront fui l’élévation de la mer?  Celui-ci aura-t-il disparu au regard du droit international ou faudra-t-il attendre qu’il soit submergé totalement par les eaux? »

En guise de réponse, le délégué a rappelé l’avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur le Sahara occidental, selon lequel c’est à la population de déterminer l’avenir d’un territoire et non pas au territoire de déterminer l’avenir d’une population.

Mme PIERINA ALAFAMUA KATOANGA ( Samoa ) a salué la décision d’introduire la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international dans le programme de travail à long terme de la CDI.  Ce phénomène, a-t-elle témoigné, affecte les côtes industrielles de Samoa, la vie des communautés locales, les infrastructures et les écosystèmes, entre autres.  Dans ce pays très vulnérable aux changements climatiques, 70% de la population vit sur les côtes et se trouve exposée aux érosions, aux inondations et aux glissements de terrain. 

Pour les dirigeants des petits États insulaires en développement du Pacifique, la question de l’élévation du niveau de la mer mérite l’attention de la communauté internationale, en raison de l’urgence de la question mais aussi à cause du caractère progressif de l’élévation du niveau de la mer, a conclu la représentante.

M. JONGIN BAE ( République de Corée ) a commenté les projets de conclusion portant sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Commentant le projet de conclusion 7 sur les effets possibles des accords ultérieurs et de la pratique ultérieure dans le contexte de l’interprétation, il a dit que toute modification substantielle faite par ce biais n’est pas régie par les articles 31 et 32, mais plutôt par l’article 39 de la Convention de Vienne de 1969.  Au sujet des projets de conclusions 12 et 13, la République de Corée souligne que l’intention des États parties est l’élément le plus important de l’interprétation d’un traité.  Il a indiqué que la pratique d’une organisation internationale ou le prononcé d’un organe conventionnel d’experts ne peuvent être considérés comme une pratique ultérieure au sens du paragraphe 3 b) de l’article 31 de la Convention de Vienne de 1969. 

S’arrêtant ensuite aux paragraphes 2 des projets de conclusions 6 et 10 sur la détermination du droit international coutumier, M. Bae a préconisé la cohérence dans l’utilisation des termes et dans l’ordre dans lequel ils y sont utilisés.  Ainsi, une explication serait nécessaire pour apporter des clarifications en cas de contradictions.  Il serait bien aussi d’éclaircir les commentaires relatifs au projet de conclusion 16 et à « d’autres formes de droit coutumier ».

Par ailleurs, la République de Corée note que le thème de l’élévation du niveau de la mer reflète l’inquiétude croissante des petits États insulaires en développement.  Les critères convenus à sa cinquantième session par la CDI sur les nouveaux sujets sont ici respectés.  Il s’agit selon le délégué d’un sujet « intergénérationnel », puisque la génération actuelle a le devoir d’établir un cadre juridique sur cette question.  Il a estimé également qu’elle s’inscrit dans la perspective de « ce que la loi doit être » en opposition à ce qu’elle est en ce moment. 

Quant à la compétence pénale universelle, M. Bae a rappelé que son pays a créé une législation sur la mise en œuvre du Statut de Rome, mais qu’il est d’avis que le sujet n’est pas encore assez « mûr » pour faire l’objet de conclusions significatives.

Mme MARIE-CHAROLETTE MCKENNA ( Australie ) a salué l’adoption des projets de conclusion sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, qui constitueront une orientation utile pour les États et les organisations internationales.  En outre, l’inscription de la question de la compétence pénale universelle au programme de travail à long terme de la CDI est tout à fait positive afin d’assurer l’application du principe de responsabilité, de lutter contre l’impunité et de compléter les tribunaux internationaux. 

La question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international représente une source de préoccupation importante pour les États du Pacifique, a rappelé la représentante.  Les États de la région se sont efforcés de clarifier plusieurs questions à ce sujet, notamment les délimitations maritimes, tout en respectant les dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  En conclusion, elle a encouragé la CDI à se pencher sur cette question dans les plus brefs délais.

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La coutume dans la jurisprudence de la Cour Internationale de Justice en Droit de la Mer

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  • Référence bibliographique

Le Floch Guillaume. La coutume dans la jurisprudence de la Cour Internationale de Justice en Droit de la Mer. In: Revue juridique de l'Ouest , 2001-4. pp. 535-573.

DOI : https://doi.org/10.3406/juro.2001.2653

www.persee.fr/doc/juro_0990-1027_2001_num_14_4_2653

  • RIS (ProCite, Endnote, ...)
  • 1 - Une pratique prenant appui sur l'ensemble des comportements des sujets de droit international [link]
  • 2 - Les conditions relatives aux caractéristiques de cette pratique [link]
  • 1 - L'opinio juris : une notion impalpable et pourtant fondamentale [link]
  • 2 - L'opinio juris : une preuve toujours délicate à rapporter [link]
  • 1 - L'application discutée de la doctrine des deux éléments par la Cour [link]
  • 2 - L'impossibilité pour la Cour de faire une application mécanique de la doctrine des deux éléments [link]
  • 1 - Une utilisation subjective de la pratique [link]
  • 2 - Le recours au caractère malléable de l'opinio juris [link]
  • 1 - Les arrêts de la C.I.J. : des arrêts exerçant une influence au-delà du cas d'espèce [link]
  • 2 - Une lecture audacieuse de l'article 38 de son Statut par la Cour [link]
  • 1 - La prépondérance du juge en droit de la mer en raison de l'évanescence des normes applicables [link]
  • 2 - L'influence positive du droit coutumier « tel que développé par la Cour » [link]
  • Conclusion [link]

Texte intégral

DOCTRINE 535

LA COUTUME DANS LA JURISPRUDENCE DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE EN DROIT DE LA MER*

Guillaume LE FLOCH Allocataire-moniteur en droit public à l'Université de Rennes 1

Le droit de la mer a pendant longtemps été un droit stable reposant sur des coutumes « ancestrales ». Mais au cours du XX*1"6 siècle, et plus particulièrement dans sa seconde moitié, les pays en développement le remettent violemment en cause. Le droit de la mer entre alors dans une période d'incertitude. Les règles juridiques ont du mal à s'affirmer car les Etats ont des prétentions nouvelles sur la mer. Or ces dernières sont souvent antagonistes et donnent lieu à des litiges auxquels le droit n'apporte que peu ou pas de réponse. Paradoxalement, cette imprécision, pour ne pas dire lacune des règles juridiques, conduit les Etats à se tourner vers la Cour Internationale de Justice1 (C.I.J.).

Pour trancher un litige, la C.I.J. doit avant tout déterminer le droit applicable. En vertu de l'article 38 § 1 de son Statut2, la Cour applique les conventions internationales, la coutume ou les principes généraux de droit3. Cependant, la détermination du droit applicable a présenté, et présente sans doute encore, des difficultés particulières en droit de la mer en raison des récents bouleversements qui ont affecté ce droit.

536 DOCTRINE

Tout d'abord, il était extrêmement difficile pour le juge de trouver des normes conventionnelles à la fois pertinentes et applicables lors des différents cas d'espèce. Dans la première moitié du XX*"16 siècle, il n'existait pas, pour ainsi dire, de règles conventionnelles en droit de la mer. Ensuite, ce droit a été un rendez-vous constant de la codification du droit international, sans pour autant que se dégage un droit véritablement durable. Depuis le 16 novembre 1994, la Convention de Montego Bay est en vigueur. Cependant, douze années se sont écoulées entre l'adoption de cette « constitution pour les océans » et son entrée en vigueur. Or durant cette période, le droit de la mer a continué d'évoluer. Si bien que nombre de ses dispositions ne traduisent plus l'état du droit actuel. Ainsi en droit de la mer, les normes conventionnelles, souvent inapplicables4, ont longtemps été incertaines pour ne pas dire inexistantes. Elles demeurent aujourd'hui encore imprécises voire dépassées sur certains plans.

Ensuite, s 'agissant des principes généraux de droit, la Cour est traditionnellement prudente dans leur utilisation. Elle y a essentiellement recours dans le domaine de l'administration de la justice. En droit de la mer, elle ne s'est jamais fondée sur ces principes pour trancher un litige au fond5. Finalement, pour régler les différends en ce domaine, il ne lui restait plus que la coutume.

La coutume, source plus que précieuse pour le juge en droit de la mer, a joué et joue encore un rôle considérable en ce domaine. En fait, elle a longtemps constitué la source principale du droit international. Cette importance, sinon prééminence de la coutume, a été particulièrement marquée en droit de la mer6. Cependant, dans les années soixante, nombreux étaient les auteurs à prédire la fin de la coutume. En effet, les conventions de Genève de 1958 ont inauguré « la décade prodigieuse de la codification ». La codification vise à transcrire des normes coutumières et à les regrouper dans un texte7. L'avantage de la codification sur la coutume est qu'elle permet une précision dans l'application de

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la règle et rend la norme opposable aux Etats sans contestation possible. Ceci explique que de nombreuses conventions de codification aient été élaborées à partir de cette époque. On avait alors l'impression, observe le Professeur ABI- SAAB, qu'elles « allaient graduellement remplacer la coutume et la pousser vers le statut d'une source purement historique »8. La coutume paraissait particulièrement menacée en droit de la mer en raison d'une volonté très forte, manifestée à trois reprises, de codifier tout ce droit. Paradoxalement, pourtant, le phénomène de codification du droit international n'a pas conduit à la disparition de la coutume. Au contraire même, il a contribué à son renouveau9. En droit de la mer, particulièrement, la codification a permis une relance de l'élaboration des règles coutumières sur de nouvelles bases. La coutume conserve ainsi un rôle fondamental dans cette matière ; rôle qui explique que le juge, pour résoudre les différends dont il a été saisi en ce domaine, s'est fondé principalement pour ne pas dire exclusivement sur elle.

En fait, si la disparition de la coutume grâce aux conventions de codification a pu parfois être souhaitée, c'est notamment parce que la coutume « dérange »10. En droit international coutumier, selon le professeur WOLFKE, tout est sujet à controverses11. Mystérieuse, énigmatique voire insaisissable, la coutume soulève nombre de difficultés12. Son fondement a conduit à une joute doctrinale arbitrée par le juge international13 et demeure irrémédiablement sujet à polémiques. En outre, le terme même de coutume est source d'équivoques. Comme le rappelle le Professeur RUIZ-FABRI, ce « concept désigne trois

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réalités juridiques liées mais distinctes : des normes de droit international mais aussi la source formelle dont elles sont issues et le processus qui y a conduit »14.

Pour appréhender cette difficile notion, l'analyse des décisions judiciaires est riche d'enseignements. Elle permet, souligne le Professeur CONDORELLI, « de comprendre qu 'elle est la méthode que les juges utilisent afin de déterminer l'existence et le contenu de la norme coutumière, c'est à dire quels sont les éléments et les conditions qu'ils considèrent nécessaires et suffisants pour reconnaître une telle norme»1 . C'est cette analyse qu'on se propose de faire16. Néanmoins, elle ne portera que sur la jurisprudence de la Cour en droit de la mer.

Restreindre cette recherche au droit de la mer peut s'expliquer à deux égards. D'une part, la Cour, en ce domaine, a pour ainsi dire systématiquement été confrontée à la coutume17. Il n'est dès lors pas étonnant que l'arrêt de principe de la C.I.J. en matière de coutume ait été rendu en droit de la mer18. D'autre part, il est évident que la coutume, comme toute source non écrite, confère un très large pouvoir à l'interprète qui révèle le droit. La coutume est ce que le juge dit qu'elle est. Mais le juge doit appliquer le droit et non le créer. Aussi, pour déterminer l'existence et le contenu d'une coutume, le juge prend en compte certains paramètres19. Au demeurant, ces critères ressortent de ses différents arrêts. La méthode ne diffère pas selon la branche concernée du droit international. Néanmoins, la recherche d'une coutume peut être plus ou moins facile selon le domaine. En droit de la mer cette recherche était particulièrement délicate compte tenu des turpitudes qui ont violemment agité ce droit. L'emprise des Etats sur la mer posait des problèmes de droit nouveaux auxquels les Etats apportaient des réponses contradictoires. De fait, le contexte n'était pas propice à l'émergence de nouvelles normes coutumières. Pourtant, la Cour n'a jamais

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considéré qu'il y avait « une absence de règle en la matière »20. Elle a réussi à chaque fois à résoudre les litiges en se fondant sur des principes coutumiers. Saisie principalement de délimitations maritimes21, elle a progressivement dégagé tout un ensemble normatif fondé sur le droit coutumier. Cependant, le caractère coutumier de cet ensemble a été vivement discuté. En effet, les principes coutumiers dégagés par le juge ne semblent pas répondre aux exigences posées par lui pour constater une coutume. En outre, dans l'affaire Jan Moyen, la Cour a fait référence au « droit coutumier du plateau continental tel qu 'il s 'est développé dans la jurisprudence »22. Inévitablement, il existe toujours un lien étroit entre coutume et jurisprudence23. Mais ce lien semble particulièrement marqué en droit de la mer. C'est pourquoi on peut se demander, à l'image du Professeur WEIL, si en parlant de droit coutumier en ce domaine, il s'agit bien de la même coutume qu'ailleurs24.

Ainsi, si l'on s'en tient à l'examen des critères traditionnels posés par la Cour pour dégager une coutume (I), force est de reconnaître, qu'en droit de la mer, la C.I.J. détermine cette dernière par une démarche purement prétorienne (II). En ce domaine, la coutume n'est autre qu'une manifestation évidente du pouvoir normatif de la Cour (III).

I - Examen des critères traditionnels posés par la C.I.J. pour dégager une coutume

L'existence d'une norme coutumière, selon la Cour, est attestée par la réunion cumulative et convergente de deux éléments : la pratique et Yopinio juris. La C.I.J. fait ici application de la doctrine des deux éléments25, en vertu de laquelle la combinaison des deux critères permet de prouver l'existence d'une

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coutume, d'attester de son existence. La preuve et l'existence de la coutume ne doivent pas être confondues. Cependant, comme le souligne le professeur RUIZ- FABRI, « le problème est rendu confus par le fait que l'existence et la preuve de la coutume relèvent de la même opération intellectuelle » 6. La réunion de ces deux éléments est une condition à la fois nécessaire et suffisante pour pouvoir dégager une coutume. Mais chacun des deux doit faire l'objet d'une étude distincte préalable. Au travers de ses différents arrêts, la Cour a été conduite à préciser ce qu'elle entendait par ces deux éléments. Elle a ainsi posé certaines conditions afférentes à la pratique, qu'elle tend aujourd'hui à interpréter avec plus de souplesse (A). En revanche, les conditions relatives à Yopinio juris demeurent toujours aussi malaisées à appréhender (B).

A - L'assouplissement progressif des conditions relatives à la pratique

Toute interprétation, selon le professeur de Visscher, implique deux opérations, l'une d'observation des faits, l'autre d'appréciation des valeurs27. Ainsi, le juge commence par recueillir les données éparses de la pratique. Celles- ci prennent appui sur l'ensemble des comportements des sujets de droit international (1). Ensuite, il doit apprécier la valeur de ces différents comportements, car pour être constitutive d'une coutume, la pratique doit présenter certaines caractéristiques (2).

1 - Une pratique prenant appui sur l'ensemble des comportements des sujets de droit international

La coutume, selon le Professeur SUR, est une source parasite28 dans la mesure où elle est susceptible de prendre appui sur n'importe quelle manifestation de la vie internationale. Il peut s'agir aussi bien d'actions que d'abstentions29. Il est cependant nécessaire, précise le Professeur RUIZ-FABRI, que ces diverses et multiples manifestations «produisent des effets internationaux » et soient « opposables à leur auteur »30. Les auteurs de ces actes

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peuvent être tous les sujets de droit international à savoir les Etats31 et les Organisations internationales32. La Cour examine la pratique de ces sujets de droit à travers leurs multiples agissements. Il ressort de sa jurisprudence que cette pratique se manifeste par des actes internationaux et des actes internes non dépourvus d'effets internationaux.

S 'agissant des actes internationaux, il faut en premier lieu mentionner les conventions internationales. Les traités sont généralement tenus pour des composantes significatives de l'élément matériel de la coutume33. Ils constituent une manifestation expresse de la conduite des sujets de droit international. C'est pourquoi la Cour tient compte dans la recherche de la coutume des différents accords ayant un contenu proche34. Parmi les normes conventionnelles, elle attache une importance toute particulière aux conventions de codification. Dans son arrêt sur le Plateau continental de la mer du Nord, la C.I.J. a pour la première fois longuement et soigneusement examiné les rapports entre normes codifiées et normes coutumières35. Elle a considéré que les conventions de codification pouvaient produire trois effets à l'égard de la coutume. Elles peuvent être déclaratoires36, cristalliser une coutume naissante37, ou enfin, certaines dispositions conventionnelles ayant un caractère foncièrement innovateur, peuvent connaître ultérieurement une mutation coutumière. Les deux premières hypothèses doivent être dissociées de la dernière. En effet, dans les deux premiers cas, la règle inscrite dans la convention de codification représente

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l'aboutissement du processus de formation de la coutume38, tandis que dans le dernier cas, c'est le point de départ39.

En deuxième lieu, les actes unilatéraux des Etats doivent également être pris en considération. Dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord, la Cour a considéré que la déclaration Truman et les différentes revendications qui lui ont succédées attestaient d'une pratique, qui a ensuite pu donner naissance à une coutume40.

En troisième lieu enfin, il faut sans doute tenir compte des actes concertés non conventionnels. Comme le rappelle le Professeur JOUANNET, « ils sont dénués de force obligatoire, mais ils peuvent être un indice du comportement des Etats »41. La C.I.J. ne s'est pas encore fondée sur ce type d'acte pour établir l'existence d'une pratique. Néanmoins, il est fort probable qu'amenée à se prononcer dans une telle hypothèse, elle en tiendra compte.

A côté de ces différentes catégories d'actes d'envergure internationale, le juge prend également en compte les actes internes à répercussion internationale. S 'agissant des Etats, il ne faut pas oublier que c'est fréquemment par des actes internes qu'ils exercent ou réglementent leurs propres compétences internationales. En droit de la mer, par exemple, la plupart des règles générales se sont de tout temps formées à partir de mesures législatives nationales42. Les actes internes jouent indiscutablement un rôle fondamental dans la formation de la coutume internationale43. C'est pourquoi, la Cour y attache une importance toute particulière44.

Ainsi, les comportements pris en compte par la Cour sont multiples et divers. Si tous ces éléments ne sont pas nécessairement porteurs de règles coutumières, il n'en demeure pas moins qu'ils ont vocation à l'être. Toutefois, la

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succession d'un certain nombre de comportements, ne suffît pas à établir l'existence d'une pratique constitutive d'une coutume. Encore faut-il que cette pratique soit pertinente, qu'elle présente certaines caractéristiques.

2 - Les conditions relatives aux caractéristiques de cette pratique

Pour identifier des règles coutumières, la Cour utilise une méthode inductive. Elle commence par recenser les différents comportements. Cependant, elle ne prend uniquement en compte que ceux qui se sont développés dans des conditions identiques à celles du litige45. Puis, elle examine ces différents comportements. Ceux-ci doivent présenter certaines caractéristiques. Toutefois, la Cour utilise différents critères et la terminologie est souvent fluctuante. Pour autant, trois grandes caractéristiques semblent ressortir de la jurisprudence de la Cour. La pratique doit être continue, générale et s'inscrire sur une certaine durée.

Tout d'abord, un comportement isolé ne saurait à lui seul permettre d'établir une pratique. Il est nécessaire que différents comportements se répètent de manière à présenter une certaine continuité. Ainsi, la Cour exige que la pratique soit constante et uniforme46. Le caractère constant implique que les précédents doivent s'étaler dans le temps. Quant à l'uniformité, elle s'apprécie au regard de la concordance des différents actes. Ils doivent être semblables, les uns aux autres47. Néanmoins, dans la pratique quelques distorsions ou incertitudes peuvent surgir. La Cour appréciera alors si ces contradictions ont pu empêcher la formation d'une norme coutumière48. Elle envisage l'uniformité de la pratique de manière générale. Elle ne prête donc pas trop d'importance aux dérogations mineures voire insignifiantes49.

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Ensuite, aux termes de l'article 38 § 1 b) du Statut de la C.I.J., les règles coutumières sont issues d'une pratique générale50 et non unanime51. Aussi la Cour, dans l'affaire des Pêcheries norvégiennes, a fait mention d'une pratique « généralement adoptée » . Il va sans dire qu'elle dispose d'un large pouvoir discrétionnaire pour apprécier cette généralité. Elle a néanmoins précisé dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord que la pratique doit non seulement être large et représentative mais également comprendre les Etats particulièrement intéressés53. Elle se livre donc à une appréciation à la fois quantitative54 et qualitative55 de la généralité de la pratique.

Enfin, pour qu'une pratique continue et générale puisse engendrer une coutume, encore faut-il qu'un certain laps de temps se soit écoulé. La durée sert à la fois « à constituer la norme nouvelle et à éprouver sa valeur juridique »56. En dépit de ces considérations, la durée a toujours fait l'objet d'une appréciation assez imprécise et variée. C'est une fois encore dans son arrêt sur le Plateau continental de la mer du Nord que la C.I.J. est venue clarifier le droit. Elle a en effet déclaré que « le fait qu 'il ne se soit écoulé qu 'un bref laps de temps ne constitue pas nécessairement en soi un empêchement à la formation d'une règle

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de droit international coutumier »57. En consacrant l'accélération du processus de formation coutumier, la Cour à sans aucun doute fait preuve de réalisme58. Néanmoins, elle s'abstient de fixer une éventuelle durée. Il faut procéder au cas par cas.

Ces trois grandes caractéristiques ressortent de la jurisprudence de la C.I.J.. Néanmoins, d'une affaire à l'autre, le juge mettra plus ou moins l'accent sur l'un ou l'autre des différents critères. Il pourra également infléchir certaines de ces exigences. Au demeurant, il ne saurait en aller autrement, car ce sont des appréciations qui sont faites in concreto. Ceci explique que le juge «préfère sans doute garder une certaine liberté dans l'utilisation de ces termes »5 . Mais, la pratique en elle seule ne peut attester de l'existence d'une règle coutumière. Encore faut-il que les sujets de droit aient la conviction que cette pratique est juridiquement obligatoire.

B - L'exigence d'une conviction juridique : une exigence toujours aussi malaisée à appréhender

Depuis son apparition au XIX*1"6 siècle, Yopinio juris n'a eu de cesse de faire l'objet de nombreuses controverses60. Il est en effet très difficile de dire ce qu'est Yopinio juris. Pourtant, il ressort de la jurisprudence de la Cour que cette notion impalpable est fondamentale dans la détermination des normes coutumières (1). Une partie de la doctrine a cependant émis des doutes quant à la nécessité, dans un recours contentieux, de prouver Yopinio juris. Si la Cour reconnaît que cette preuve est délicate à rapporter, elle n'en exige pas moins qu'on la lui démontre (2).

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1 - L'opinio juris : une notion impalpable et pourtant fondamentale

Par opposition à la pratique - élément objectif -, Yopinio juris - élément subjectif61 - fait naturellement l'objet de nombreuses polémiques. Les critiques les plus vives viennent des partisans de la théorie pure du droit. Selon eux, cette notion s'expose à deux critiques. D'une part, admettre l'existence de Yopinio juris équivaut à reconnaître que toutes les coutumes naissent d'une erreur. En effet, si au moment où la règle est en train de se former, l'Etat croit qu'un comportement donné est obligatoire, c'est-à-dire imposé par une règle internationale, alors qu'en fait la règle n'existe pas encore, il est évident que l'Etat se trompe. D'autre part, il est impossible de prouver l'élément psychologique62. C'est pourquoi il est nécessaire de renoncer à Yopinio juris. Mais cette conception a été infirmée par la jurisprudence internationale63.

Avant l'institutionnalisation de la Cour permanente de Justice internationale, aucun arbitrage n'avait fait mention de l'élément subjectif. C'est la C.PJ.I. qui, la première, y a fait référence. Dans l'affaire du Lotus, en effet, elle a précisé que « c 'est seulement si l 'abstention était motivée par la conscience d'un devoir de s'abstenir que l'on pourrait parler de coutume internationale »64. Quarante ans plus tard, la C.I.J. a repris ce passage dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nora*5. Elle a ainsi à son tour consacré explicitement l'exigence de Yopinio juris en tant qu'élément constitutif de la coutume. Sous jacente dans ses arrêts antérieurs, cette notion est reprise de nombreuses fois dans l'affaire précitée66. L'élément subjectif est dès lors indispensable. Comme le précise la Cour, lui seul permet de dissocier la coutume de l'usage67 et de la courtoisie internationale. Mais si Yopinio juris a fait l'objet d'une consécration

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jurisprudentielle, il n'en demeure pas moins que sa définition reste problématique.

Les volontaristes et les objectivistes estiment nécessaire la réunion des deux éléments pour que soit consacrée l'existence d'une coutume. Cependant, ils ne s'entendent pas sur la nature de Y opinio juris6* . Pour les volontaristes Yopinio juris est un assentiment tandis que pour les objectivistes il s'agit d'un sentiment69. La Cour, quant à elle, pour désigner l'élément subjectif utilise les termes de « sentiment », « conviction », « conscience » ou encore « croyance ». Au-delà des nuances qui les séparent, tous ces termes, souligne le Professeur HAGGENMACHER, « ont en commun de relever du domaine de la connaissance ; inversement, aucun d'entre eux ne se rattache au domaine de la volonté»10. En définitive, la Cour évite d'employer toute terminologie qui risquerait de rappeler une conception volontariste. U opinio juris, selon le Professeur RUIZ-FABRI, «est en quelque sorte l'état d'esprit dans lequel un comportement déterminé est adopté»11. En fait, pour qu'il y ait opinio juris, il faut que les auteurs des actes aient la conviction de se soumettre à une obligation. Il faut donc rechercher le motif de leur action. Mais les Etats s'abstiennent généralement d'exprimer leur conviction de se conformer à une obligation juridique. Ils se ménagent ainsi « un moyen commode d'éluder une règle de droit qui se révélerait ultérieurement défavorable à leurs intérêts »72. Dès lors, la preuve de Y opinio juris est des plus délicate à rapporter.

2 - L'opinio juris : une preuve toujours délicate à rapporter

La simple répétition des précédents ne suffit pas à prouver l'existence d'une coutume. Encore faut-il démontrer la motivation de ce comportement73, c'est-à-dire que si les Etats ont agi ou à l'inverse se sont abstenus d'agir, c'est parce qu'ils s'y sentaient obligés. Ainsi, une action ne témoigne pas forcément de

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la présence d'une opinio juris. Il faut vérifier que cette action résulte de la volonté de son auteur de respecter une règle qu'il considère comme obligatoire74. De même, on ne saurait prouver l'existence d'une coutume dans la simple abstention des Etats prise en tant que telle. La Cour doit vérifier que cette abstention était motivée par un sentiment d'être obligé de s'abstenir75. Enfin, le silence d'un Etat intéressé face aux prétentions d'un autre Etat, doit également être analysé. Dans certaines hypothèses, en effet, celui-ci peut être interprété comme un acquiescement76.

Lorsqu'une coutume est opposable à un Etat, celui-ci est juridiquement obligé de la respecter - du moins tant qu'elle n'est pas désuète. Il ne peut répudier à sa guise une coutume qui le gène77. En revanche, il peut contester cette coutume quand elle est en voie de formation : c'est la théorie de l'objecteur persistant78. Ainsi, un Etat qui se serait constamment opposé à la formation d'une norme coutumière pourrait se voir dispenser de l'application de cette règle. Elle lui sera inopposable. Mais cette théorie intéresse surtout la doctrine. Elle n'est que très peu utilisée en pratique79. La Cour l'a examiné dans

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les affaires du Droit d'asile*0 et des Pêcheries norvégiennes*1. Elle n'y a cependant fait référence qu'en tant que dicta. Les deux affirmations étaient sans influence sur la résolution du cas concret. Elle avait en effet pris soin de démontrer que la coutume n'existait pas, avant d'affirmer que même si elle avait existé elle n'aurait de toute façon pas été opposable . Cette doctrine ne trouve donc pas véritablement d'écho dans la jurisprudence83.

La pratique et Y opinio juris sont indépendants l'un de l'autre. Aucune hiérarchie ne peut être dégagée. Comme le souligne le Professeur SUR, « ils renvoient en quelque sorte l'un à Vautre, la pratique contenant les signes de P opinio juris, et celle-ci donnant un sens à la pratique lui conférant la pertinence requise »84. Pour faire état d'une coutume devant la C.U., il faut rapporter la preuve d'une pratique et d'une opinio juris. Ces deux éléments distincts doivent être convergents. La Cour dispose bien entendu d'un large pouvoir discrétionnaire dans l'appréciation de chacun des deux éléments. Néanmoins elle doit se soumettre aux critères qu'elle impose aux parties. Or, en droit de la mer, elle ne s'attache pas à définir longuement chacun des deux éléments. Pour dégager des coutumes en ce domaine, la C.I.J. semble davantage recourir à une démarche prétorienne qu'à l'application de critères qu'elle a pourtant elle-même posée.

II - La démarche prétorienne de la cour dans la détermination de la coutume en droit de la mer

Le droit coutumier passe souvent pour être un droit prétorien, tant la coutume procure à l'interprète un large pouvoir d'appréciation. La Cour,

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cependant, a été conduite à poser les critères qui balisent sa démarche. Aussi, pour constater l'existence d'une coutume, elle utilise la doctrine des deux éléments85. Son pouvoir d'appréciation est dès lors canalisé. Cela dit, pour certains auteurs86, la référence faite par la Cour à cette doctrine n'est que de pure forme ou du moins destinée à l'usage exclusif des parties. La C.I.J. jouirait alors d'un pouvoir totalement discrétionnaire pour constater ou non l'existence d'une coutume. En fait, de manière générale, le juge semble se soumettre à la doctrine des deux éléments, avec souplesse il est vrai (A). En droit de la mer, en revanche, la nature coutumière de certaines règles dégagées par lui soulève nombre d'interrogations. Dans ce domaine, la Cour a apprécié chacun des deux éléments discrétionnairement (B).

A - Une application en souplesse de la doctrine des deux éléments par la Cour

Savoir si la Cour applique véritablement la doctrine des deux éléments est une question vivement discutée (1). Mais pour pouvoir porter un jugement sur la façon dont la Cour procède, encore faut-il préciser qu'il lui est de toute façon impossible de faire une application mécanique de cette doctrine (2).

1 - L'application discutée de la doctrine des deux éléments par la Cour

Lorsque l'on examine la jurisprudence de la Cour, on constate qu'elle ne fait que très exceptionnellement référence à chacun des deux éléments. Il lui arrive de constater l'existence d'une coutume en ne s'appuyant que sur un seul élément87 voire sur aucun des deux88. Pour autant, ce n'est pas parce que cette

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recherche ne transparaît pas de ses arrêts, qu'elle ne les a pas examinés. Le juriste français est habitué à interpréter largement les décisions du Conseil d'Etat qui a un style presque impérial. En revanche, la Cour internationale de Justice délaie beaucoup à l'image des juridictions anglo-saxonnes89. Ses arrêts, qui comportent de nombreuses pages, sont d'habitude très détaillés90. C'est pourquoi, lorsque la Cour pose un principe comme coutumier, on a l'impression qu'elle n'a effectué aucune recherche. Or les arrêts de la Cour ne témoignent pas fidèlement de tout le travail accompli par les juges. Selon le Président GUILLAUME, la Cour opère une vérification très attentive de chacun des deux éléments. Par exemple, dans l'arrêt Gabcikovo-Nagymaros, pour examiner la question de l'état de nécessité, la Cour ne s'est pas uniquement appuyée sur l'article 33 du projet de la C.D.I. sur le droit de la responsabilité91, comme cela semble ressortir à la lecture de l'arrêt. Elle a examiné l'ensemble des précédents cités dans le rapport Ago92.

Il est en outre reproché au juge de n'utiliser Yopiniojuris que dans un rôle négatif. Certains auteurs93 rappellent ainsi que la Cour ne s'est occupée de cet élément que dans les cas où elle a refusé de consacrer une règle coutumière94. Mais cette critique a été contredite par la jurisprudence. En effet, dans l'affaiie des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, la C.I.J. a fait une application positive de Yopiniojuris95. En fait, comme la recherche de

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l'élément subjectif n'est pas très commode96, le juge utilise souvent une méthode inductive. Ainsi, rappelle le Professeur GOUNELLE, « la cohérence de l 'élément matériel fait présumer l'élément psychologique : un faisceau d'actes juridiques convergents, ayant le même objet et accomplis dans des circonstances semblables, laisse supposer qu'ils sont tous fondés sur le même motif déterminant : se conformer à une obligation juridique »97.

Toutefois, le Président GUILLAUME reconnaît que la Cour a peut- être eu tendance à examiner les deux éléments de manière trop rapide. Aussi, estime-t-il que « la Cour doit faire preuve d'une certaine circonspection dans ce domaine, qu'elle doit procéder à des examens attentifs, à des analyses approfondies »98. La C.I.J. n'étoffe jamais sa démonstration de nombreux exemples99. Quand le caractère coutumier de la règle n'est pas contesté cela peut se comprendre100. Mais de manière générale, la Cour devrait faire apparaître plus en détail sa recherche. Il est toujours plus rassurant qu'elle démontre l'existence d'une coutume, surtout lorsqu'elle est récente. De surcroît, la démonstration de la Cour devrait être d'autant plus étayée que la règle coutumière qu'elle consacre remet en cause une coutume bien établie.

C'est donc avec une certaine flexibilité que la Cour applique la doctrine des deux éléments. Au demeurant, il lui est impossible d'en faire une application mécanique.

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2 - L'impossibilité pour la Cour de faire une application mécanique de la doctrine des deux éléments

Le processus coutumier est rebelle à toute systématisation. Dès lors, comme le rappelle le Professeur DUPUY, la doctrine des deux éléments est « indiscutablement une présentation extrêmement formelle d'une réalité beaucoup plus complexe »101. Elle n'en est pas moins fortement utile dans la recherche de l'existence des normes coutumières102. Il est vrai que celle-ci peut être difficile à mettre en œuvre. Comme le rappelle le Président GUILLAUME, « les relations entre Topinio juris et la pratique sont parfois ambiguës »103. Pour autant, on ne peut, à l'instar du Professeur HAGGENMACHER, soutenir que ces deux éléments n'en forment qu'un seul104. Ils conservent leur individualité propre. Néanmoins, ils sont enchevêtrés105 dans un seul et unique processus : le droit coutumier. Aussi, inévitablement, il y a dans l'administration de la preuve de la coutume par le juge, rappellent les Professeurs DAILLIER et PELLET, « souvent un certain "télescopage " des démonstrations relatives aux éléments matériels et psychologiques »106. Il est dès plus difficile pour le juge d'extérioriser sa démarche, de mettre en exergue chacun des deux éléments.

En outre, il ne faut pas oublier que le juge international est avant tout un juge. Aussi, comme pour le juge interne, il faut tenir compte du syllogisme judiciaire. Les juges partent souvent du résultat à obtenir pour trouver ensuite les arguments propres à étayer ce choix. Ainsi, pour reprendre le Professeur SUR, « il a souvent été souligné, y compris par les juges eux-mêmes, que la motivation n'exprime pas la démarche réellement suivie pour aboutir à la décision prise »107.

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Enfin, il faut tenir compte des particularités du règlement judiciaire international. Celui-ci repose sur l'acceptation facultative de la compétence de la Cour. Elle juge des Etats. Aussi, dans sa politique judiciaire, la C.I.J. doit nécessairement prendre en compte les positions des parties et ce que ces dernières sont capables d'accepter. Elle doit donc envisager les conséquences pratiques de sa décision, pour elle comme pour les parties au différend108. Pour autant, même si des considérations extra-juridiques interviennent, la décision n'en est pas moins rendue en droit c'est-à-dire en respectant ses indications essentielles, telles qu'elles sont dégagées et interprétées par la Cour109. Le juge se soumet en général aux critères qu'il impose aux parties. Mais, compte tenu des particularités du contentieux international, il utilisera plus ou moins, selon les espèces, la flexibilité que lui procure la coutume. Néanmoins, force est de constater qu'en droit de la mer, le juge s'est octroyé une très large liberté dans l'interprétation de chacun des deux éléments de la coutume.

B - L'appréciation discrétionnaire de chacun des deux éléments par le juge en droit de la mer

En matière de délimitation maritime, la Cour n'a accordé que très peu d'importance à une pratique étatique pourtant abondante. Elle a utilisé l'élément dit objectif, de manière tout à fait subjective (1). Quant à Vopinio juris, elle a très largement eu recours à son caractère malléable (2).

1 - Une utilisation subjective de la pratique

A différentes reprises, la Cour a souligné l'importance de la pratique étatique dans la formation des règles courumières110. Pourtant, en dépit de ces affirmations expresses, on remarque qu'en droit de la mer, la pratique a souvent été utilisée à titre subsidiaire. Par exemple, dans l'affaire Libye/Malte, la Cour écarte l'argument libyen fondé sur la « masse terrestre » dans la mesure où celle- ci n'a «jamais été prise comme fondement du titre sur le plateau continental»111. Elle observe ensuite que «cette thèse ne trouve aucun appui dans la pratique des Etats, dans la jurisprudence, dans la doctrine, ni dans les

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travaux de la troisième Conférence des Nations Unies sur le droit de la Mer »112. La Cour ne se sert ainsi de la pratique qu'à titre illustratif113. Elle ne justifie aucunement l'existence de normes coutumières114. Cependant la pratique n'a pas systématiquement été utilisée par la Cour à titre illustratif. Elle a pu également être arbitrairement écartée. Le refus longtemps manifesté par la Cour d'accorder la moindre place à la règle de l'équidistance115 dans l'opération de délimitation maritime, en est un exemple particulièrement révélateur.

Invoquée en 1969 pour la première fois devant le juge, la Cour a estimé que la règle de l'équidistance n'était pas devenue une norme coutumière en raison d'une pratique incertaine116, et de l'absence d'opinio juris. Cette position qui pouvait à la rigueur se comprendre en 1969117, est apparue par la suite, de plus en plus contestable118. En fait, la Cour, tout en insistant sur V « importance de la pratique étatique »119, s'est obstinée à refuser d'y voir une règle coutumière pour deux raisons. D'une part, la pratique, selon elle n'était pas encore « suffisamment étoffée et convaincante »120. Or cet argument est d'autant plus discutable que dans l'affaire Libye/Malte, la C.I.J. elle-même souligne que plus de soixante-dix accords ayant employé la méthode de l'équidistance- circonstances spéciales pour la délimitation du plateau continental ont été

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recensés121. D'autre part, d'après la Cour, chaque cas concret est différent des autres. C'est un unicum122. En conséquence, «des considérations d'ordre statistique ne sauraient être un indice ni de la nature plus ou moins appropriée de l'une ou l'autre des méthodes, ni d'une tendance quelconque en faveur de celle-ci que révélerait le droit international coutumier »123. Ainsi, dans la mesure où chaque situation est spécifique, la Cour ne peut accorder aux différentes délimitations valeur de précédent, quel que soit leur nombre. Mais cet argument n'est pas non plus convaincant. Comme le souligne le Professeur WEIL, « // pourrait être avancé dans tous les domaines, et pas seulement en matière de délimitation maritime, et il interdirait à la limite toute création d'une règle

, , , , r 124

coutumiere a partir a un usage répète » .

Cependant, la Cour n'écarte pas automatiquement la pratique des Etats en la matière. En effet, dans certaines hypothèses, remarque le Professeur WEIL, « les arrêts, loin de refuser toute valeur de principe à la pratique, en tirent au contraire une conséquence juridique précise, mais négative : puisque certaines délimitations conventionnelles écartent l'équidistance, la règle coutumiere ne saurait accorder une place privilégiée à cette méthode. Les accords non équidistants pèsent ainsi plus lourd aux yeux de la jurisprudence que les accords équidistants, et leur force probatoire est plus grande»125. Finalement, la Cour attache plus d'importance à la pratique de la minorité qu'à celle de la majorité126. Il suffit simplement que cette pratique condamne la règle de l'équidistance. En fait, pour la C.I.J., si la pratique montre « de façon frappante que la méthode de l 'équidistance peut, dans bien des situations, produire un résultat équitable » elle « ne suffit pas à prouver l'existence d'une règle prescrivant le recours à l'équidistance ou a toute autre méthode » 27. Ainsi, malgré l'abondante pratique des Etats128, la Cour refuse de tirer les enseignements d'une pratique conventionnelle pourtant abondante129.

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Manifestement en droit de la mer, la Cour utilise la pratique en toute opportunité130. Si cette dernière va à rencontre de ses vues, elle l'écarté délibérément en la jugeant insuffisante. A l'inverse, même si elle n'est pas fournie, cela n'empêche en rien la Cour de consacrer une coutume. Dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord, la C.I.J. a écarté le principe de l'équidistance au nom de la délimitation selon des principes équitables. Ces principes équitables ont valeur coutumière d'après elle. Cependant, la Cour n'a fait référence qu'à la proclamation Truman131. Elle n'a pas montré que cette règle a été suivie d'une pratique abondante et générale132. Elle l'a simplement justifié en se fondant sur des «principes très généraux de justice et d'équité »133, c'est-à- dire selon le Professeur LANG, «par sa propre conviction »134. Mais, si déjà le juge utilise la pratique de façon somme toute discrétionnaire135, c'est véritablement au travers de Vopinio juris que son pouvoir est considérable. En droit de la mer, la Cour ne s'est pas privée de recourir au caractère malléable de Yopinio juris.

2 - Le recours au caractère malléable de l'opinio juris

Vopinio juris donne incontestablement une très large marge de manœuvre au juge. Elle lui permet en effet d'écarter plus aisément une règle dont

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il pense en son fors intérieur, qu'elle n'est pas opportune136. S 'agissant de l'équidistance, il convient dans une certaine mesure de relativiser les critiques qui ont été faites précédemment. Si indiscutablement la Cour méconnaît la pratique en la matière, il n'en demeure pas moins que d'une certaine manière Vopinio juris a pu faire défaut. En effet, lorsque les Etats recourent à la méthode de l'équidistance en matière de délimitation maritime, ils ne le font pas, précise la Cour, parce qu'ils s'y sentiraient «juridiquement tenus par une règle obligatoire de droit coutumier [. . .] d'autres facteurs ont pu motiver leur action»131 . Il est sans doute vrai que certains Etats utilisent cette méthode au nom de considérations de droit, mais que d'autres le font simplement pour des raisons d'opportunité138. Cela dit, on peut se demander avec le Professeur WEIL, «comment contester que l'usage répété peut, par sa répétition même, laisser présumer l'existence de la composante psychologique de la coutume»139. L'accumulation d'une pratique abondante et cohérente peut donner naissance à Vopinio juris. Au demeurant, comme le rappelle le Juge de VISSCHER « quand l 'élément matériel ne fait pas de doute en raison de la cohérence comme de la durée d'une pratique, la Cour assez généralement en induit l'existence de /'opinio juris »140. En outre, l'élément subjectif peut très certainement se fonder sur la base de critères permissifs et non seulement prohibitifs ou prescriptifs141. Comme le précise la Chambre dans l'affaire Golfe du Maine, « il ne faut pas confondre l'absence d'une obligation de faire avec une obligation de ne pas faire »142. L'exemple de la Z.E.E. est de ce point de vue flagrant. Les Etats ont proclamé des Z.E.E. parce qu'ils ont eu le sentiment qu'ils pouvaient le faire et non parce qu'ils y étaient obligés. Dès lors, du fait de la pratique des Etats, ce concept a acquis valeur coutumière143. Ainsi, on peut dire avec le Professeur WEIL que « la pratique conventionnelle de l'équidistance établit à tout le moins une opinio juris selon laquelle le recours à cette méthode est juridiquement indiqué dans des situations variées, parce que conduisant dans ces situations à un résultat équitable »144.

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Indiscutablement, les Etats établissent ces accords de délimitation en recourant tout d'abord à l'équidistance. Ils n'hésitent pas à la corriger par la suite si la ligne de délimitation leur paraît inéquitable. Cette conduite relève sans conteste d'une pratique abondante. La C.I.J., pourtant, refuse toute consécration coutumière. Cette attitude est d'autant plus paradoxale que la Cour a quasiment toujours commencé par tracer une ligne médiane qu'elle a ensuite corrigée145. Au demeurant, dans l'affaire Jan Moyen, la C.I.J. est revenue sans le dire sur ces affirmations146.

Pour procéder à des délimitations maritimes la Cour a rejeté la règle de l'équidistance. Elle n'en a pas moins dégagé une « norme fondamentale »147 de nature coutumière. Celle-ci consiste en la recherche d'une solution équitable. Mais l'origine coutumière de cette dernière apparaît cependant problématique. En effet, la pratique en la matière est loin d'être fournie. S'agissant de Vopinio juris, la Cour estime que cette « norme fondamentale » se dégage de la « conviction juridique [...]de l'ensemble des Etats »148. Pour autant, l'origine du caractère obligatoire de cette norme ne semble pas vraiment être issue de Vopinio juris des Etats. En effet, si on prend le soin d'observer avec le Professeur DUPUY « la façon dont la Cour a posé cette "norme fondamentale" dans l'arrêt de 1969, on remarquera qu'affirmant l'autorité de la règle au § 85 de son arrêt, elle parle bien à son propos <f 'opinio juris, en renvoyant à ses développements antérieurs ( § 48 et surtout 55) lesquels parlent en effet d'opinion, mais de celle des juristes de la Commission de Droit international et de la doctrine, non de celle des Etats [...]. Ainsi la règle fondamentale en matière de délimitation maritime, posée en 1969, ne reposait-elle pas davantage que le rejet de l'équidistance sur la pratique des Etats »149. C'est pourquoi, on peut dire avec le

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Professeur WEIL que la coutume dont il est fait application en droit de la délimitation maritime n'est peut-être pas la même coutume qu'ailleurs150. Ici, le contenu des normes coutumières ne résulte plus de la conjonction de Yopinio juris et de la pratique. Il trouve sa source directement dans le pouvoir normatif du juge. En effet, poursuit le Professeur WEIL, dès lors que la Cour « estime pouvoir, ou devoir, définir les normes coutumières, indépendamment de l 'usage des Etats, la jurisprudence se trouve condamnée, faute d'autres points d'appui, à énoncer elle-même directement ces normes [...]. La norme coutumière n'a pas pris corps avant que le juge international n 'en énonce le contenu ; elle existe uniquement grâce à cette énonciation qui lui donne vie et lui confère une existence propre »151. La coutume en droit de la mer est ainsi désincarnée152. Cette très grande liberté dont a usé le juge n'est pas propre au droit de la mer153. Néanmoins, elle a été particulièrement marquée en ce domaine.

En fait, cette attitude doit être appréciée au regard du contexte dans lequel le juge a été amené à statuer. Des années durant, le droit de la mer a demeuré dans l'incertitude la plus totale. Il a été confronté à des problèmes nouveaux sur lesquels les Etats ne s'entendaient pas sur les solutions à donner. La succession des conventions et la longueur des conférences de codification ont entraîné un vide conventionnel. Aussi, la coutume, telle que dégagée par le juge, a été pendant longtemps le palliatif à l'incertitude juridique longtemps constatée en ce domaine. La jurisprudence, moyen auxiliaire de détermination des règles de droit, a donc ici remplit la mission d'une source primaire et directe du droit. Le droit de la mer est en effet, l'un des domaines, sinon le principal, dans lequel la Cour a fait ressortir toute la splendeur de son pouvoir normatif, ignoré par l'article 38 de son Statut.

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III - La coutume en droit de la mer : manifestation évidente du pouvoir normatif de la cour

En vertu de l'article 38 § 1 d) du Statut de la C.I.J., la jurisprudence et la doctrine constituent « un moyen auxiliaire de détermination des règles de droit ». Dès lors, elles ne créent pas de règles de droit. Elles ne peuvent que contribuer à faire reconnaître le droit, qui est, par rapport à elles, antérieur et extérieur. Cela dit, si cette affirmation semble aujourd'hui correspondre au rôle joué par la doctrine154, elle l'est beaucoup moins s'agissant de la jurisprudence. En droit de la mer, particulièrement, les décisions de la C.I.J. ont très largement contribué à la création des règles de droit. Dans ce domaine, la jurisprudence de la Cour n'a rien d'une source auxiliaire155 mais tout d'une source principale (A). La C.IJ. a ainsi pris des libertés par rapport à l'article 38. Cependant, elle n'avait guère le choix. En droit de la mer, en effet, il lui était impossible de s'en tenir à la lettre de son Statut si elle voulait pouvoir trancher les différends (B).

A - La jurisprudence de la Cour en droit de la mer : source principale et non auxiliaire du droit

L'article 38 du Statut de la Cour ne reconnaît pas la qualité de source principale à la jurisprudence. En outre, les décisions de la C.IJ. sont frappées de l'autorité relative de la chose jugée. Pourtant, en pratique, l'influence exercée par les arrêts de la Cour dépasse souvent le cas d'espèce (1). En droit de la mer, cette importance est d'autant plus marquée que la C.IJ. ne s'est pas contentée de dire le droit. Elle l'a également créé. Elle a ainsi fait une lecture audacieuse de l'article 38 de son Statut (2).

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1 - Les arrêts de la C.I.J. : des arrêts exerçant une influence au-delà du cas d'espèce

Le Professeur SCELLE considère que la jurisprudence est une véritable source formelle du droit. Pour ce faire, il faut partir du principe de l'unicité de l'acte juridictionnel, quelle que soit la nature du système de droit envisagé. Or, la quasi-totalité des ordres juridiques nationaux consacrent le caractère normatif de l'acte juridictionnel. Aussi, par un raisonnement analogique, on en déduit qu'il doit en être de même en droit international. Dès lors, si l'on retient cette hypothèse, il y aurait une sorte de transposition en droit international de la solution anglo-saxonne de l'autorité normative générale de la jurisprudence fondée sur le principe du stare decisis (autorité du précédent juridictionnel)156. Mais, cette argumentation se heurte à la réalité juridique. Le droit international positif n'a pas consacré ce principe du stare decisis.

L'article 38 § 1 d) affirme que la jurisprudence n'est qu'un « moyen auxiliaire de détermination ». Elle doit se borner à interpréter et à appliquer le droit. En outre, il fait expressément référence à l'article 59 du même Statut. Or, ce dernier précise que les décisions de la Cour sont frappées de l'effet relatif de la chose jugée157. Si bien que par l'effet conjugué de ces deux dispositions, il ressort que le droit international ne consacre pas le principe du stare decisis. Cette solution, cependant, relève de la nécessité et non du choix. En effet, rappelle le Professeur CONDORELLI, ce principe « est étroitement lié - dans les ordres juridiques intéressés - à l'existence d'un pouvoir judiciaire à travers lequel s'exprime la puissance de l'institution étatique. Par contre, la non- institutionnalisation du droit international [...] rend inconcevable une quelconque efficacité obligatoire erga omnes du précédent »158. Les décisions judiciaires n'ont qu'une simple valeur indicative. Elles ne s'imposent pas comme source formelle, c'est-à-dire en tant que telles, de manière automatique et

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obligatoire au juge159. Pour autant, en dépit de ces dispositions statutaires, la Cour en pratique insiste sur la continuité jurisprudentielle caractéristique des traditions anglo-saxonnes. Elle se réfère très souvent à sa «jurisprudence constante ». Elle ne manque pas de s'appuyer sur ses décisions antérieures. Dans l'affaire du Golfe du Maine, la Chambre rappelle que l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord est « la décision judiciaire qui a le plus contribuée à la formation du droit coutumier en la matière »160. Dans sa jurisprudence en droit de la mer, notamment, elle n'a de cesse de mentionner ses décisions antérieures161. Au demeurant, le Président WINIARSKI a rappelé que la Cour, même si elle n'est pas liée par le principe du stare decisis comme critère ou règle, s'efforce de s'attacher aux précédents et le résultat est « une remarquable unité de jurisprudence, facteur important de développement du droit international »162. Dans l'affaire du Plateau continental de la mer Egée, la Cour a admis explicitement qu'en dépit du principe de l'effet relatif de la chose jugée, un raisonnement et une conclusion juridique de sa part pourraient être invoquée directement dans les rapports entre des Etats tiers163. Ainsi, rappelle le Professeur THIERRY, « les décisions de la Cour composent pleinement une jurisprudence, c 'est à dire un ensemble de décisions qui ont un lien entre elles et s 'appuient les unes sur les autres pour former un tout cohérent »164 '. La portée juridique des arrêts de la Cour va au-delà des solutions données aux différends sur lesquels elle

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se prononce165. Cette importance sera d'autant plus marquée que la décision intervient dans un domaine de faible densité normative, comme le droit de la mer. Dans cette matière, par exemple, les décisions de la Cour sont loin d'être sans incidence sur le contenu des accords de délimitation. Les Etats sont certes libres lors des négociations d'y inclure les dispositions de leur choix, quelles soient ou non fondées en droit. Mais leur indifférence à l'égard des principes dégagés par le juge n'est jamais complète166. La Cour jouit d'une autorité morale sur les Etats167. Ses décisions contribuent à la formation de la coutume. Parfois même, elles vont jusqu'à la créer. Dans un tel cas, la Cour fait une lecture audacieuse de son Statut.

2 - Une lecture audacieuse de l'article 38 de son Statut par la Cour

Nonobstant les dispositions restrictives de son Statut, la C.I.J. ne s'est pas bornée à une fonction d'interprétation et d'application du droit. Il est de toute façon artificiel de vouloir isoler l'interprétation de la création. Il y a nécessairement une infime part de création, « un complément interstitiel »168 lorsque le juge se prononce. Les décisions judiciaires concourent au développement du droit169. Le Professeur ABI-SAAB a recensé trois procédés170 par lequel le juge contribue à la substance normative des règles. Ce peut-être lorsqu'il est amené à spécifier le contenu d'une règle, à la reformuler de manière plus générale171 ou encore à la formuler. Dans cette dernière hypothèse, ce qui est nouveau, ce n'est pas la règle mais sa formulation. Le juge se contente de dégager une règle latente dans la pratique. «La décision judiciaire agit simplement comme "sage femme" ou "révélateur" en l'aidant à voir le jour »172. Néanmoins, les règles coutumières dégagées par le juge en droit de la mer étaient loin d'être latentes dans la pratique. Plus que les révéler, le juge les a

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véritablement créées. Dans ce domaine, comme le rappelle le Professeur WEIL, le droit coutumier « n 'est pas autre chose que du droit prétorien »173.

En effet, en matière de délimitation maritime, la Cour a fait véritablement œuvre créatrice. Les principes dégagés par la C.I.J. en 1969 n'avaient rien de coutumier. Mais, soucieuse de ne pas susciter la crainte des Etats174, elle a présenté ces derniers comme étant le produit d'un processus coutumier. De la sorte, précisent MM. LUCCHINI et VOELCKEL, « les apparences sont sauves, l'œuvre de création normative est habillée du parement coutumier ». Ensuite, la Cour au travers de ses différents arrêts, a continué à s'appuyer sur une coutume, dont l'origine était prétorienne. Au fil des affaires, elle s'est efforcée d'en préciser la signification et la portée. Enfin, dans l'affaire Jan Moyen, la C.I.J. lève le masque. Elle fait part du « droit coutumier du plateau continental tel qu'il s'est développé dans la jurisprudence »115 . Cette phrase est extrêmement lourde de sens. La Cour reconnaît ainsi expressément l'existence de règles coutumières qui «découlent directement de la seule intervention du juge et non pas de coutumes qu'il se serait contenté de constater et qui ne devraient guère à son action »176. Le juge admet explicitement qu'il a créé ces règles. Pour autant, on ne doit pas s'offusquer de ces libertés prises par la Cour vis-à-vis de son Statut. En 1936, déjà, le Professeur BASDEVANT invitait la C.I.J. « à ne pas s'en tenir à la lettre d'un texte dont l'expression est défectueuse »177. En fait, il semblerait que cet article ait méconnu l'importance véritable de la jurisprudence, du moins dans certains domaines. En droit de la mer, en effet, il était impossible pour la Cour, de trancher les différends en s'en tenant à une interprétation stricte de l'article 38 de son Statut.

B - L'impossibilité pour la Cour de s'en tenir à la rédaction de l'article 38 de son Statut en droit de la mer

Le droit de la mer a été un terrain largement propice à la création prétorienne en raison de l'évanescence des normes applicables (1). Il le demeure aujourd'hui encore dans une moindre mesure. Le juge est toujours amené à

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exercer un rôle de « suppléance législative »178. Aussi, la C.I.J. en droit de la mer, sous couvert du droit coutumier, a dégagé tout un corps de règles. Cette jurisprudence, dont l'évolution a pu être chaotique, n'en est pas moins largement satisfaisante (2).

1 - La prépondérance du juge en droit de la mer en raison de l'évanescence des normes applicables

La Cour a pu très largement exercer son pouvoir normatif en droit de la mer en raison du vide juridique longtemps constaté en la matière. Dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord, aucune norme conventionnelle n'était applicable. La coutume était incertaine. Ensuite, ce rôle s'est trouvé facilité par la conjonction de deux facteurs. D'une part, elle a été saisie d'un nombre élevé et divers de délimitations. Elle a de la sorte acquis une solide connaissance de la matière. D'autre part, elle a été saisie dans un contexte juridique en pleine mutation. De nouveaux besoins sont apparus alors qu'aucune réglementation internationale n'était opérante. Face à cet environnement juridique pauvre et incertain, «souvent sollicité, le juge, rappellent MM. LUCCHINI et VOELCKEL, ne pouvait qu'être encouragé à dire le droit »179. Il a ainsi longtemps bénéficié d'un large pouvoir discrétionnaire. Cela dit, l'entrée en vigueur de la Convention de Montego Bay est loin d'avoir amoindri son pouvoir. Différents éléments militent en ce sens.

En premier lieu, des Etats importants n'ont toujours pas ratifié cette convention. Dès lors, c'est le droit coutumier qui leur est opposable180. Aussi, à l'occasion d'un éventuel différend, le juge devra préciser ce qui de la Convention de Montego Bay relève désormais du droit coutumier181. Le Président GUILLAUME se demande par exemple, si les dispositions relatives à la pêche, sont aujourd'hui entrées dans le droit coutumier182.

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En deuxième lieu, la Convention de 1982, comme l'a souligné la C.I.J., est un texte de compromis183. Ceci explique que nombre de ses dispositions ont un caractère approximatif184. Selon le Professeur TREVES, « si on compare ce qu'il y avait dans la convention de Genève sur le plateau continental avec ce que l'on a dans la Convention de Montego Bay, on peut même parler de "décodification " : on a voulu balayer le terrain pour le laisser libre au juge et aux parties »185. Dès lors, le juge, au cours des différents litiges dont il a été saisi, s'est efforcé notamment de préciser les règles contenues dans les articles 74 et 83. Somme toute, c'est bien le « législateur international » qui a confié ce rôle au juge, et non le juge qui se l'ait injustement approprié. En outre, la Convention de Montego Bay est un véritable hymne à l'équité. Plusieurs de ses articles y font directement référence186. Aussi, pour ces différentes raisons, le juge dispose d'une large marge d'interprétation187.

En troisième lieu, enfin, sur bien des aspects, la Convention est sérieusement remise en cause par des accords et la coutume. L'Accord du 28 juillet 1994 opère un véritablement remaniement de la Partie XI de la Convention. Quant à l'Accord du 4 décembre 1995188, il remet en cause « l'essence même du principe de liberté de la pêche réaffirmé (même si c'est avec des limites) aux articles 87 et 116 de la Convention »189. Dans la troisième affaire des pêcheries, l'Espagne jugeait que la loi canadienne du 12 mai 1994 sur la protection des pêches côtières, s'écartait des règles pertinentes de la Convention de Montego Bay. Or cette loi était une application anticipée de l'accord précité de 1995190. Il est donc fort regrettable que la C.I.J. se soit déclarée incompétente. Elle aurait pu clarifier le droit en la matière. On peut

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notamment se demander si la loi canadienne ne traduit pas une coutume naissante voire le droit coutumier. La Convention a généré une abondante pratique étatique ; pratique qui parfois dépasse en l'altérant la lettre de ses dispositions191. Aussi certains de ses articles sont déjà marqués par le vieillissement voire la péremption. Mais le juge, avant même que cette Convention n'entre en vigueur, avait développé tout un corps de règles.

2 - L'influence positive du droit coutumier « tel que développé par la Cour »

Le juge a donc forgé tout un corps de règle en droit de la mer au travers de ses différents arrêts. La Cour a mis très largement l'accent sur l'unité de sa jurisprudence. Cela dit, il ne faut pas se fier aux apparences. La jurisprudence de la C.I.J. en droit de la mer a été quelque peu louvoyante. Elle reflète certaines contradictions192. Trois revirements majeurs méritent l'attention. Tout d'abord, dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord, la Cour a défini le plateau continental en se fondant sur la notion du prolongement naturel. Après quelques flottements, dans l'arrêt Libye/Malte, elle consacre le critère de distance193. Ensuite, il faut souligner l'évolution chaotique de l'équité. La Cour après avoir fleurté avec l'équité autonome est revenue avec l'arrêt Libye/Malte à une conception corrective de l'équité194. Enfin, sur le plan des méthodes également, la Cour n'a pas adopté un comportement uniforme. Le juge a refusé de conférer à la règle de l'équidistance la qualité de règle obligatoire195. Pourtant, dans l'affaire Libye/Malte, après s'être défendu d'admettre que l'emploi de l'équidistance pourrait constituer une « étape préliminaire et provisoire du tracé d'une ligne de délimitation »196, il en vient à l'appliquer comme méthode de premier pas197. Dans l'affaire Jan Moyen, le Danemark et la Norvège étant partie à la convention de Genève sur le plateau continental, la Cour a appliqué l'article

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6. Cependant, elle précise que « les décisions judiciaires fondées sur le droit coutumier applicable à la délimitation du plateau continental entre des côtes qui se font face ont de même considéré la ligne médiane comme une ligne provisoire »198. La C.I.J. fait ici un pas en avant dans le sens du rétablissement de la normativité perdue de l'équidistance199. Ainsi, la Cour, en dépit des nombreuses références à ses différents arrêts, a procédé à certains revirements. Si bien que les multiples allusions faites par la C.I.J. dans l'affaire Jan Moyen à ses arrêts passés traduisent « une volonté de réécrire la jurisprudence en lui donnant une cohérence rétrospective »200. Toujours est-il que même si c'est par tâtonnements, la jurisprudence a bel et bien progressivement établi un régime de la délimitation maritime. En d'autres termes, comme le rappelle le professeur Weil, la conquête de la délimitation maritime par le droit n'est pas l'œuvre de la convention ni de la coutume, mais celle de la jurisprudence201.

La consistance normative du droit international est, selon le Professeur CONDORELLI, «débitrice de l'évolution de la jurisprudence internationale »202. Ce phénomène s'explique d'après cet auteur, par le besoin ressenti par la communauté internationale «de disposer d'un minimum de certitude juridique »203 ;. Il semble donc tout à fait légitime que, dans certains domaines, la Cour, lorsqu'il y a un vide juridique, recourt à son pouvoir créateur204. D'autant que la C.I.J. n'effectue pas ce travail normatif dans un huis clos, à l'abri de toute influence extérieure. Lors de la troisième Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer, la Cour, tout en s'en défendant, a donné des directives au législateur de Caracas. Elle conseillait les parties sur les droits préférentiels et sur les droits historiques205. Mais ces conseils s'assimilaient

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facilement à des directives adressées au législateur international206. En 1982, c'est la Cour qui tient compte des nouvelles tendances du droit de la mer, qu'elle peut reprendre en les façonnant. « Un dialogue muet, soulignent MM. LUCCHINI et VOELCKEL, s'instaure entre le juge et le "législateur" international »207 . En outre, implicitement du moins, les Etats semblent être satisfaits de la façon dont la Cour s'acquitte de sa tâche. Tout d'abord, ils continuent à lui confier leurs litiges relatifs au droit de la mer208. Ensuite, de nombreuses règles dégagées par le juge en droit de la mer ont été codifiées. L'article 4 de la Convention de Genève sur la mer territoriale et la zone contiguë retient pour le tracé de la mer territoriale le système des lignes de base droite consacré par la Cour dans l'affaire des Pêcheries norvégiennes209 . De même dans ses articles 24 § 2, 37 et 38 concernant le droit de passage dans la mer territoriale et dans les détroits, la Convention de Montego Bay s'inspire de la solution retenue par la Cour dans l'affaire du Détroit de Cor/ou210. Enfin, la Convention de Montego Bay confie implicitement au juge le soin de préciser certaines de ses dispositions211.

Tout cela tend à démontrer que les Etats ne semblent pas reprocher à la Cour sa manière d'agir. En outre, pendant cette période incertaine, si la C.I.J. s'était abstenue d'exercer un quelconque pouvoir normatif, elle aurait dû se résoudre au non liquet212. Dès lors, comme le constate le Professeur CAHIER, « la prépondérance de la jurisprudence comme source du droit de la délimitation du plateau continental était probablement inévitable dans le cas d'un droit en

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formation » . Aujourd'hui encore, le juge ne peut se contenter d'une stricte application des dispositions pertinentes de la Convention, tant celles-ci sont notoirement imprécises. Ainsi lorsque la Cour, comme en matière de délimitation maritime, doit faire face à un droit inconsistant214, il est normal qu'elle use de son pouvoir normatif. L'article 38 §1 d) du Statut de la C.I.J. méconnaît l'importance fondamentale de la jurisprudence, du moins dans certains domaines. C'est pourquoi il serait souhaitable qu'il fasse l'objet d'une révision. Cela dit, il est peut probable que les Etats consentent à reconnaître expressément à la Cour un tel pouvoir. Elle risque donc de continuer à l'exercer au travers du droit coutumier215.

«Aux confins des règles coutumières, dans leurs prolongements encore mal éclairés et souvent contestés, l'interprétation judiciaire se déploie librement ; elle y remplit parfois un rôle vraiment créateur »216. Cette remarque du Professeur de VISSCHER s'applique particulièrement à la jurisprudence de la Cour en droit de la mer, compte tenu du caractère souvent prétorien de la coutume en ce domaine. Toutefois, on ne peut reprocher à la Cour d'avoir agi de la sorte. Elle a été saisie dans une période d'incertitude juridique la plus totale. Or, elle a su mener à bien les différentes délimitations dont elle a été saisie217. Sa jurisprudence est très largement reconnue en ce domaine et mérite sans aucun doute le statut de source principale du droit.

En dépit du souci d'unité affiché, la jurisprudence de la Cour en droit de la mer révèle certaines contradictions. Aussi, dans l'arrêt Jan Moyen, la Cour s'est-elle efforcée de rétablir cette unité. L'arrêt opère une véritable synthèse de

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la jurisprudence de la Cour, mais également des tribunaux arbitraux. En effet, la C.I.J. cite abondamment la jurisprudence arbitrale218, ce qui selon le Professeur DEC AUX est une première219. Mais en réalité, cette façon de faire a probablement un double objet. D'une part, il s'agit d'affirmer la cohésion de l'ensemble de la jurisprudence - de la Cour comme des sentences arbitrales. Ces dernières ont également contribué au développement des règles du droit de la mer220. C'est pourquoi, dans son arrêt de 1993, la C.I.J. évoque le rôle d'une cour et non de la Cour221. Ce faisant, elle reconnaît qu'elle n'est pas seule. Mais il s'agit d'autre part pour la C.I.J. d'affirmer sa préséance en droit de la mer à un moment où un autre organe pourrait lui faire concurrence : le Tribunal International du Droit de la Mer. Ce dernier est sévèrement décrié par les juges de la Cour222. La critique principale, et de loin la plus percutante, porte sur les éventuelles contradictions de jurisprudence qui pourraient se faire jour entre ces deux organes judiciaires. On ne saurait imaginer quel discrédit il y aurait pour la justice internationale, si la solution dégagée à Hambourg n'était pas la même que celle dégagée à La Haye. Compte tenu de la liberté d'appréciation qu'offre le droit de la mer au juge, ces risques sont bien réels. S 'agissant de la Convention de Montego Bay, nombre de ses dispositions sont imprécises voire dépassées. On peut dès lors se demander si la juridiction de Hambourg aura la même lecture de cette convention que le principal organe judiciaire des Nations Unies. Mais s'il y a un risque de divergence dans l'interprétation des textes conventionnels, que dire en matière de coutume ? De manière générale, il n'existe toujours pas de critères qui permettent de déterminer presque à coup sûr si une règle coutumière existe ou n'existe pas. Or la coutume occupe une place très importante en droit de la mer. Aujourd'hui, on ne sait pas ce qui de la convention de Montego Bay relève du droit coutumier223. Aussi, est-il parfaitement envisageable de penser que la Cour puisse estimer qu'une disposition conventionnelle est devenue une

DOCTRINE 573

règle coutumière alors qu'elle ne le serait pas pour le Tribunal, et inversement224. De plus, les coutumes dégagées par la Cour en droit de la mer ont une origine prétorienne. Le nouveau tribunal ne va-t-il pas également vouloir forger sa propre jurisprudence en la matière ? En outre, peut-on imaginer que la Cour daignera reprendre des solutions dégagées par le Tribunal ?

Toutes ces questions demeurent aujourd'hui sans réponse. Il est à espérer cependant que la C.IJ. arrivera à maintenir l'unité de la jurisprudence en droit de la mer225. Ceci dit, les juges du Tribunal sont conscients des risques de cette dérive226. Fins connaisseurs de la jurisprudence de la Cour, ils chercheront vraisemblablement, sinon à s'aligner, du moins à éviter les contradictions.

* Cet article est un résumé d'un mémoire de D.E.A. effectué sous la direction du Professeur Jean-Marc SOREL.

1 - En ce sens : BERNHARDT (R.), « Custom and treaty in the law of the sea », R.C.A.D.I. 1987 (V), t. 205, pp. 247-330, p. 313. Il n'est dès lors pas étonnant de constater que le droit de la mer occupe une place prépondérante dans la jurisprudence de la Cour.

2 - L'article 38 du Statut de la Cour rédigé en 1920 n'intègre ni les actes unilatéraux des Etats et des organisations internationales, ni les accords informels. Cependant, la C.I.J. en tient compte et les considère tacitement comme de véritables sources du droit.

3 - En vertu de cet article, la jurisprudence et la doctrine ne sont que « des moyens auxiliaires de détermination des règles de droit » : voir infra (III).

4 - Les conventions de codification étaient inapplicables, soit parce qu'au moins un des Etats n'était pas partie à ladite convention - comme dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord-, soit parce que la Convention n'était pas en vigueur - telle l'affaire Libye/Malte - soit parce que le problème soulevé ne pouvait être résolu par une disposition conventionnelle - telle l'affaire Golfe du Maine.

5 - Encore qu'ils sont parfois censés être le fondement des principes équitables dont la Cour recommande l'utilisation en matière de délimitation maritime.

6 - Le Professeur COLOMBOS (C.J.) pouvait écrire en 1952 que « la coutume forme la source la plus importante du droit de la mer » : Le droit international de la mer, Paris, Pedone, 1952, 659 p., p. 1.

7 - Sur la codification voir : DAUDET (Y.) et DUBOUIS (L.), « La codification », J.-Cl. international, Paris, Litec, fascicule 13-D, 1991, 23 p.

8 - ABI-SAAB (G.), « Cours général de droit international public », R.C.A.D.I. 1987 (VII), t. 207, pp. 9- 464, p. 170.

9 - Comme le souligne le professeur BARBERIS (J.A.), « La codification a démontré qu 'elle n 'élimine pas la coutume mais qu'elle pose de nouvelles questions qui sont résolues par la voie coutumière » : « Réflexions sur la coutume internationale », A.F.D.1. 1990, pp. 9-46, p. 10.

10 - Selon l'expression du Professeur STERN (B.), « La coutume au cœur du droit international. Quelques réflexions », Le droit international : unité et diversité. Mélanges Reuter, Paris, Pedone, 1981, pp. 479-499, p. 479.

1 1 - WOLFKE (K.), « Some persistent controversies regarding customary international law », N.Y.B.I.L. 1993, pp. 1-16, p. 2.

12 - Pour une sévère critique du droit international coutumier : DUNBAR (N.C.), « The myth of customary international law », Australian yearbook of international law 1978-1980, pp. 1-19.

13 - La C.P.J.I. avait privilégié la conception volontariste de la coutume dans son arrêt du Lotus (1927). Au contraire, la C.I.J. dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord (1969) a retenu la conception objectiviste. Cela dit, précise le professeur RUIZ-FABRI (H.), le juge ne peut s'écarter totalement de la théorie volontariste. En fait, « il recherche l'accord des Etats sur la règle, voire l'acceptabilité de la règle par les Etats, et non pas le consentement des Etats à la règle» : «La coutume », Encyclopédie Dalloz internationale, Paris, Dalloz, 1998, 7 p., p. 4.

14 - Ibid., p. 2.

15 - CONDORELLI (L.), « La coutume », Droit international bilan et perspectives, sous la direction de M. Bedjaoui, Paris, Pedone, 1991, t. 1, 630 p., pp. 187-219, p. 197.

16 - Voir également : ORAISON (A.), « La Cour internationale de Justice, l'article 38 de son Statut et la coutume internationale (Radioscopie de l'article 38, paragraphe premier alinéa b, du Statut de l'organe judiciaire principal des Nations Unies) », R.R.J. 2001, pp. 357-392.

17-11 n'y a guère que les arrêts consacrant l'incompétence de la Cour qui sont uniquement fondés sur des normes conventionnelles : voir les affaires du Plateau continental de la mer Egée (1978), du Timor Oriental (1995) et de la Compétence en matière de pêcheries (Espagne c. Canada) (1998).

1 8 - II s'agit bien entendu de l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord.

19 - Différents critères ont été posés par la Cour dans différents domaines. Ces critères valables quel que soit le domaine concerné, devront être examinés. Ainsi indirectement il sera fait mention d'arrêts ne concernant pas le droit de la mer car la jurisprudence de la Cour forme un tout.

20 - Arrêt du 20 février 1969, Plateau continental de la mer du Nord, Recueil C.I.J. 1969, p. 46, § 83.

21 - Les arrêts rendus par la Cour en droit de la mer concernent presque tous des délimitations maritimes. Alors que les conflits territoriaux sont ancestraux, les conflits de délimitations maritimes sont relativement récents. On observe aujourd'hui une tendance vers l'assimilation de ces deux différends. Il suffit de se référer aux nombreuses affaires tranchées ou encore pendantes devant la Cour sur des différends frontaliers et maritimes telle l'affaire de la Délimitation maritime et question territoriale entre Qatar et Bahrein ou l'affaire de la Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigeria.

22 - Arrêt du 14 juin 1993, Recueil C.I.J. 1993, § 51, p. 61.

23 - En ce sens : SUR (S.), « La coutume internationale sa vie, son œuvre », Droits 1986, pp. 1 1 1-124, p. 112.

24 - WEIL (P.), Perspectives du droit de la délimitation maritime, Paris, Pedone, 1988, 319 p., p. 168.

25 - Cette doctrine vise d'une part à expliquer la formation du droit coutumier et d'autre part à l'interpréter.

26 - RUIZ-FABRI (H.), op. cit., note 13, p. 5.

27 - VISSCHER de (Ch.), Problèmes d'interprétation judiciaire en droit international public, Paris, Pedone, 1963, 269 p., p. 220.

28 - SUR (S.), op. cit., note 23, p. 1 19.

29 - Voir par exemple : C.P.J.I., 7 septembre 1927, Lotus, série A, n°10, p. 28 ; Nottebohm (deuxième phase), arrêt du 6 avril 1955, Recueil C.I.J. 1955, p. 22.

30 - RUIZ-FABRI (H.), op. cit., note 13, p. 4.

31 - Voir par exemple Plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/Malte), arrêt du 3 juin 1985, Recueil C.I.J., p. 33, § 34.

32 - Dans les affaires de la Compétence en matière de pêcheries (fond), la Cour a pris en compte la pratique des commissions des pêcheries de l'Atlantique du Nord-Ouest et de l'Atlantique du Nord-Est : arrêt du 25 juillet 1974, Recueil C.I.J. 1974, p. 26, § 58 (les deux arrêts de la Cour ayant un contenu identique, les références citées seront celles de l'affaire Royaume-Uni c. Islande).

33 - Pour autant, certains auteurs considèrent que les traités ne reflètent pas la pratique mais Vopinio juris : voir par exemple KIRCHNER (J.), « noughts about a methodology of customary international law », Austrian journal of public and international law 1992, pp. 215-239, p. 232.

34 - Dans l'affaire de la Compétence en matière de pêcheries (fond), la Cour a constaté que « les droits préférentiels de l'Etat riverain ont été reconnus dans divers accords internationaux, bilatéraux et multilatéraux » : Recueil C.I.J. 1974, p. 26, § 58.

35 - La Cour a repris explicitement ces indications dans l'affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua : arrêt du 27 juin 1986, Recueil C.I.J. 1986, p. 95, § 177.

36 - A savoir transcrire sous forme conventionnelle des normes coutumières.

37 - Dès lors le processus de maturation de la règle coutumière est mené à termes à travers l'élaboration, la négociation et l'adoption du traité de codification ; « de sorte que la règle coutumière et son reflet codifié achèvent leur parcours en même temps, l'un portant l'autre dans sa lancée au point d'aboutissement » : ABI-SAAB (G.), « La coutume dans tous ses états ou le dilemme du développement du droit international général dans un monde éclaté », Etudes en l'honneur de Roberto Ago, Milan, Guiffré, 1987, 4 vol., t. 1, 455 p., pp. 53-65, p. 55.

38 - Affaire du Plateau continental de la mer du Nord : Recueil C.I.J. 1969, p. 39, § 64. 39 -Ibid, p. 41, §71.

40 - Ibid, pp. 32-33, § 47 ; p. 47, § 86 ; p. 53, § 100.

41 - JOUANNET (E.), « Droit non écrit», Droit international public, sous la direction de D. Alland, Paris, PUF, 2000, 807 p., pp. 267-308, p. 282.

42 - Ainsi, par exemple, la zone économique exclusive est devenue une règle coutumière suite à l'accumulation des mesures nationales établissant une telle zone : infra (II, B, 2).

43 - Parmi ces actes internes figurent les décisions judiciaires internes : voir entre autre l'affaire du Lotus, C.P.J.I., Série A, n°10, p. 29 et l'affaire Nottebohm, Recueil C.I.J. 1955, p. 23.

44 - Pour une prise en compte de la pratique interne d'une organisation internationale voir l'avis sur la Namibie du 21 juin 1971 : Recueil C.I.J. 1971, p. 22.

45 - Ainsi, dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord, elle a considéré que seuls pouvaient être pris en compte les précédents tirés d'Etats limitrophes et non ceux tirés d'Etats dont les plateaux se font face : Recueil C J J. 1969, p. 45, § 79.

46 - Voir l'affaire colombo-péruvienne relative au droit d'asile, arrêt du 20 novembre 1950, Recueil C.I.J. 1950, p. 277 et Vqffaire du droit de passage sur territoire indien (fond), arrêt du 12 avril 1960, Recueil C.I.J. 1960, p. 40. La C.P.J.I. exigeait une « pratique internationale constante » : C.P.J.I., 17 août 1923, Wimbledon (Vapeur), série A, n° 1, p. 25.

47 - Voir l'affaire du Droit d'asile : Recueil C.I.J. 1950, p. 277.

48 - Voir Vqffaire des pêcheries, arrêt du 18 décembre 1951, Recueil C.I.J. 1951, p. 138.

49 - Voir l'affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci : Recueil C.I.J., 1986, p. 98, § 186.

50 - Dans son arrêt du 16 mars 2001 en Y affaire de la délimitation maritime et des questions territoriales entre Qatar et Bahrein, la Cour fait mention d'une pratique « largement répandue » : § 205 (arrêt disponible sur le site www.icj-cij.org/).

5 1 - Au demeurant, l'unanimité rendrait vain la création de toute règle coutumière.

52 - Recueil C.I.J. 1951, p. 128.

53 - Recueil C.I.J. 1969, p. 43, § 74.

54 - Le nombre nécessaire d'Etats ne saurait être quantifié. Néanmoins l'exigence d'une pratique large, à laquelle se réfère la C.I.J., n'implique pas forcément une action positive de la part d'un grand nombre d'Etats, surtout s'il n'apparaît pas de prétentions divergentes : voir par exemple la coutume en droit international de l'espace extra-atmosphérique. S 'agissant de la représentativité, la Cour a manifesté une extrême discrétion à son sujet.

55 - II ne s'agit évidemment pas de faire de discriminations entre les Etats. Mais, il est certain que selon le domaine considéré, la pratique de certains Etats compte plus que d'autres. Ainsi, les Etats sans littoral n'ont eu aucun rôle dans la formation des règles coutumières du droit de la mer. En revanche, au moment de l'adoption de la Convention de Montego Bay, les 30 pays sans littoral ont eu au moment de voter, le même poids que les Nations côtières ou maritimes. Aussi, souligne le juge de LACHARRIERE (G.), « la voie conventionnelle est avantageuse pour tous ceux qui trouvent un intérêt à une participation égalitaire à la définition du droit, c'est à dire d'abord la garantie d'une participation, que n'offre pas automatiquement le droit coutumier, et ensuite à la garantie que cette participation se fait "à égalité", sans ce dosage des influences en fonction des circonstances concrètes [...] qu'implique le processus d'élaboration du droit coutumier » : La politique juridique extérieure, Economica, Paris, 1983, 236 p., p. 39.

56 - MONCONDUIT (F.), « Affaire du plateau continental de la mer du Nord. République Fédérale d'Allemagne c. Danemark. République Fédérale d'Allemagne c. Pays-Bas. Arrêt du 20 février 1969», A.F.D.I. 1969, pp. 213-244, p. 234.

57 - Recueil C.I.J. 1969, p. 43, § 74.

58 - Sur ce point : CHARPENTIER (J.), « Tendances de l'élaboration du droit international public coutumier », colloque S.F.D.I. 1974, Paris, Pedone, 1975, 224 p., pp. 105-131, p. 109.

59 - JOUANNET (E.), op. cit., note 41, p. 287.

60 - Sur l'historique de la notion d'opinio juris voir : GUGGENHEIM (P.), «L'origine de la notion de l'opinio juris sive nécessitât is comme deuxième élément de la coutume dans l'histoire du droit des gens », Hommage d'une génération de juristes au président Basdevant, Paris, Pedone, 1960, 561 p., pp. 258-262.

61 - Qualifié de la sorte par la Cour dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord : Recueil C.IJ. 1969, p. 44, §77.

62 - Voir KELSEN (H.), « Théorie du droit international coutumier », Revue internationale de la théorie du droit, cité par BARBERIS (J.A.), « L 'opinio juris comme élément constitutif de la coutume d'après la Cour de la Haye », Rivista di diritto internazionale 1967, pp. 563-583, p. 571 .

63 - Au demeurant, dans leurs derniers écrits, les professeurs KELSEN et GUGGENHEIM sont revenus sur leurs affirmations : voir BARBERIS (J.A.), op. cit., note 62, p. 572.

64 - C.P.J.I., série A, arrêt n°10, p. 28.

65 - Recueil C.I.J. 1969, pp. 44-45, § 78.

66 - Ibid, p. 41, § 71 ; p. 44, § 77 ; p. 46, § 85.

67 - II est à noter que la Cour dans deux arrêts antérieurs avait pu abusivement assimiler coutume et usage : voir l'affaire du Droit d'Asile, Recueil C.I.J. 1950, p. 277 et l'affaire du Droit des ressortissants des Etats-Unis au Maroc, arrêt du 27 août 1952, Recueil C.I.J. 1952, pp. 199-200 et 202. Or la violation d'un usage, contrairement à la violation d'une coutume, n'est pas un fait international illicite.

68 - On retrouve ici le débat sur le rôle de la volonté. Sur la conception volontariste et la conception objectiviste de Yopinio juris : STERN (B.), op. cit., note 10, pp. 479-499.

69 - Selon la distinction faite par le Professeur STERN (B.) : ibid., p. 486.

70 - HAGGENMACHER (P.), « La doctrine des deux éléments du droit coutumier dans la pratique de la Cour Internationale », R.G.D.I.P. 1986, pp. 5-126, p. 1 1.

71 - RUIZ-FABRI (H.), op. cit., note 13, p. 5.

72 - RAYNAUD (A.), Les différends du plateau continental de la mer du Nord devant la Cour Internationale de Justice, Paris, LGDJ, 1975, 188 p., p. 104.

73 - Sur la recherche du motif déterminant de l'acte juridique dans le processus coutumier : GOUNELLE (M.), La motivation des actes juridiques en droit international public, Paris, Pedone, 1979, 292 p., pp. 69- 81.

74 - Dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord, la Cour a recherché le motif des accords ou des actes unilatéraux de délimitation des Etats non parties à la Convention de Genève sur le plateau continental. Or, la Cour constate que « les raisons de leur action ne peuvent être que problématiques et restent entièrement du domaine de la conjecture. Il est clair que ces Etats n'appliquaient pas la Convention, mais il serait excessif de conclure qu 'ils croyaient appliquer une règle de droit international coutumier à caractère obligatoire ». La Cour suppose que « d'autres facteurs ont pu motiver leur action » : Recueil C.I.J. 1969, pp. 43-44, § 78.

75 - Ainsi, dans l'affaire du Lotus, la C.P.J.I. a constaté que les Etats s'étaient abstenus dans un certain nombre d'hypothèses d'exercer des poursuites pénales. Pour autant, il n'existait pas de règle coutumière dans la mesure où l'abstention n'était pas motivée par un devoir de s'abstenir : C.P.J.I., série A, n°10, p. 28.

76 - Dans l'affaire des Pêcheries norvégiennes, la Cour a considéré que la délimitation adoptée par la Norvège était conforme au droit international et opposable aux autres Etats, dont le Royaume-Uni. Cet Etat, grande puissance maritime en mer du Nord était forcément au courant du décret norvégien. Or, il est évident que s'il avait eu le moindre doute sur la conformité de ce décret au droit international, il se serait élevé à son encontre. Le système de délimitation norvégien a été appliqué « d'une manière constante et suivie » depuis 1869 et a « bénéficié d'une tolérance générale, fondement d'une consolidation historique qui le rendait opposable à tous les Etats » : Recueil C.I.J. 1951, p. 138.

77 - Voir l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord, Recueil C.I.J. 1969, pp. 38-39, § 63.

78 - Sur cette notion voir : CHARNEY (J.I.), « The persistent objector rule and the development of customary international law », B.Y.B.I.L. 1985, pp. 1-24 et DUPUY (P.-M), «A propos de l'opposabilité de la coutume générale : enquête brève sur l'objecteur persistant », Le droit international au service de la paix, de la justice et du développement : Mélanges Michel Virally, 1990, 511 p., pp. 257- 272.

79 - Dans leur opinion individuelle collective dans l'affaire de la Compétence en matière de pêcheries (fond), les juges ont souligné que « la notion de zone de pêche et la limite des 12 milles se sont établies quand [...] les Etats se livrant à la pêche lointaine ont cessé de contester la validité des mesures prises

par un certain nombre d'Etats riverains » : O.I.C. FORSTER, BENGZON, JIMENEZ de ARECHAGA, NAGENDRA SINGH et RUDA, Recueil C.I.J. 1974, p. 47. 80 - Recueil C.I.J. 1950, pp. 277-278. 81 -Recueil C.I.J. 1951, p. 131.

82 - Selon le Professeur D'AMATO (A.), ces deux affaires n'illustrent en rien une quelconque théorie de l'objecteur persistant. D'après cet auteur, la Cour s'est en fait prononcée dans ces deux hypothèses sur la base d'une coutume régionale. Or, le problème de l'opposabilité de la règle, ne se pose pas dans les mêmes termes selon qu'il s'agit d'une coutume générale ou régionale : « The concept of special custom in international law », A.J.I.L. 1969, pp. 21 1-223, pp. 221-222.

83 - Dans l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord, le juge PADILLA NERVO a souligné que la R.F.A. « a constamment refusé de reconnaître l'article 6 de la méthode de l'équidistance en tant qu 'expression d'une règle de droit international généralement acceptée » : Recueil C.I.J. 1969, p. 97. Les juges LACHS et SORENSEN sont d'un avis contraire : Recueil C.I.J. 1969, p. 238 et p. 247.

84 - SUR (S.), « La coutume », J.-Cl. international, Paris, Litec, 1989, fascicule 13, § 76.

85 - Dans l'affaire Libye/Malte, pour établir que le droit coutumier imposait la définition du plateau continental par un critère de distance, la C.I.J. a eu recours à une méthode analogique. Elle a considéré que le droit coutumier imposait de délimiter une Z.E.E. par un critère de distance. « S'il peut y avoir un plateau continental sans zone économique exclusive, il ne saurait exister de zone économique exclusive sans plateau continental correspondant. Par suite, pour des raisons tant juridiques que pratiques, le critère de distance doit dorénavant s 'appliquer au plateau continental comme à la zone économique exclusive » : Recueil C.I.J. 1985, p. 33, § 34.

86 - Pour une critique sévère de la façon dont la Cour utilise la doctrine des deux éléments : HAGGENMACHER (P.), op. cit., note 70.

87 - Tout en faisant parfois expressément référence à la doctrine des deux éléments dans l'arrêt : voir par exemple l'affaire Libye/Malte : Recueil C.I.J. 1985, p. 29 § 27 et p. 33, § 34. Pour une constatation similaire dans d'autres domaines que le droit de la mer voir : Nottebohm, Recueil C.I.J. 1955, p. 23 ; Barcelona Traction, arrêt du 5 février 1970, Recueil C.I.J. 1970, p. 42, § 70.

88 - Dans cette hypothèse, elle se borne à déclarer généralement admises des normes coutumières sans laisser paraître le moindre doute quant à leur validité. Elle considère ainsi comme établi ce qui est à démontrer. Voir par exemple : l'affaire du Détroit de Cor/ou, arrêt du 9 avril 1949, Recueil C.I.J. 1949, pp. 18, 22 et 28 ; l'affaire Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne), arrêt du 24 février 1982, Recueil C.I.J. 1982, p. 74, § 100. La Cour a également procédé de la sorte dans d'autres domaines : voir par exemple Affaire du temple de Préah Vihéar (fond), arrêt du 15 juin 1962, Recueil C.I.J. 1962, p. 26 ; Barcelona Traction, Recueil C.I.J. 1970, p. 32, § 33. Pour la C.P.J.I. voir l'affaire du Wimbledon : Série A, n°l, p. 28.

89 - A cet égard, il est significatif que le Président GUILLAUME (G.) - ancien conseiller d'Etat - souhaite que les arrêts de la Cour soient plus brefs. « Un jugement bref a d'autant plus de poids qu'il impose au juge lui-même de suivre un raisonnement rigoureux » : « La Cour internationale de Justice. Quelques propositions concrètes à l'occasion du cinquantenaire », R.G.D.I.P. 1996, pp. 323-333.

90 - Encore que cette tendance semble aujourd'hui s'inverser. Certains arrêts récents de la Cour sont dès plus elliptiques.

91 - Arrêt du 25 septembre 1997 : Recueil C.I.J. 1997, pp. 39-46, §§ 49-58.

92 - GUILLAUME (G.), Débats sur La codification du droit international, Colloque S.F.D.1. 1998, Aix en Provence, Paris, Pedone, 1999, 340 p., p. 327.

93 - Voir par exemple : WALDOCK (H.), « General course of public international law », R.C.A.D.I. 1962 (II), t. 106, pp. 1-251, p. 47.

94 - Voir à cet effet les affaires du Lotus et du Plateau continental de la mer du Nord.

95 - Elle s'y est même longuement attardée alors qu'elle ne s'est que très peu appesantie sur la pratique. Voir également l'avis du 8 juillet 1996 relatif à la Licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires.

96 - GUILLAUME (G.), op. cit., note 92, p. 327. Pour le professeur MENDELSON (M.), la Cour ne doit faire la preuve de Vopinio juris que dans certaines hypothèses, telle que lorsque la pratique est incertaine : « The subjective element in customary international law », B.Y.B.I.L. 1995, pp. 177-208, p. 207.

97 - GOUNELLE (M.), op. cit., note 73, p. 79.

98 - GUILLAUME (G.), op. cit., note 92, p. 327.

99 - Au demeurant, telle n'est pas l'attitude de la Chambre d'appel du T.P.Y.. Dans l'affaire Tadic, souligne M. SASSOLI, la démonstration de la Chambre « rappelle davantage une monographie de droit international qu 'un arrêt d'un tribunal international » : « La première décision de la chambre d'appel du Tribunal Pénal International pour l' ex-Yougoslavie», R.G.D.I.P. 1996, pp. 101-134, p. 126. Dans l'affaire du Lotus, la C.P.J.I. s'était livrée à un examen attentif et méticuleux des différents précédents : série A, n°10 pp. 27-31.

100 - Ainsi, par exemple, le principe de la haute mer n'a sans doute plus à être démontré aujourd'hui. Même s'il s'agit d'un principe qui est de plus en plus remis en cause par le phénomène de la juridiction rampante.

101 - DUPUY (P.-M.), Droit International Public, Paris, Dalloz, 4°éd, 1998, 684 p., p. 295.

102 - Elle est au demeurant utilisée par l'ensemble des acteurs, sujets et commentateurs de la vie internationale : JOUANNET CE.), op. cit., note 41, p. 281.

103 - GUILLAUME (G.), op. cit., note 92, p. 327.

104 - HAGGENMACHER (P.), op. cit., note 70, p. 1 14.

105 - Sur les difficultés à séparer pratique et opinio juris : JOUANNET (E.), op. cit., note 41, pp. 280- 281.

106 - DAILLIER (P.) et PELLET (A.), Droit International Public, Paris, LGDJ, 6*"* éd., 1999, 1455 p., p. 33 1. Au demeurant, cette imbrication entre l'élément matériel et l'élément psychologique n'est pas propre à la C.I.J. : voir par exemple l'arrêt rendu le 2 octobre 1995 par la Chambre d'appel du T.P.Y. dans l'affaire Tadic, IT-94-AR72, §§ 96-142.

107 - SUR (S.), op. cit., note 84, § 62.

108- Ib id.

1 10 - Voir par exemple l'affaire Jan Moyen : Recuei/ C.I.J. 1993, p. 63, § 57.

1 1 1 - Recueil C.I.J. 1985, p. 41, § 49.

1 12 - Ibid.

113- Dans cette affaire toujours, ce n'est qu'après avoir écarté pour des raisons de fond la thèse de la proportionnalité en tant que méthode de délimitation, que la Cour ajoute qu' « en tout état de cause la faiblesse de l'argument est que l'utilisation de la proportionnalité comme véritable méthode ne trouve aucun appui dans la pratique des Etats ou leurs prises de positions publiques » : ibid., p. 45, § 58. Voir également l'affaire Tunisie/Libye où la Cour n'a fait mention de la pratique des Etats qu'après avoir décidé d'attribuer un demi-effet aux îles Kerkennah : Recueil C.I.J. 1982, p. 89, § 129 ; l'affaire du Golfe du Maine, où la Chambre ne se réfère à l'accord franco-espagnol dans le golfe de Gascogne que pour confirmer les vues antérieurement énoncées sur la prise en considération de la longueur respective des côtes : Recueil C.I.J. 1984, p. 322, § 184.

1 14 - Au demeurant, cette façon d'agir n'est pas propre au droit de la mer. Le professeur DUPUY (P.-M.) observe que dans l'affaire du Différend frontalier entre la Mali et le Burkina Faso la pratique est « tout au plus une illustration concrète » : « Le juge et la règle générale », R.G.D.I.P. 1989, pp. 570-598, p. 576.

1 15 - La règle de l'équidistance a été consacrée par l'article 6 de la Convention de Genève du 29 avril 1958 sur le plateau continental.

116 - Les exemples de délimitation selon l'équidistance ne représentent qu'une « très faible proportion des cas possibles de délimitation dans le monde » : Recueil C.I.J. 1969, p. 43, § 75.

1 17 - Encore que c'est Tun des problèmes qui a été le plus discuté dans les opinions des juges dissidents : voir notamment Recueil C.I.J. 1969, 0.D. Koretski, p. 156 et suiv.

118 - D'autant que l'arrêt de 1969 n'excluait pas la possibilité de fonder ultérieurement l'autorité de l'équidistance sur les développements de la pratique : Recueil C.I.J. 1969, p. 39, § 64.

1 19 - Voir par exemple l'affaire Libye/Malte : Recueil C.I.J. 1985, p. 38, § 44.

120 - Recueil C.I.J. 1984, p. 299, §111.

121 - Cela ne l'empêche pas de réaffirmer que « cette pratique ne suffit pas à prouver l'existence d'une règle prescrivant le recours à l'équidistance ou à toute autre méthode tenue pour obligatoire » : Recueil C.I.J. 1985, p. 38, § 44.

122 - Recueil C.I.J. 1984, p. 314, § 159, \23-Ibid.

124 - WEIL (P.), op. cit., note 24, p. 166.

125 - Ibid., p. 164.

126 - Dans l'affaire des Pêcheries norvégiennes, la Cour a fait d'une pratique minoritaire — sur la direction générale des côtes - la base d'une pratique générale de droit coutumier.

127 - Recueil C.I.J. 1985, p. 38, § 44.

128 - En 1998, le professeur MENDELSON (M.) faisait état de plus de 130 accords de délimitations. Ces accords donnent des indications sur ce que les Etats considèrent comme équitable. Or dans la grande

majorité des cas, les Etats ont eu recours à l'équidistance : « Formation of customary international law », R.C.A.D.I. 1998, t. 272, pp. 155-410, p. 332. Dans son opinion dissidente dans l'affaire Libye/Malte le juge ODA, qualifie la règle « équidistance circonstances-spéciales » de « règle de droit international coutumier » : Recueil C.I.J. 1985, p. 169.

129 - En ce sens voir les sévères critiques du juge ad hoc Valticos dans son opinion individuelle dans l'affaire Libye/Malte : Recueil 1985, p. 108.

130 - Au demeurant, les tribunaux arbitraux ont adopté la même attitude que la Cour. Voir la sentence du 14 février 1985 sur la Délimitation de la frontière maritime Guinée/Guinée Bissau, publiée à la R.G.D.I.P. 1986, pp. 484-537. Il faut cependant préciser que les trois arbitres étaient juges à la Cour. En fait, selon le professeur DUPUY (P.-M.) seule la sentence rendue dans l'affaire de la Délimitation de la mer d'Iroise semble « beaucoup plus scrupuleuse quant à la nécessité du maintien d'un lien avec la pratique » : op. cit., note 1 14, p. 578.

131 - Aussi importante qu'ait pu être cette déclaration pour le régime juridique du plateau continental, elle ne saurait à elle seule créer une règle coutumière.

132 - Le professeur LANG (J.) critique « la disproportion existante entre l'effort consacré à contester la thèse néerlandaise et danoise concernant le caractère coutumier de l'équidistance et l'absence d'une démonstration véritable apte à établir avec certitude l'existence d'un principe de délimitation équitable » : Le plateau continental de lamer du Nord, Paris, LGDJ, 1970, 168 p., p. 130.

133 - Recueil C.I.J. 1969, p. 46, § 85. La Cour n'a prouvé l'existence d'aucun des deux éléments.

134 - LANG (J.), op. cit., note 132, p. 130.

135 - Si ce n'est dans l'affaire de la Compétence en matière de pêcheries (fond), où la Cour a procédé à un examen minutieux de la pratique internationale.

136 - En ce sens : MANIN (Ph.), « Le juge international et la règle générale », R.G.D.I.P. 1976, pp. 7- 54, p. 26.

137 - Recueil C.I.J. 1969, p. 44, § 78.

138 - Sur les différentes considérations qui guident les accords de délimitation : voir WEIL (P.), op. cit., note 24, pp. 118-123.

139 -Ibid., p. 166.

140 - VISSCHER de (Ch.), op. cit., note 27, p. 227.

141 - WEIL (P.), op. cit., note 24, p. 166.

142 - Recueil C.I.J. 1984, p. 321, § 180.

143 - Voir l'affaire Libye/Malte : Recueil C.I.J. 1985, p. 33, § 34.

144 - WEIL (P.), op. cit., note 24, p. 166.

145 - II n'y a que dans l'affaire Tunisie/Libye où la Cour n'a pas procédé de la sorte (les deux parties en litige avaient considéré la ligne d'équidistance comme inéquitable). C'est pourquoi le professeur DEGAN (V. D.) précise qu'il faut discerner comment la Cour a agi dans une opération concrète de délimitation, de ce qu'elle a elle-même déclarée : «La justice, l'équité et le droit international», Droit et justice. Mélanges en l'honneur de Nicolas Valticos, Paris, Pedone, 1999, 705 p., pp. 89-100, p. 98.

146 - Pour le Professeur DECAUX (E.), « le "développement" de la jurisprudence a été tel qu'à force de précédents répétant que le tracé provisoire d'une ligne médiane n'était pas "nécessaire", celui-ci serait devenu "approprié" » : « L 'affaire de la délimitation maritime de la région située entre le Groenland et Jan Moyen », A.F.D.1. 1993, pp. 495-513, p. 503. Cette approche est confirmée par l'arrêt Qatar/Bahrein.

147 - Selon l'expression de la Chambre dans l'affaire Golfe du Maine : Recueil C.I.J. 1984, p. 300, § 1 13.

148 - Recueil C.I.J. 1984, p. 299, §111.

149 DUPUY (P.-M.), op. cit., note 114, p. 582. En outre, la Cour n'a fait allusion ni aux débats de la Conférence de Genève, ni aux réactions des gouvernements à l'égard du projet d'articles établis par la C.D.I. . Or du point de vue du droit coutumier, les déclarations des représentants officiels présentent

indiscutablement un intérêt. D'autant que lors des débats, les représentants des Etats se sont très largement exprimés sur ce qu'ils croyaient être comme étant du droit : en ce sens LANG (J.), op. cit., note 132, p. 96.

150 - WEIL (P.), op. cit., note 24, p. 168.

152 - Selon l'expression du Professeur WEIL (P.), « A propos du droit coutumier en matière de délimitation maritime », Etudes en l'honneur de Roberto Ago, Milan, Guiffré, 1987, 4 vol., t. 2, 554 p., pp. 541-552, p. 551.

153 - Selon le Professeur DUPUY (P.-M.), la Cour jouit d'une véritable autonomie dans sa démarche dès lors qu'elle est amenée à déterminer des règles générales, qu'il s'agisse de les retenir ou de les écarter : op. cit., note 114, p. 578.

154 - Pour autant, la doctrine a pendant un temps joué un rôle décisif dans la formation des règles du droit de la mer. Ainsi, le principe de la liberté des mers est né de la célèbre querelle entre Grotius et Selden. Pour une synthèse sur le rôle de la doctrine : ORAISON (A.), «.Réflexions sur "la doctrine des publicistes les plus qualifiés des différentes Nations" (flux et reflux relatifs des forces doctrinales académiques et finalisées)», R.B.D.I. 1991, pp. 507-580 et «L'influence des forces doctrinales académiques sur les prononcés de la C.P.J.I. et de la C.IJ. », R.B.D.I. 1999, pp. 205-236.

155 - On remarquera que le texte anglais qualifie ces moyens de source «subsidiaire» et non « auxiliaire ». Il leur accorde ainsi une place plus importante, en les considérant comme de véritables éléments de formations et non de simples références documentaires : COMBACAU (J.) et SUR (S.), Droit International Public, Paris, Montchrétien, 5*"* éd, 2001, 815 p., p. 44.

156 - Sur la position du Professeur Scelle : SOURANG (M.), « La jurisprudence et la doctrine », Droit international bilan et perspectives, sous la direction de M. Bedjaoui, Paris, Pedone, 1991, t. 1, 630 p., pp. 295-300, pp. 298-299.

157 - Comme l'a rappelé la C.I.J., ses arrêts « ne sont obligatoires que pour les parties en litige et dans le cas qui a été décidé » : affaire de la Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigeria (exceptions préliminaires), arrêt du 1 1 juin 1998, § 28 (arrêt disponible sur le site www.icj-cij.org/).

158 - Voir CONDORELLI (L.), «L'autorité de la décision des juridictions internationales permanentes », colloque S.F.D.I. Lyon 1986, Paris, Pedone, 1987, pp. 277-313, p. 309.

159 - ABI-SAAB (G.), « De la jurisprudence. Quelques réflexions sur son rôle dans le développement du droit international », Hacia un nuevo orden international y europeo. Estudios en Homenaje al Profesor Don Manuel Diez de Velasco, Madrid, Tecnos, 1993, 1436 p., pp. 19-26, p. 20.

160 - Recueil C.IJ. 1984, p. 293, § 91. Ce faisant, le juge BEDJAOUI (M.) estime que la chambre est allée trop loin : « L 'énigme des principes équitables dans le droit des délimitations maritimes », R.E.D.I. 1990, pp. 369-388, pp. 371-372. Dans la sentence sur la mer d'Iroise, le tribunal arbitral a étayé sa décision de nombreuses citations extraites de l'arrêt sur le Plateau continental de la mer du Nord. Selon le professeur QUENEUDEC (J.-P.), « le Tribunal a incontestablement entendu reconnaître à celui-ci, la valeur d'un arrêt de principe » : « L'affaire de la délimitation du plateau continental entre la France et le Royaume-Uni », R.G.D.I.P. 1979, pp. 53-103, p. 71.

161 - Ceci apparaît très nettement dans l'arrêt Qatar/Bahrein (fond) : §§ 217-249.

162 - WINIARSKI (B.), Annuaire de la C.IJ. 1961-1962, pp. 1-3, p. 2.

163 - « // est évident que tout prononcé sur la situation de l'Acte de 1928 par lequel la Cour déclarerait que celui-ci est ou n'est plus une convention en vigueur pourrait influencer les relations d'Etats autres que la Grèce et la Turquie » : Recueil C.IJ. 1978, p. 17, § 39.

164 - THIERRY (H.), « L'évolution du droit international. Cours général de droit international public », R.C.A.D.I. 1990 (III), t. 222, pp. 9-186, p. 41. A la première séance tenue à La Haye, le 16 juin 1920, par le Comité consultatif de juristes chargé de préparer le projet de Statut de la C.P.J.I., M. Léon Bourgeois qualifiait cette Cour de «petit nombre déjuges siégeant constamment, recevant un mandat dont la durée permettra l'établissement d'une véritable jurisprudence». L'institution d'une Cour permanente, devait permettre la création d'une jurisprudence internationale. Jurisprudence à laquelle les tribunaux arbitraux en raison de leur éphémère institution ne peuvent aboutir : C.P.J.I., Comité consultatif de Juristes, Procès- verbaux des séances du Comité, p. 7, cité par BASDEVANT (J.), « Règles du droit de la paix », R.C.A.D.I. 1936 (TV), t. 58, pp. 484-692, p. 519.

165 - Au demeurant, la Cour est consciente de l'impact de ses décisions. C'est pourquoi elle fait bien attention de ne pas empiéter sur le droit des tiers : voir la prise en compte des intérêts italiens dans l'affaire Libye/Malte.

166 - Voir : LUCCHINI (L.) et VOELCKEL (M.), Droit de la mer, Paris, Pedone 1996, t. 2, vol. 1, 424 p., p. 183.

167 - Après que la Cour ait rendu son arrêt sur les Pêcheries norvégiennes, aucun Etat n'a ensuite contesté les lignes de base droite : voir JENNINGS (R. Y.), « The judiciary, international and national, and the development of international law », I.C.L.Q. 1996, pp. 1-12, pp. 6-11.

168 - LUCCHINI (L.) et VOELCKEL (M.), op. cit., note 166, p. 200.

169 - Sur ce point voir : LEBEN (Ch.), « La fonction déjuger », Droits 1989, pp. 143-155.

170 - Sur ces différents procédés voir : ABI-SAAB (G.), op. cit., note 159, pp. 20-22.

171 - Dans l'affaire des Pêcheries norvégiennes, par exemple, la Cour a formulé des règles relatives à la mer territoriale dont la nature coutumière a été amplement confirmée par la suite.

172 - ABI-SAAB (G.), op. cit., note 159, p. 22.

173 - WEIL (P.), op. cit., note 24, p. 168. Voir supra (II, B).

174 - Les Etats sont très méfiants à l'égard de l'exercice de la fonction judiciaire : LACHARRIERE (G.), op. cit., note 55, p. 58. En outre, les Etats à cette époque avaient largement déserté son prétoire. Le moment n'était pas propice à l'affirmation de son pouvoir normatif.

175 - Recueil C.I.J. 1993, p. 61, § 51.

176 - LUCCHINI (L.) et VOELCKEL (M.), op. cit., note 166, p. 202.

177 - B*ASDEVANT (J.), op. cit., note 164, p. 491.

178 - Selon l'expression du professeur CONDORELLI (L.), op. cit., note 158, p. 312.

179 - LUCCHINI (L.) et VOELCKEL (M.), op. cit., note 166, p. 201.

1 80 - Dans son arrêt Qatar/Bahreïn (fond), la Cour rappelle que seule Bahreûi est partie à la Convention de Montego Bay. Qatar n'ayant que signé cette convention, « c 'est le droit international coutumier qui est applicable » : § 167.

181 - La Cour s'est notamment livrée à ce périlleux exercice dans l'arrêt Qatar/Bahreïn (fond).

182 - Voir GUILLAUME (G.), Droit maritime et défense, colloque du 28 et 29 mars 1996, Ministère de la défense, Actes du colloque, 210 p., p. 188.

183 - Affaire du Golfe du Maine : Recueil C.I.J. 1984, p. 294, § 94.

1 84 - La Cour, à différentes reprises, a souligné la faible teneur matérielle de ces dispositions : Recueil C.I.J. 1982, p. 49, § 50 et Recueil C.I.J. 1985, p. 30, § 28.

185 - TREVES (T.), intervention faite au cours des débats au colloque S.F.D.I. Aix-en-Provence 1998, Paris, Pedone, 1999, 340 p., p. 327.

186 - Voir par exemple les articles 83, 140, 160 § 2 f) i de la Convention de Montego Bay.

187 - A titre d'exemple, la Cour a estimé dans l'affaire Jan Moyen que dans le silence de la Convention de Montego Bay, les règles applicables aux pêcheries dans la zone économique exclusive sont également transposables aux zones de pêche : Recueil C.I.J. 1993, p. 59, §§ 47-48.

188 - Dénommé pudiquement « accord aux fins de l'application des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer ».

189 - LUCCHINI (L.), « 1996 : où en est le droit de la mer ? », A.D.M. 1996, pp. 17-26, p. 22.

190 - Voir l'article 22 § 1 f) de l'Accord. Cet accord nécessite 30 ratifications pour entrer en vigueur. Il y en a aujourd'hui 25. Le professeur ROSENNE (S.) se demande s'il doit être interprété à la lumière du droit coutumier : « Les problèmes découlant d'une succession de conventions de codification du droit international sur un même sujet », Ann. I.D.I. 1996, session de Lisbonne, vol. 66-11, pp. 143-215, p. 179.

191 - LUCCHINI (L.), « La Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer du 10 décembre 1982 : une entrée en vigueur, pour quelle convention ? », E.R.M. 1993, pp. 1-9, p. 1.

192 - Les opinions dissidentes du juge GROS dans les affaires Tunisie/Libye et Libye/Malte, sont, sur ce point, on ne peut plus explicite : Recueil C.I.J. 1982, pp. 143-156 et Recueil C.I.J. 1985, pp. 360-390.

193 - Recueil C.I.J. 1985, p. 33, § 34.

194 - Pendant un temps, la Cour a succombé au charme de l'équité autonome. Face aux différentes critiques, elle œuvre, depuis l'arrêt Libye/Malte, pour intégrer l'équité au droit. Sur ce point : WEIL (P.), « L 'équité dans la jurisprudence de la Cour internationale de Justice. Un mystère en voie de dissipation ? », Fifty years of the ICJ. Essay in honour of Sir Robert Jennings, Cambridge university press, 1996, 640 p., pp. 121-144.

195 - Recueil C.I.J. 1982, p. 79, § 110.

196 - Recueil C.I.J. 1985, p. 37, § 43.

197 -Ibid, p. 46, §60.

198 - Recueil C.I.J. 1993, p. 60, § 50.

199 - En ce sens : DIPLA (H.), «L'arrêt de la Cour Internationale de Justice en l'affaire de la délimitation maritime de la région située entre le Groenland et Jan Moyen », R.G.D.I.P. 1994, pp. 900- 930, p. 922.

200 - DECAUX (E.), op. cit., note 146, p. 504.

201 - WEIL (P.), op. cit., note 24, p. 13.

202 - CONDORELLI (L.), op. cit., note 158, p. 307. 203-/èW.,p.312.

204 - Dans l'affaire Tunisie/Libye, par exemple, les deux Etats n'étant pas partie à la convention de Genève de 1958 sur la plateau continental, ils se sont référés à la jurisprudence de la Cour en la matière - c'est à dire à l'affaire du Plateau continental de la mer du Nord.

205 - L'exemple le plus significatif est vraisemblablement l'affaire de la Compétence en matière de pêcheries. La Cour était saisie alors que les conventions de Genève étaient remises en cause et que venait tout juste de s'ouvrir la troisième Conférence. Aucune règle certaine et précise ne pouvait être dégagée.

206 - Voir déclaration PINTO, Recueil C.I.J. 1974, p. 37 et FAVOREU (L.), « Les affaires de la compétence en matière de pêcheries, (Royaume-Uni c/ Islande et Allemagne Fédérale c/ Islande) », A.F.D.I. 1974, pp. 253-285, pp. 272-273.

207 - LUCCHINI (L.) et VOELCKEL (M.), op. cit., note 166, p. 202.

208 - Trois affaires sont actuellement pendantes dans ce domaine : l'affaire de la Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le Nigeria, l'affaire de la Délimitation maritime entre le Nicaragua et le Honduras et l'affaire de la Souveraineté sur Pulau Ligitan et Pulau Sipadan (Indonésie/Malaisie).

209 - L'article 7 de la Convention de Montego Bay reprend ces dispositions.

210 - En ce sens : GUILLAUME (G.), « Le juge international et la codification », La codification du droit international, Colloque S.F.D.I. 1998, Aix en Provence, Paris, Pedone, 1999, 340 p., pp. 301-308., p. 304. Parfois en revanche, la solution dégagée par la Cour peut-être infirmée : voir l'affaire de la Compétence en matière de pêcheries (fond) dans laquelle les notions de zone de pêche et de droits préférentiels ont été rapidement dépassées par la notion coutumière de Z.E.E..

2 1 1 - Voir supra.

212 - Pour le Professeur CONFORTI (B.), « // serait absurde de penser que la Cour pouvait renoncer à jouer le rôle que toutes les cours jouent vis-à-vis de matières nouvelles et qui consiste à donner son propre apport, en utilisant des fragments de règles ou en déduisant de principes généraux, afin que la réglementation de ces matières soit consolidée » : « L 'arrêt de la Cour Internationale de Justice dans l'affaire de la délimitation du plateau continental entre la Libye et Malte », R.G.D.I.P. 1986, pp. 313- 343, p. 321.

213 - CAHIER (Ph.), « Les sources du droit relatif à la délimitation du plateau continental », Le droit international au service de la paix, de la justice et du développement : Mélanges Michel Virally, 1990, 511p., pp. 175-182, p. 182.

214 - Paradoxalement, alors que le droit de la mer est profondément juridicisé, il n'en demeure pas moins inconsistant sur bien des aspects.

215 - Sur le pouvoir normatif de la C.I.J. voir : CAHIER (P.), « Le rôle du juge dans l'élaboration du droit international », Theory of international law at the threshold of the 21st century. Essay in honour of KrzysztofSkubiszewski, The Hague/London/Boston, Kluwer law international, 1996, 1008 p., pp. 353-365 et ROS (N.), La Cour internationale de Justice et les règles du droit international. Contribution à l'étude de la fonction effective de la juridiction, Thèse Paris I, Dactyl., 1998, 865 p.

216 - VISSCHER de (Ch.), op. cit., note 27, p. 237.

217 - En ce sens : MEEZE (R.), « Délimitation maritime : règlement juridictionnel et conciliation internationale », A.D.M. 1998, pp. 161-205, p. 172.

218 - Si la Cour n'utilise pas la jurisprudence des tribunaux arbitraux comme précédent, en revanche ces derniers citent la jurisprudence de la C.I.J. : voir par exemple la sentence rendue dans l'affaire Guinée/Guinée-Bissau.

219 - DECAUX (E.), op. cit., note 146, pp. 495-496.

220 - A commencer par les sentences du Canal de Portland et des Grisbadarna : voir LUCCHINI (L.) et VOELCKEL (M.), op. cit., note 166, p. 177.

221 - « Une cour appelée à rendre un jugement ...» : Recueil C.I.J. 1993, p. 62, § 55.

222 - Voir particulièrement : GUILLAUME (G.), « The future of international judicial institutions », I.C.L.Q. 1995, pp. 848-862 ; ODA (S.), « Dispute settlement prospects in the law of the sea », I.C.L.Q. 1995, pp. 863-872.

223 - En vertu de l'article 21 de son Statut, le Tribunal peut être saisi par des Etats non parties à la Convention de Montego Bay. Dès lors, c'est le droit coutumier qui sera applicable. Le Tribunal devra de ce fait dire quelles sont les dispositions de la Convention qui sont entrées dans le droit coutumier.

224 - Pour l'heure, le Tribunal n'a pas encore été confronté à la coutume.

225 - Le Président GUILLAUME (G.) suggère différents moyens pour maintenir l'unité de la jurisprudence face à la prolifération des tribunaux internationaux : op. cit., note 89, pp. 332-333.

226 - TREVES (T.), « Le Tribunal International du Droit de la Mer. Débuts et perspectives », A.D.M. 1996, pp. 27-46.

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The façade of the historic decline in the Parisian population

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In 2015, Paris had a population of 2,206,000 residents, but by 2021, this number had decreased to 2,133,111. This loss of 73,000 Parisians over six years was considered historic for a city accustomed to high birth rates. The trend of population decline began in 2010, but accelerated in the last decade. This decrease in population has sparked national discussion and criticism, with headlines suggesting that Parisians are fleeing the city and that Paris is no longer attracting people.

One major factor contributing to this population decline is the significant drop in birth rates in Paris. In 2022, there were 32,000 births in the capital, but by 2023, this number had decreased to 22,000. The Covid-19 pandemic caused a further acceleration of this trend, with a 18% decrease in births between 2020 and 2023. The reasons for this decline in birth rates are still being investigated, as it is unclear whether this is a temporary postponement of births or a deliberate choice by families.

Contrary to popular belief that the decline in Paris population is due to a post-Covid-19 exodus, statistics show that while departures increased after the lockdown, the numbers have since stabilized. The real issue lies in the lack of new arrivals to the city, which further explains the overall population decrease. The impact of the real estate market on demographic trends is significant, as changes in housing availability and affordability directly affect population movement.

The changing landscape of the rental market in Paris is another key factor driving population decline. The expansion of short-term rentals and second homes has altered the traditional role of the private rental market in accommodating residents. Despite efforts to produce new housing in the city, many units are being diverted to short-term rental platforms, undermining the availability of long-term housing for residents. This shift has particularly affected families, who often struggle to find suitable housing in Paris.

The composition of the housing stock in Paris, with a high proportion of small apartments like studios and one-bedroom units, also contributes to the departure of families from the city. Urban planners note that Paris is designed to accommodate young adults and couples but may not provide adequate family housing options. This trend is not unique to Paris, as other metropolitan areas like Lyon also face similar challenges in providing family-friendly housing options. Addressing these housing issues will be crucial in determining the future population trends in Paris.

In conclusion, the population decline in Paris is the result of a complex interplay of factors, including declining birth rates, changes in the rental market, and the composition of the city’s housing stock. While some may attribute the decrease in population to a post-pandemic exodus, the reality is more nuanced, with deeper structural issues at play. Addressing the root causes of population decline, such as housing affordability and availability, will be essential in shaping the future demographic landscape of Paris.

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Explosions occurred in Moscow region, several settlements lost power

E xplosions were heard in the town of Lytkarino, Moscow region, tonight, November 23. Several settlements in the Moscow region are without power, according to Baza.

Around 1 a.m., local residents allegedly heard a bright flash from the substation. Afterward, the lights went out in the Lytkarivsky district. A fire reportedly broke out at the site of the explosion.

According to Russian media, power was lost in several settlements in the Moscow region.

It should be noted that Lytkarino is situated 30 kilometers from the Russian capital.

Shots fired in Russia

In 2023, the number of attacks in a number of regions of the Russian Federation by attack drones increased. Also, something often burns and explodes on the territory of Russia. Different regions, including Moscow, are under attack.

At the same time, Ukrainian intelligence has already warned residents of the Russian capital that they should hardly relax, as the number of drone attacks will only increase.

In particular, on the evening of November 10, explosions occurred near the Design Bureau of Mechanical Engineering corporation in the Moscow region, where Kinzhals and Iskandars are manufactured.

One of the largest attacks took place on the night of July 30, when unidentified drones struck the business center of the Russian capital, Moscow City. The drones hit the so-called "government tower," which houses the offices of the Ministry of Economic Development, Ministry of Industry and Trade, and Ministry of Communications.

Brigadier General Sergei Baranov recently said that Ukrainian troops are preparing for a large-scale winter attack on various regions of Russia with the help of kamikaze drones.

Several settlements in the Moscow region are without power after the explosions (Photo: GettyImages)

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World meat industry news

All news / a meat processing plant will be built in the moscow region on the territory of the industrial park "lytkarino".

  • 06 Apr 2023, 10:01

In the Moscow region, an investment project is being implemented to build a meat processing plant LLC Meat Manufactory Lytkarino, the company has already received a construction permit and plans to start building production on the territory of the industrial park Lytkarino in the near future, the press service of the Ministry of Agriculture and Food of the Moscow Region reports.

“The enterprise will produce meat products at the level of world standards. This will allow us to take a leading position in the market, as well as create new jobs for the residents of the region. The design capacity of production is 1260 tons of finished products per month. The total amount of proposed investments is more than 1.5-2 billion rubles,” said Georgy Filimonov, Deputy Chairman of the Government of the Moscow Region, who is in charge of the Ministry of Agriculture and Food.

The plant will produce raw smoked and boiled sausages, frankfurters, pates. Products will be made from frozen and chilled raw materials of Russian producers - poultry, pork, beef.

The project will be completed by 2025. It is planned to reach full production capacity within 20 months from the moment the facility is put into operation.

The construction of the new enterprise will make it possible to organize about 300 new jobs.

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COMMENTS

  1. La coutume internationale

    La coutume internationale est la source du droit international général et des traités, mais aussi une source formelle et une source de droit des traités. Cette dissertation analyse la formation et la mise en œuvre de la coutume, ainsi que son rôle dans l'ordre juridique international. Elle aborde les différents aspects de la coutume, tels que l'élément matériel, l'élément psychologique, la mise en œuvre et l'application des normes coutumières.

  2. Réflexions sur la coutume internationale

    I. - Les diverses façons de concevoir la coutume en droit international. 1. La coutume en tant que manifestation d'un droit déjà existant. 2. La coutume en tant que source de droit. a) L'assimilation de la coutume à un traité tacite. b) La coutume en tant que méthode autonome de création du droit. 3.

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    Statut de la Cour internationale de Justice ne pr6cise 6galement pas quels sont les acteurs comptents pour corroborer l'existence de cette acceptation. A partir de la, deux theories s'affrontent pour donner un fondement a la coutume. La th6orie volontariste soutient que la force de la coutume repose sur un accord, du moins tacite, entre les Etatss

  4. Qu'est-ce que la coutume internationale

    En détail. La coutume internationale appartient aux modes de formation non conventionnels du droit international ; elle n'appartient donc pas au droit écrit. L'article 38 du Statut de la Cour internationale de justice la définit comme « […] une pratique générale, acceptée comme étant le droit ». En dépit d'une certaine ...

  5. La place de la coutume internationale en droit public français

    La coutume internationale produit donc pleinement des effets dans le droit interne. Son autorité y est toutefois différente de celle des traités. 3/ La place de la coutume internationale dans la hiérarchie des normes. En droit international, la coutume a la même autorité que les traités. En droit interne, il en va différemment.

  6. PDF Dissertation: La portée de la coutume en droit international public

    Dissertation: La portée de la coutume en droit international public. Depuis les débuts de la codification du droit dans nos sociétés, une place a toujours été accordée à la coutume. C'est en droit international que celle-ci a pris une importance de plus en plus ... La coutume internationale est définie comme étant une manière d'agir ...

  7. PDF De la coutume en droit international humanitaire

    que la Cour internationale de Justice (CIJ), par son Arret de 1986 dans VAffaire des activites militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, a reconnu a la coutume de droit humanitaire un rang egal a celui du droit conventionnel. Selon l'article 38, paragraphe 1, lettre b) des Statuts de la Cour, la coutume est un systeme de normes

  8. Fiche 14. La coutume

    La coutume. Fiche 14. La coutume. À côté des traités qui constituent la principale source écrite du droit international public, la coutume représente la principale source non écrite de ce droit. Elle a joué et joue toujours un rôle essentiel dans l'élaboration du droit international. La coutume se définit comme une pratique ...

  9. Sujet 1. Dissertation

    Dissertation. Sujet 1. Dissertation. Comparez les traités et coutumesLe droit international public trouve ses sources principalement dans les traités et coutumes. Néanmoins, des sources subsidiaires peuvent compléter cet arsenal. À défaut des premières, le juge peut être amené à rechercher d'autres règles applicables, telles que ...

  10. Le droit coutumier, les normes impératives (jus cogens), et la Cour

    Avec les conventions et les principes généraux, la coutume est l'une des sources principales de droit international. Elle est décrite à l'article 38(1)(b) du Statut de la Cour internationale de justice : « la coutume comme preuve d'une pratique générale acceptée comme étant le droit ».

  11. Quelle place pour la coutume dans un monde globalisé

    Pour exister dans toute société pré-européenne, dans une logique d'organisation sociale, la coutume implique la conjonction de plusieurs caractéristiques : - une pratique constante et répétée, garante d'une certaine fiabilité. Elle doit faire preuve de réciprocité et de spontanéité, et rend les agents de l'État superflus ;

  12. L'individu, la coutume internationale et le juge national

    I. INTRODUCTION En accordant une attention soutenue à la protection internationale des droits de l'homme, le Professeur Robert Pelloux a apporté le témoignage d'une conviction profonde, que beaucoup partagent avec lui, voulant que le droit n'ait d'autre finalité que le bien de l'être humain. Cela vaut aussi pour le droit des gens, même si la structure de l'ordre juridique ...

  13. Chapitre 3 : La formation du droit international public

    I - Le mode volontaire de formation du droit international public. A - Les traités internationaux. B - Les actes unilatéraux. 1) Les actes unilatéraux des États. 2) Les actes unilatéraux des organisations internationales. II - Le mode spontané de formation du droit international public. A - La coutume internationale.

  14. La détermination du droit international coutumier entre « clarté » et

    La détermination du droit international coutumier a été l'un des principaux axes de discussion de la Sixième Commission, chargée des affaires juridiques, au troisième jour d'examen des premiers chapitres thématiques du rapport* annuel de la Commission du droit international (CDI), les délégations estimant que ce rapport ne dissipe pas les « incertitudes » sur ce sujet.

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